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Le cèdre de l'Atlas

Cèdre souffrant d'un stress hydrique.

En dépit de sa stature et de sa longévité, le cèdre de l'Atlas n'est pas à l'abri de dégâts causés par une longue sécheresse, un gel printanier ou des xylophages, voire par leur cumul.

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PORTRAIT DE L'ARBRE

Le cèdre de l'Atlas (Cedrus atlantica) offre une silhouette caractéristique : un fût élancé et un port pyramidal dans son jeune âge et le développement de « tables » en vieillissant. Introduit en Europe au début du XIXe siècle comme arbre d'ornement, il a rapidement supplanté le cèdre du Liban (Cedrus libani) au port plus évasé, arrivé un siècle plus tôt. Implanté en bosquets dans les parcs ou en sujet isolé, à proximité des demeures agricoles florissantes ou des hôtels particuliers, il constituait un marqueur social de pouvoir et de richesse. À partir de 1862, des plantations à vocation forestière ont été réalisées sur les flancs du Mont Ventoux. Depuis, le cèdre de l'Atlas a séduit de nombreux propriétaires : 20 000 hectares lui sont aujourd'hui consacrés en France. Cet arbre à feuillage persistant peut atteindre 30 à 40 mètres de haut (50 mètres dans des stations très favorables) et présente une longévité exceptionnelle : 300 à 400 ans (1 000 ans pour certains). Son aire de répartition naturelle se situe au nord-ouest du continent africain, dans les massifs du Haut et du Moyen Atlas. 120 000 hectares sont répertoriés au Maroc et 30 000 en Algérie. L'enracinement de ce cèdre est vigoureux et profond, mais reste peu agressif pour les ouvrages bâtis. Son système racinaire possède une faible capacité de régénération rendant sa reprise délicate et ses possibilités de réaction limitées après une amputation de racines. Lorsque le jeune plant est élevé en godets, il est très sensible au « chignonage » racinaire. Son bois de qualité, de bonne durabilité et à l'odeur très appréciée est utilisé en menuiserie (planchers), en ébénisterie et pour la confection de charpentes. Il existe plusieurs cultivars de cèdre de l'Atlas dont le cèdre bleu (Cedrus atlantica 'Glauca') endémique d'Afrique du Nord. D'autres variétés aux origines horticoles à port pleureur ou érigé sont disponibles.

SENSIBILITÉS ENVIRONNEMENTALES

Dans son aire d'origine, le cèdre de l'Atlas bénéficie d'un climat montagnard et plutôt sec. Il vit entre 1 400 et 2 200 mètres d'altitude, 2 500 mètres pour certains spécimens. En France, ses stations de prédilection se situent en région méditerranéenne, à une altitude comprise entre 300 et 1 000 mètres. Son implantation en plaine est à réserver aux stations fraîches. Bien qu'adapté à la sècheresse et tolérant la chaleur, cet arbre a besoin d'une pluviométrie minimale annuelle de 600 mm répartie de façon équilibrée sur l'année (100 mm entre juin et septembre). Lors des longues périodes de déficit hydrique estivaux, il peut perdre ses aiguilles anciennes et voir son houppier s'éclaircir fortement. Les étés chauds lui sont supportables à condition d'être de courte durée. De par ses origines montagnardes, il accepte également les basses températures hivernales (- 20 à - 25 °C), mais il peut souffrir des gelées printanières responsables du dessèchement de ses jeunes pousses.

Côté sol, le cèdre de l'Atlas se développe aussi bien dans des terrains schisteux que sur des marnes calcaires, mais le sol doit être profond et suffisamment drainé. Un sol superficiel et caillouteux peut donc leur convenir s'il est profondément fissuré. Un terrain hydromorphe, argileux et compacté ou, à l'inverse, sableux et filtrant, ainsi qu'un sol sur « dalles » lui sont inhospitaliers. Le cèdre de l'Atlas est réputé bien résister aux vents, mais les longues charpentières plagiotropes développées sur un vieux sujet sont sensibles à la casse et les enfourchements à écorce incluse – assez fréquents sur cette essence – constituent des points de fragilité. En raison de sa grande hauteur, il est exposé aux impacts de foudre. S'il tolère bien les poussières et résiste aux pollutions urbaines, il est très sensible aux sels de déneigement. En cas d'intoxication par voie aérienne ou racinaire, une nécrose des aiguilles survient rapidement ; de jeunes pousses apparaissent alors qui dépériront à leur tour si la teneur en chlorures est trop importante.

GRANDES AFFECTIONS PARASITAIRES

Le cortège de nuisibles sur le cèdre de l'Atlas est assez peu étoffé. Depuis l'introduction de l'espèce, les problèmes parasitaires spécifiques provenant de son aire d'origine ont rarement suivi leur hôte. Mais le risque de voir se développer de nouvelles affections existe cependant suite à l'introduction d'organismes venus d'Afrique du Nord (cas d'insectes xylophages, par exemple) ou à l'adaptation de certains parasites présents sur des groupes végétaux proches (cas du cortège parasitaire des Abies).

Affections des aiguilles et des rameaux

L'insecte phyllophage le plus redouté pour les cèdres est la chenille processionnaire du pin (Thaumetopoea pityocampa). Peu dommageable sur les arbres isolés, elle devient préoccupante pour les peuplements. L'insecte passe l'hiver dans des nids soyeux confectionnés en bout de branches. Les défoliations les plus spectaculaires s'observent en fin d'hiver avant la descente des chenilles en processions de nymphoses. Une autre espèce, la chenille processionnaire du cèdre (Thaumetopoea bonjeani), défolie les arbres en été, mais elle est actuellement absente d'Europe alors que les deux espèces cohabitent en Afrique du Nord.

Une tordeuse spécifique (Epinotia cedricida), introduite en 1968, sévit dans le sud de la France. Ses dégâts restent peu importants et limités aux jeunes pousses de l'année. Les arbres affectés prennent une teinte rousse au printemps.

Il existe deux espèces de pucerons qui fréquentent les cèdres de l'Atlas : Cinara cedri et Cedrobium laportei. Le premier s'installe sur les rameaux au printemps où il forme des manchons d'insectes. Suite aux prélèvements de sève dans les tissus phloémiens, il rejette de grandes quantités de miellat qui se couvre de fumagine, mais aucun effet dépressif pour les arbres n'est constaté. Le second prend place à la base des bouquets d'aiguilles et peut provoquer leur dessèchement et leur chute, et parfois la mortalité de rameaux. Un parasitoïde spécifique, Pauesia cedrobii, originaire du Maroc, a été acclimaté avec succès en France et contribue activement à la régulation de cette espèce, notamment en région parisienne.

Parasites et ravageurs des branches et du tronc

Les insectes xylophages et les sous-corticaux sont peu nombreux sur le cèdre de l'Atlas en France. Les espèces identifiées ne lui sont pas spécifiques et s'invitent sur d'autres conifères (Abies). Il s'agit essentiellement de scolytes : curvidentés (Pityokteines curvidens), spinidentés (Pityokteines spinidens) et pityographes (Pityophthorus pityographus). Ces insectes opportunistes colonisent les arbres qui se trouvent en état d'affaiblissement.

Un champignon parasite, le Sphaeropsis sapinea – connu sur les pins pour les dessèchements de branches qu'il occasionne – peut infecter le cèdre de l'Atlas à partir de grosses blessures. Il provoque des nécroses corticales plus ou moins étendues associées à une coloration du bois profond.

Problèmes racinaires

Le pourridié à armillaire (Armillaria mellea) est certainement l'agent parasitaire le plus redouté sur le cèdre de l'Atlas dans les parcs et les jardins. Ce champignon se montre particulièrement agressif sur les arbres au système racinaire déformé ou sur des sujets dont l'environnement édaphique a été récemment modifié (travaux), ou lorsque le régime hydrique des sols a été renforcé par des arrosages compensateurs. Le cèdre affecté meurt très rapidement ; après une courte période d'éclaircissement du houppier et de chute massive d'aiguilles, il se dessèche entièrement. Au collet, sous l'écorce en cours de décollement, les palmettes mycéliennes du champignon se distinguent. D'importants écoulements de résine apparaissent souvent sur les écorces à la base du tronc. Parfois, les fructifications en touffe de l'armillaire sont visibles.

Quelques cas d'infection de cèdres par Phytophthora cinnamomi ont été rapportés aux États-Unis. Cet oomycète inféodé aux ambiances humides est responsable de nécroses racinaires remontant jusqu'au collet, entraînant la mort rapide des arbres.

Les champignons lignivores

Parmi les décomposeurs du bois, l'armillaire couleur de miel (Armillaria mellea) agit dangereusement. Le champignon provoque une pourriture blanche fibreuse du bois profond provenant des mâts racinaires et remontant dans la base du tronc (« butt rot ») fragilisant les arbres. Sur les cèdres de parcs, l'agent lignivore le plus courant est le phéole de Schweinitz (Phaeolus schweinitzii). Responsable d'une active pourriture rouge cubique dans la base des troncs, il se manifeste parfois au niveau des enfourchements. Ses fructifications jaunes à brunes en forme d'entonnoir se développent en automne au pied des arbres affectés.

Pierre Aversenq

Cèdre souffrant d'un stress hydrique.

Intoxication aux sels de déneigement.

Écoulements de résine au collet (Armillaria mellea).

Palmettes mycéliennes sous-corticales de l'armillaire.

Arbre foudroyé.

PHOTOS : PIERRE AVERSENQ

Miellat et fumagine.

Puceron des branches du cèdre de l'Atlas (Cinara cedri).

Procession de nymphoses des chenilles processionnaires (Thaumetopoea pityocampa).

Fructification de Phaeolus schweinitzii.

Fourche à écorce incluse arrachée.

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