Les champions de France du paysage participeront, du 5 au 8 octobre, aux finales mondiales des Olympiades des métiers, à Londres. Flash-back sur leur parcours et leur préparation.
L es Olympiades visent l'excellence dans les métiers. Le site du lycée Le Fresne, à Angers (Maine-et-Loire), a été agréé en 2007 « centre d'entraînement national (centre pilote) ». Avec ses treize parcelles couvertes, il accueille les entraînements techniques des candidats à l'épreuve nationale, puis à la compétition mondiale (1). La saison estivale a été l'occasion de rencontrer le binôme champion de France 2011, Dylan Chauvat et Benoît Campas (Pays de la Loire), et les suppléants, François Perier et Benjamin Billet (Paca) lors de leur troisième entraînement technique d'une semaine (2). Durant le précédent stage pratique, le binôme champion du Canada était venu les rejoindre pour un entraînement et un enrichissement mutuel.
Max Martin, expert national et international pour la section paysage, rappelle que « les candidats doivent travailler sur l'exactitude de lecture et la précision de réalisation, sur le respect des cotes (altimétrie, planimétrie), sur la vitesse et la qualité de finition dans un temps déterminé, sur l'organisation, sur la propreté et la rigueur associées à une notion de rythme et de rendement à suivre dans un ordre imposé. Ils doivent aussi travailler leur style, notamment dans la décoration. » L'épreuve internationale et notamment le sujet de Londres sont encore plus exigeants, les concurrents devant réaliser beaucoup plus de choses dans le même temps (deux jours et demi). « Cette compétition reflète l'évolution de notre métier de jardinier-paysagiste, poursuit Max Martin. Celui-ci intègre de plus en plus de matériaux, fait appel à des connaissances et à des compétences transversales dans des disciplines adjacentes. » Les candidats affronteront à Londres quinze binômes étrangers. Les membres des jurys viendront de dix-neuf pays différents ».
Odile Maillard
(1) Ce site reçoit aussi les candidats pour l'épreuve pratique de présélection au concours du Meilleur Ouvrier de France (MOF) tous les trois ans.
(2) Lire le Lien horticole n° 762 du 20 juillet 2011, page 4).
TÉMOIGNAGE
« J' avais déjà tenté le concours de Meilleur Apprenti de France (MAF) en première année de Bepa. Là, c'est ma première participation aux Olympiades des métiers. J'ai découvert ce concours parce que notre école est “pôle national”. En tant qu'élève, je venais voir les entraînements avec notre professeur Pascal Lentier, qui nous expliquait le fonctionnement de cette organisation. J'ai eu envie de m'inscrire. Avec Benoît Campas, nous avons formé un binôme. Nous avons tout d'abord dû passer une présélection départementale avant de devenir meilleurs régionaux et de pouvoir concourir à Paris, où nous avons remporté le titre de champions nationaux. Cette compétition nous permet de trouver de l'assurance dans notre métier et de la confiance en nous. Elle nous apprend à gérer la pression, à améliorer notre rapidité d'action. Elle nous amène à découvrir des matériels, de nouvelles techniques... J'ai aussi acquis plus de savoir-faire grâce aux éducateurs techniques du lycée et à mon maître de stage Denis Thuïa. Cet été, nous avons révisé le sujet de Londres plusieurs fois : une semaine début juillet, trois jours fin juillet, puis quelques jours chacun de notre côté en août. Trois jours sont encore prévus en septembre... Je suis confiant. Nous sommes prêts pour Londres bien qu'il reste des points à affiner pour gagner en précision et en rapidité. Moi, je conseille à tout le monde de tenter le concours. C'est une expérience unique ! J'ai passé un Bepa “travaux paysagers” en deux ans, ici, au lycée Le Fresne. J'ai ensuite obtenu un Bac Pro en deux ans, en formation initiale. À la rentrée, je veux poursuivre avec un certificat de qualification professionnelle (CQP) en maçonnerie, en un an, en alternance au centre de formation professionnelle et de promotion agricoles (CFPPA) Angers Le Fresne et dans l'entreprise d'Olivier Planchenault. Si le végétal est devenu et reste notre base, avec ce CQP, je souhaite me perfectionner et découvrir d'autres matériels et techniques. Ensuite, c'est encore flou... J'espère devenir ouvrier qualifié, puis, petit à petit, évoluer, gérer du personnel, des chantiers et, pourquoi pas, m'installer... dans une bonne dizaine d'années. Mon métier est une belle activité. Il est très physique, regroupe beaucoup de corps de métier. Il n'est jamais monotone et offre de nombreuses possibilités d'évolution. »
TÉMOIGNAGE
« C ette participation aux Olympiades des métiers, je l'ai décidée pour évaluer mon niveau par rapport aux autres, et aussi parce que ce métier de paysagiste que j'adore fait partie du concours. Dylan Chauvat est mon partenaire dans le binôme. Notre entente est vraiment très bonne. Nous avons suivi tous nos travaux pratiques de cours ensemble, avec une bonne complicité depuis maintenant quatre ans. Il s'agit de mettre à profit notre complémentarité : lui aime réaliser les murets, moi plutôt la maçonnerie au sol comme les pavages, les dallages... En plus de mes diplômes, Bepa et Bac Pro, la médaille d'or et donc le titre de champion de France, décroché lors de la finale nationale à Paris, m'ont apporté une gratification supplémentaire. La compétition m'a permis de travailler et d'apprendre au-delà des cours classiques (le bois, par exemple), et de réaliser des choses que je n'aurais jamais pensé faire auparavant comme un muret baignant dans un miroir d'eau. Ce sujet, nous l'avons travaillé avec le plan qui avait été donné au Japon lors de la compétition mondiale qui s'est déroulée il y a quatre ans. Tout au long de ce printemps, nous nous sommes donc entraînés. Participer à une telle compétition nous servira tout au long de notre vie ! Par exemple, avant les épreuves nationales, nous avons eu une préparation mentale pour travailler sur la gestion du stress, pour nous aider à ne pas nous déconcentrer devant le public et les juges. Ensuite, avec l'équipe de France (NDLR : tous métiers confondus), nous avons participé à différentes disciplines sportives pour mesurer notre capacité à résister dans un concours. Nous devons travailler vite et bien ! Il nous reste encore quelques points à améliorer, notamment stratégiques dans l'objectif de gagner du temps. Après le championnat mondial de Londres, au mois d'octobre prochain, j'envisage d'arrêter la participation aux concours. Celui-ci a exigé deux années de présélections très intensives, avec entraînements, préparations physique et mentale.... À la rentrée, je vais poursuivre mes études par un BTS « travaux paysagers », en apprentissage cette fois, à l'École supérieure d'agriculture (ESA) d'Angers. Ensuite, j'aimerais devenir chef d'équipe ou avoir un autre poste à responsabilités. Pour le moment, je ne compte pas m'installer. »
TÉMOIGNAGE
« J' ai passé un BEP et un Bac Pro option “travaux paysagers”, puis un certificat de spécialisation (CS) option “maçonnerie paysagère”. C'est durant ce CS que j'ai connu les Olympiades des métiers, grâce à Benjamin Billet, un copain maçon. La participation à ce concours m'a permis de travailler en binôme. Nous nous voyons cependant très peu à cause de notre éloignement géographique. Nous devons donc nous faire confiance et bien nous coordonner. Moi, je préfère la maçonnerie et le travail du bois, lui montre plus d'intérêt pour les pavages et la décoration. Ayant obtenu le titre de seconds lors de la finale à Paris, nous sommes suppléants pour Londres. Depuis cet été, nous nous entraînons avec le binôme champion pour les soutenir, placer la barre plus haut, les pousser à faire mieux. Depuis deux ans, je suis Compagnon et fais mon Tour de France : un an à Tours, un an à Angers, où je dirige des chantiers. Mais je vais arrêter. J'aimerais me mettre à mon compte. Je m'intéresse à l'aménagement des petits jardins et des patios de particuliers. »
TÉMOIGNAGE
« J' ai connu cette compétition grâce aux Compagnons du devoir du bâtiment auprès desquels elle est très prisée. J'avais d'ailleurs déjà participé à des finales régionales à Strasbourg où j'avais terminé troisième. J'y ai beaucoup appris : gérer des timings, se surpasser, évaluer ses limites en un temps déterminé, développer l'esprit d'équipe en binôme. Quant à mon métier, je l'ai découvert lors d'un stage d'initiation-découverte en classe de troisième. Il nous permet d'embellir le paysage à l'aide de matériaux divers puis de végétaux qui apportent la touche finale, et d'offrir aux gens la possibilité de se retrouver dans des espaces naturels. C'est important pour le moral. J'aime ce métier varié, complet et très physique. Au départ, j'ai passé un Bepa « travaux paysagers » puis j'ai suivi une formation de chef d'équipe (communication, gestion de chantier, devis, sécurité...). Pendant cinq ans, j'ai fait mon Tour de France chez les Compagnons du devoir, via différents contrats de professionnalisation de cinq à six semaines : Albi, Strasbourg, Épône, Paris, Marseille. J'ai pu réaliser des stages de perfectionnement dans les domaines de la fontainerie, de la maçonnerie, du coffrage, du dallage, du pavage, de l'histoire de l'art des jardins... J'arrête mon compagnonnage à la fin du mois d'août et je vais poursuivre mon CDI chez Jean-Marc Berdoz, en Suisse. Je participerai peut-être plus tard au concours Un des Meilleurs Ouvriers de France (MOF), si je trouve le temps. »
TÉMOIGNAGE
« L es difficultés techniques à Londres tourneront autour d'une réalisation évoquant la campagne irlandaise, avec pavage en pierre, clôture, pont et « passage de berger » en bois, bassin et cascade avec pose de liner... sans oublier un mur en pierres sèches sur 8 mètres, avec courbe et contrecourbe, et deux parements extérieurs inclinés. Moi, je les fais travailler surtout sur la décoration finale : plastique, esthétique... avec, si possible, une touche de poésie, notamment avec les végétaux. Un travail de personnalisation et de regard. Les trois stages techniques d'une semaine chacun, en avril, fin mai-début juin et en juillet, permettent aux concurrents de se préparer à l'épreuve mondiale. Les entraînements, durant l'année scolaire, sont vus par les autres élèves, et les sujets sont proposés aux professeurs volontaires. Ils peuvent travailler le plan, faire des calculs, proposer une chronologie de réalisation, confronter leur expertise et, même, travailler l'anglais... Une façon concrète de motiver les élèves et de révéler des capacités... »
TÉMOIGNAGE
« A u lycée de Rignac, qui prépare les élèves à des Bac Pro et à des BTS option “paysage”, nous avons maintenant un bâtiment dédié à l'entraînement aux Olympiades des métiers qui devient un outil pédagogique à part entière, utile pour redynamiser les formations. Au menu : l'entraide, la méthodologie, la rigueur, la curiosité, l'ouverture d'esprit, l'envie de progresser... Nous avons développé plus de travail en pluridisciplinarité. En cours de mathématiques, par exemple, travailler sur les sujets de compétition redonne du sens et de l'intérêt à l'enseignement. Les professeurs volontaires y trouvent eux aussi une motivation nouvelle, avec une occasion supplémentaire de former de bons professionnels, et pas seulement d'assurer la préparation des jeunes aux examens. À titre personnel, en tant qu'accompagnant et membre du jury, j'ai appris le haut niveau de l'excellence, en particulier pour les travaux autour de la pierre sèche. Nous avons deux binômes d'anciens élèves qui sont allés au Japon et au Canada en tant que suppléants (arrivés respectivement troisième et deuxième au national). L'un de ces jeunes, Grégory Mazars, vient de participer, cette année, au concours Un des Meilleurs Ouvriers de France (MOF). Il a monté son entreprise du paysage il y a trois ans, et son associé de binôme travaille en tant que chef d'équipe dans son entreprise. »