Conférence Le jardin sur mesure à Saint-Germain

En octobre dernier, le CFA des Métiers de l'Horticulture et du Cheval de Saint Germain en Laye / Maisons Laffitte (78) a organisé un colloque qui a permis à une centaine de professionnels d'échanger sur les tendances du jardin urbain, qui va se rétrécissant tout en prenant une importance grandissante pour leurs propriétaires...

C'est la seconde année que le CFA des Métiers de l'Horticulture et du Cheval de Saint Germain en Laye / Maisons Laffitte (78) organise un après-midi de conférences-débats. Fin 2011, le thème qu'ils avaient retenu était le « jardin sur mesure ». Morcellement des grandes propriétés, périurbanisation, lotissement des campagnes... L'évolution du cadre de vie multiplie, depuis plusieurs décennies, les petits jardins. Qu'ils soient situés en milieu urbain ou rural, ces espaces parfois minuscules requièrent, pour flatter l'oeil, un aménagement spécifique étroitement lié à leur dimension.Si les petits jardins ont toujours suscité l'intérêt, s'invitant dans la plupart des traités consacrés à l'art paysager, Agnès Bourgoin, formatrice au CFA de Saint Germain-en-Laye (78), a tout d'abord rappelé que leur développement récent donne naissance à de nombreuses théories, souvent catégoriques, concernant leur conception. Volontiers contradictoires, elles privilégient l'illusion optique ou, au contraire, la mise en valeur visuelle des spécificités du lieu. Un choix qui dépend bien sûr des sensibilités personnelles.

La part du végétal dans le chiffre d'affaires en baisseL'enquête UNEP-IPSOS 2011 « Le jardin rêvé des français », présenté par Philippe Feugère, administrateur UNEP, révèle que « le jardin est pour la majorité des français « la pièce magique » qui donne vie et valeur à la maison : pour 1 Français sur 6, le jardin des rêves a pour but d'embellir l'habitation et de lui donner de la valeur. Ils n'ont pas tort quand on sait que les logements avec jardin mettent 6 semaines de moins à se vendre, pour des prix 5 à 11% supérieurs au marché ! Le jardin c'est aussi se relaxer, faire du sport et jouer en plein air pour 17% des Français, ou tout simplement y rencontrer des amis et faire la fête pour 14%. L'attirance pour le jardin comme lieu de détente concerne davantage les plus jeunes (33% ont moins de 35 ans) et les résidents d'agglomérations de plus de 100 000 habitants, souvent en mal de verdure » (1).

Toujours d'après cette enquête, pour un français sur deux, le jardin c'est avant tout bien sûr du végétal.Cette dernière constatation n'est pas évidente pour Didier Danet, entrepreneur du paysage dans les Hauts de Seine depuis 1980 : « pendant les 20 premières années [d'activité de mon entreprise], le végétal représentait pour le secteur création de jardins de particuliers, 30 à 35 % du chiffre d'affaires, alors que depuis 10 ans la tendance minimise l'utilisation des plantes à 10 % de nos créations ». L'évolution est liée à l'aspiration des clients qui privilégient le jardin en une pièce extérieure, endroit de réception, de convivialité. Cette « pièce » à vivre est présente dans les petits jardins de 50 m² et moins comme dans les plus grands jardins.

Les jardineries, interlocuteurs indispensablesLe gout des consommateurs qui privilégient la jouissance d'un endroit particulièrement accueillant et confortable remplace, pour beaucoup d'entre eux, la résidence secondaire, avec les contraintes d'un entretien de jardin et de la maison trop pesant économiquement.Pour Didier Danet le jardin, cette « pièce à ciel ouvert doit correspondre à l'image du style de vie dans la maison. On doit retrouver un lien entre la décoration intérieure et celle de l'extérieur », d'où l'importance d'éléments de décoration comme le bois, les poteries et les bacs, l'eau, mais aussi, ce qui est nouveau, des accessoires comme les spas, les piscines... et sans oublier l'importance de l'éclairage qui permet d'obtenir deux jardins pour le prix d'un !L'importance des accessoires de décoration a bien entendu également été soulignée par Alain Cosson et Christian Bourlanges, respectivement chef de groupe et chef de rayon à la Jardinerie Truffaut d'Herblay (95). Les jardineries sont en effet des interlocuteurs souvent indispensables pour certains clients qui souhaitent avoir des conseils sur la création et l'entretien de leurs petits jardins. L'avis de ces spécialistes ne se limite pas au conseil sur les végétaux mais aussi, et de plus en plus, sur les équipements et décoration nécessaires pour rendre cette « cinquième pièce » agréable à vivre ; présentation des tendances de couleurs, matières et ambiance avec principalement les tendances fluo, graphique et « bien-être ».

Des végétaux à double attraitDepuis 25 ans, Pierre-Alexandre Risser, au sein de l'entreprise Horticulture & Jardins à Saint Prix (95), réalise des jardins, des terrasses et des balcons essentiellement sur Paris et ses alentours. Monsieur Risser a présenté, en s'appuyant sur plusieurs exemples de transformations exemplaires de jardins, une démarche de création spécifique basée sur des expérimentations menées chez lui mais aussi chez ses clients. Il a vu ainsi évoluer les demandes des citadins. « D'un décor original, agréable à regarder, le jardin en ville est devenu une pièce à vivre en plein air pour toute la famille. Il doit permettre les jeux de ballon, le roller, le « farniente» et les repas entre amis. C'est à la fois un cocon protecteur contre les agressions quotidiennes de nos vies trépidantes, un endroit convivial où famille et amis aimeront se retrouver... ».Le végétal n'est pas oublié dans les petits jardins urbains. Pierre-Alexandre Risser ne tarit pas déloge pour ses espèces fétiches (jasmin étoilé, Cercis ‘Forest Pansy', bambou, Nandina...) qui ont au moins un double attrait esthétique : floraison et feuillage persistant ou coloré à l'automne, panaché, fleurs et fruits, silhouette naturelle gracieuse, au printemps...

Plus l'espace est petit, mieux le choix doit être faitPascal Pinel, responsable du développement du secteur pépinière aux Graines Voltz, quant à lui, a précisé que « choisir un arbre mérite réflexion, en effet, plus le jardin est petit, plus l'espace est compté et plus ce choix est important : ses fleurs, sa silhouette, son tronc, son écorce, son feuillage, ses couleurs d'automne, pourront tour à tour capter l'attention. La logique veut que plus l'espace est petit, plus l'arbre qui pourra y pousser devra cumuler les attraits afin de rester beau et admirable à chaque fois que l'on pourra le regarder. Si la floraison (Malus Perpetu® ‘Evereste'...), la couleur du feuillage (Prunus serrulata ‘Royal Burgundy'...), la production de fruits décoratifs (Malus ‘Golden Hornet'...) ou de belles couleurs d'automne (Acer trifolium...) sont importantes, ils ne surpassent pas la forme, la silhouette, le port de l'arbre, que l'on aura sous les yeux toute l'année (Cornus controversa ‘Variegata'...) ».Le colloque organisé par le CFA des Métiers de l'Horticulture et du Cheval de Saint Germain en Laye / Maisons Laffitte a, grâce à la qualité des intervenants, mis en évidence, s'il le fallait encore, que transformer un jardin urbain qui excède rarement 50 à 200 m2, souvent réduit à un rectangle monotone et bien délimité, à une terrasse, une cour intérieure ou un balcon, demande de la méthode et des connaissances techniques paysagères, notamment sur le végétal, mais aussi, et de plus en plus, sur la décoration (mobilier, bacs et poterie, éclairage...).Les paysagistes présents et les apprentis ont bien compris que créer une pièce à vivre extérieure n'est finalement pas si aisé et requiert des compétences professionnelles !

(1) Enquête UNEP-IPSOS 2011 « Le jardin rêvé des français ».

Luis DA COSTA