Login

La filière horticole varoise se cherche un second souffle

La filière horticole varoise est confrontée à de nombreux défis : concurrence internationale, hausse des charges, baisse des surfaces horticoles et du nombre d'exploitations, vieillissement de la population agricole, vétusté du parc de serres... Des défis qu'elle espère relever en mobilisant tous ses acteurs autour d'orientations stratégiques.

Hors pépinière, le département du Var est le premier bassin de production horticole en France. Mais le nombre d'exploitations se réduit et la population agricole vieillit. Face à une concurrence internationale accrue, la fleur coupée varoise doit relever de nombreux défis.

Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.

Si le Maine-et-Loire reste leader en termes de superficie totale (y compris la pépinière), le Var est le premier département français horticole en surface, avec 1 160 ha consacrés à l'horticulture ornementale seule, dont 870 ha de fleurs et plantes (1). Le département produit 40 % de la production nationale en fleurs coupées. Il compte aussi le plus grand nombre d'exploitations horticoles, devant les Alpes-Maritimes et le Maine-et-Loire : une exploitation horticole sur dix en France métropolitaine se situe dans le Var. La majorité d'entre elles (570 entreprises) sont spécialisées. Le département doit pourtant se mobiliser pour maintenir son potentiel de production. En effet, la concurrence européenne et celle des pays tiers (Kenya, Équateur, Israël...) ne cesse de croître. La hausse des charges énergétiques diminue l'intérêt des cultures sous serre chauffée (rose, gerbéra), en particulier dans un contexte de parc de serres peu renouvelé. Outre le manque de successeurs, les incidents climatiques se chargent parfois de donner un coup de grâce prématuré aux exploitations. Ainsi, la basse vallée de l'Argens a été durement affectée par les inondations de juin 2010 et l'avenir de certaines sociétés reste encore incertain. S'ajoutent également les problèmes sanitaires (thrips, aleurodes) contre lesquels les producteurs sont assez démunis depuis la disparition de nombreuses matières actives.

Problématiques : vieillissement, surfaces en baisse et spéculation foncière

Aujourd'hui, 1 740 actifs permanents travaillent dans les entreprises horticoles varoises, plus de la moitié constituée de chefs d'exploitation et membres de la famille, et le reste de salariés permanents. L'effectif de ces derniers a baissé de 43 % en dix ans, majoritairement celui des salariés à temps partiel, du fait de l'abandon progressif des productions secondaires viticoles et arboricoles. Les actifs présents sur l'exploitation ne représentent plus que trois unités de travail annuel.

En 2010, 17 % des chefs d'exploitation varois avaient plus de 60 ans. Parmi ces derniers, deux sur cinq déclarent n'avoir aucun successeur. Une quarantaine d'entreprises et 50 ha de SAU (surface agricole utile), essentiellement à Hyères et La Crau, risquent de disparaître à court terme du fait de cessations d'activité horticole. Or, entre 2000 et 2010, le département avait déjà subi une baisse conséquente du nombre de ses exploitations horticoles (- 30 %) et de sa surface horticole (- 10 %). Le Var est, par ailleurs, soumis à de fortes problématiques foncières. Les prix peuvent dépasser les 10 €/m2, ce qui compromet l'installation des producteurs. L'urbanisation galopante provoque un mitage des parcelles agricoles, réduisant les surfaces exploitables en dessous de la surface minimum d'installation.

Un réseau d'acteurs en action

Les horticulteurs varois commercialisent soit par vente directe soit via la Société d'intérêt collectif agricole du Marché aux fleurs (MAF). La Sica MAF représente ainsi plus de 60 % de la production régionale de fleurs coupées. Il s'agit du premier marché de producteurs français de vente en gros de fleurs coupées, principalement par la vente au cadran. Son chiffre d'affaires est en baisse. Elle réalise 13 % à l'export, le reste en France (Paca, Rhône-Alpes, région parisienne).

Côté technique, les entreprises peuvent s'appuyer sur les compétences de l'antenne horticole de la chambre d'agriculture du Var et du Scradh (Syndicat du centre régional d'application et de démonstration horticole), membre de l'Astredhor. Le groupement de producteurs de fleurs coupées Phila-Flor assure la veille et l'assistance technique, un appui administratif et économique, le suivi de la qualité... pour ses 140 adhérents.

L'association Hyères Hortipole a pour objet de contribuer au développement de la filière. Créée en 1994, elle comporte 12 structures professionnelles (Sica MAF, Phila-Flor, CA 83, Scradh, Syndicat agricole et horticole du Var...) et des producteurs. Ces derniers se sont organisés en réseau sous le nom de Florisud Var Méditerranée. La reconnaissance de ce réseau en tant que Système productif local (SPL) en 2005 puis grappe d'entreprises (2) en 2010 lui a permis d'obtenir des subventions nationales et locales, afin de conduire les projets de développement... La grappe fédère environ 200 membres de la filière fleurs coupées, dont 184 entreprises. Étude de marché, veille concurrentielle et économique (le portail www.florisud.fr a été mis en ligne en 2009), travail sur les plantes méditerranéennes, promotion et développement de la qualité des fleurs coupées, maîtrise des dépenses énergétiques, développement des énergies renouvelables... sont quelques-uns des thèmes traités. Hyères Hortipole a développé la marque Hortisud, collabore au projet du Conservatoire de Baudouvin à La Valette-du-Var, a coordonné le projet Flormed...

Pour empêcher la fuite des terres agricoles, une convention d'intervention foncière a été signée en 2008 entre Toulon Provence Méditerranée et la Safer (Société d'aménagement foncier et d'établissement rural). Dans ce cadre, une nouvelle zone horticole de 13 ha, dont 9 ha couverts, dédiée à la production, devrait s'ouvrir en 2014, sur la commune de La Crau, propriétaire des terrains. Le projet est en cours de finalisation (étude énergétique remise début juillet, réflexion sur le mode de louage des parcelles, aménagements en cours...). L'appel à candidature est ouvert. Cette zone doit permettre d'anticiper sur la baisse du nombre d'horticulteurs.

Créée en 2004 par Hyères Hortipole, la marque Hortisud garantit aux acheteurs le respect d'un cahier des charges qualitatif pour douze variétés de fleurs, ainsi que la standardisation en cohérence avec les normes européennes (longueur de tige, état sanitaire...). L'ensemble des procédures est soumis à un contrôle externe dans le cadre du label national « Charte Qualité Fleurs ». Hortisud a été concédée à la Sica MAF en 2008, dont elle est devenue la marque commerciale de référence. En 2012, 180 horticulteurs l'ont adoptée.

Communiquer auprès des clients finaux

Depuis l'automne 2012, la Sica MAF a engagé une nouvelle stratégie de communication pour renforcer la notoriété des fleurs du Var auprès des fleuristes et des consommateurs. Les premières actions ont été menées ce printemps. Elles se concentrent sur les bassins principaux de consommation, en ciblant les meilleurs clients grossistes et fleuristes, et en se concentrant sur la marque Hortisud qui valorise le terroir varois en faisant apparaître clairement « Fleurs du Var ». Un club de fleuristes Hortisud, sélectionnés par les grossistes clients de la Sica, a été créé. Les 220 fleuristes membres du club disposent d'un kit de communication Hortisud composé d'une vitrophanie, d'affiches « Le Var, terre de fleurs », d'étiquettes de prix, d'une mini-voile de comptoir, d'une clef USB avec des images illustrant la beauté des fleurs varoises. Un accès au site internet d'Hortisud leur est réservé, complété d'une version mobile. Côté grand public, outre la nouvelle marque « Le Var, la terre des fleurs », un site en version mobile (www.varterredesfleurs.fr) a été développé, ainsi qu'un jeu concours pour les consommateurs clients des fleuristes Hortisud. L'objectif est de réunir 900 à 1 000 fleuristes membres du club en quatre ans.

Retour aux cultures sous serre froide et gamme régionale

Le recul des surfaces horticoles varoises résulte de la diminution des surfaces sous serre, tandis que le plein air progresse légèrement, avec des exploitations qui tendent naturellement à s'agrandir du fait du recul du nombre d'exploitations. Sur le bassin est de Toulon, cette extension concerne principalement la pivoine.

Face à la perte de compétitivité des productions chauffées, les serristes se reconvertissent vers des cultures peu ou pas gourmandes en chauffage comme l'anémone ou la pivoine, et des itinéraires culturaux économes (intégration des températures). Pour rester concurrentiels en culture de rose ou de gerbéra, les producteurs doivent investir lourdement (jusqu'à 200 €/m2) : pompe à chaleur, déshumidification, éclairage photosynthétique, gestion climatique... En 2010, 40 % des serres varoises sont chauffées, ce qui représente une centaine d'hectares. Sur le marché d'Hyères (Sica MAF), au cours des dix dernières années, la gamme des fleurs coupées a évolué au profit d'espèces spécifiques à la région telles que la renoncule et l'anémone (hiver), la pivoine (printemps), la célosie, le Lisianthus et l'Helianthus (été). La rose ne constitue plus que 25 % de la production.

Le projet européen Flormed est né en 2009 pour développer, sur trois ans, une stratégie de spécialisation sur des produits méditerranéens (arum, Strelitzia...) et ainsi mieux résister à la concurrence internationale. Cette coopération a réuni quatre pays européens (France, Italie, Grèce et Espagne) pendant trois ans.

Tout n'est pas gagné

La mobilisation des acteurs de la filière horticole varoise démontre un réel dynamisme et une volonté d'aller de l'avant, en effectuant des choix stratégiques : adaptation des cultures aux structures existantes, recherche sur les conduites économes en énergie, gammes régionales, charte de qualité, communication sur l'origine de production... Toutefois, rien n'est joué. Les jeunes générations, bien que mieux formées – par exemple, au lycée agricole d'Hyères-AgriCampus via un BTSA « Production horticole » – n'ont pas les moyens de prendre le relais. La zone de La Crau facilite surtout l'installation ou l'extension de producteurs expérimentés. La filière doit composer avec des plantes importées, souvent produites avec des contraintes phytosanitaires (réglementation, prix des produits) et des coûts de main-d'oeuvre moindres. La spéculation foncière dans le sud de la France ne cessera pas sans une volonté forte des élus. Quant à l'expérimentation, représentée par le Scradh (Syndicat du centre régional d'application et de démonstration horticole), elle est constamment menacée par la baisse répétée des subventions. Face à ces constats, des groupes de travail se sont organisés, afin de trouver des solutions. Celles-ci seront débattues lors des assises horticoles qui réuniront l'ensemble des instances professionnelles, le 4 novembre, dans l'après-midi, à la préfecture du Var.

Valérie Vidril

(1) La majorité des chiffres cités sont issus du bulletin Agreste Paca d'avril 2012 (étude n° 71), résultant de l'analyse des données du recensement agricole de 2010. (2) Les grappes d'entreprises, lancées en 2009 par la Datar (Délégation interministérielle à l'aménagement du territoire et à l'attractivité régionale), ont pour vocation d'offrir des services spécifiques aux entreprises et d'animer des projets collectifs innovants en favorisant les coopérations entre acteurs.

Diversifier les gammesLe Var privilégie des espèces du pourtour méditerranéen, et veut se démarquer par la fraîcheur des produits.

Communiquer sur la qualitéLa marque Hortisud est destinée aux professionnels et « Le Var, la terre de fleurs » s'adresse au grand public.

Favoriser l'installationLa zone horticole de La Crau offrira 13 ha de surface aux nouveaux arrivants avec des services d'accompagnement.

A découvrir également

Voir la version complète
Gérer mon consentement