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AUXILIAIRES INDIGÈNES 3. Les coccinelles

Adulte de coccinelle à damier Propylea quatuordecimpunctata sur une fleur de bleuet.PHOTOS : JOHANNA VILLENAVE-CHASSET

Après les syrphes aux asticots dévoreurs de pucerons, et les chrysopes aux larves prédatrices polyphages, ce troisième volet sur les arthropodes auxiliaires indigènes présente les coccinelles, insectes prédateurs pour la plupart, que l'on croit connaître mais qui sont bien plus complexes qu'il n'y paraît.

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La majorité des coccinelles (famille des coléoptères) adultes se reconnaissent facilement à leur forme hémisphérique et à leurs couleurs vives. Ces couleurs vives sont souvent un repère visuel de toxicité pour les prédateurs éventuels et sont très dissuasives. Certaines espèces sont plus discrètes, sombres, voire noires et minuscules (environ 1 mm).

1 CRITÈRES MORPHOLOGIQUES DES COCCINELLES.

La tête profondément encastrée dans le thorax et des antennes courtes en massue insérées en avant des yeux, sous le rebord du pronotum (partie supérieure du prothorax), permettent de compléter l'identification. Les femelles pondent dès le mois de mars des oeufs qui peuvent être facilement observés sous les feuilles (de noisetiers, de rosiers...) : ils sont souvent orange et pondus en amas. Une femelle peut pondre jusqu'à une cinquantaine d'oeufs par jour. La durée d'incubation dure environ cinq à sept jours selon les températures.

À tort, certains pensent que les points sur les élytres indiquent l'âge, mais les jeunes, c'est-à-dire les larves, ne ressemblent pas du tout aux adultes. Allongées, elles sont de couleurs variées selon les espèces, noires pour certaines, grises avec quelques points rouges-orangés pour d'autres, beiges, ou encore blanches et hirsutes. Il est important de reconnaître les larves puisque ce sont elles qui sont les plus efficaces en tant qu'auxiliaires. Elles peuvent consommer tôt en saison, dès 12 °C, chacune de 100 à 2 000 proies entièrement ou partiellement si elles sont trop importantes pendant environ trois semaines, durée du stade larvaire. Toutes les espèces de coccinelles ne consomment pas de pucerons. Certaines se nourrissent de cochenilles, d'homoptères ou d'acariens. Les adultes peuvent se régaler du pollen à défaut de proies. Certaines sont même phytophages.

Les nymphes ressemblent aux larves mais sont immobiles, de forme globuleuse et rétractée. Elles sont fixées par la partie postérieure de l'abdomen. La nymphose dure une huitaine de jours. Les adultes qui émergeront vivront ensuite plusieurs semaines, voire plusieurs mois, car la plupart des espèces sont univoltines, c'est-à-dire qu'elles n'ont qu'un cycle par an (exemple de la coccinelle à 7 points).

2 PAS MOINS DE QUATRE-VINGTS ESPÈCES DE CES AUXILIAIRES.

Le nom de l'espèce est souvent relié au nombre de points figurant sur les élytres. Pas moins de quatre-vingts espèces ont été dénombrées. En France, on peut observer les coccinelles qui comptent 2, 5, 7, 10, 11, 13, 14, 16 et 22 points. Alors à vos calculs ! Chaque espèce a ses propres besoins bioécologiques ; la nature de leurs proies peut varier tout comme leurs habitats. Certaines vivent dans la strate herbacée, d'autres dans la strate arbustive. Quelques-unes même dans la canopée. Quelques espèces sont spécifiques aux conifères et d'autres sont migratrices.

3 COMMENT FAVORISER LEUR PRÉSENCE SUR LES VÉGÉTAUX ?

Elles sont liées surtout à des strates végétales ou alors à des plantes, comme c'est le cas d'une espèce phytophage : la coccinelle des cucurbitacées. Certaines plantes apparaissent plus ou moins attractives pour quelques coccinelles de la strate végétale basse, soit parce qu'elles hébergent beaucoup de pucerons soit parce qu'elles ont une « odeur » attractive.

Pour une protection optimisée des plantes, il faut chercher à obtenir une grande diversité d'auxiliaires, dont au moins une quinzaine d'espèces de coccinelles (voir tableau). Plus les plantes et strates végétales sont variées, plus on a une chance d'avoir une diversité de coccinelles qui interviendront à différentes périodes sur des proies variées. Le mieux est de soutenir la présence d'auxiliaires en préservant des habitats diversifiés : prairies naturelles, friches, bois morts, haies avec lisière, bois avec sous-bois... Afin de réduire la mortalité due aux champignons comme Beauveria, il est utile d'utiliser des refuges exposés vers le sud qui permettent une bonne aération de la zone d'hivernation. Cela favoriserait Hippodamia undecimnotata sur les légumineuses, Adalia bipunctata sur les rosacées, et Coccinella septempunctata. Ces zones refuges et abris, très variables selon les espèces et même les individus d'une même espèce (bois morts, feuilles enroulées, lierre, litière, sous-bois, vieux murs, habitations...), ne sont pas les uniques solutions pour la préservation des populations de Coccinellidae dans un milieu. Une haie champêtre, avec diverses essences locales (noisetier, charme, prunelier...) agrémentée d'un ourlet fleuri, ou une zone laissée en friche avec quelques patchs d'orties accueillent les populations de pucerons et par conséquent favorisent la présence des coccinelles. Enfin, respecter la végétation au pied des haies, ne pas ramasser les feuilles mortes, décaler le nettoyage au début du printemps s'il est nécessaire, permettent d'assurer la pérennité des sites d'hivernation et a fortiori des populations. Les abris vendus dans le commerce offrent une efficacité très moyenne. Ils doivent être posés très haut pour être repérés lors des migrations.

4 DES ESPÈCES DE COCCINELLES EXOTIQUES.

Harmonia axyridis est un individu de même taille que la coccinelle à 7 points, la plus grande et la plus commune de nos régions. En revanche, elle n'a jamais 7 points, et est polymorphe, de couleur rose ou orange avec aucun ou plusieurs points noirs, ou encore noire avec ou sans points rouges. On la reconnaît à ses deux bandes blanches latérales qui vont de l'avant à l'arrière du pronotum. Cette espèce est commercialisée et introduite en France depuis le début des années 1980. Une souche s'est adaptée aux Pays-Bas et a colonisé le nord de l'Europe. Elle offre l'avantage d'être très vorace, mais présente l'inconvénient de pulluler. Elle pourrait entrer en compétition avec quelques espèces indigènes ; des recherches sont en cours notamment en Suisse. Cette coccinelle hiverne en groupe dans les maisons. Ses rassemblements débutent généralement en octobre, dans les jours plus chauds suivant la première période de froid. Dans les logements, les coccinelles ne se reproduisent pas et ne se nourrissent pas. Attention à ne pas confondre avec celle à deux points, plus petite, indigène, qui s'agrège également dans les maisons en hiver, mais en groupes bien plus restreints.

D'autres espèces de coccinelles exotiques sont commercialisées pour une utilisation sous serre. Le recours à ces espèces doit être réservé à certaines situations en cherchant plutôt à privilégier les espèces indigènes (Villenave-Chasset, 2013).

5 PULLULATION IMPORTANTE LE LONG DE LA CÔTE ATLANTIQUE.

Certaines années, on peut voir des vols importants de coccinelles le long de la côte atlantique. Il s'agit d'individus à 7 points qui migrent vers les Pyrénées en utilisant les courants aériens. Seuls quelques-uns effectuent ce trajet quand les pucerons sont en forte régression. C'est une migration d'estivo-hivernation (les coccinelles se reposent une partie de l'été et pendant tout l'hiver).

Johanna Villenave-Chasset (Flor'Insectes) et Catherine Çaldumbide (Alter'Nature)

Références bibliographiques : - Vincent Albouy. 2009. Jardinez avec les insectes. Éditions du Terran. 359 pages. - Johanna Villenave-Chasset. 2013. La lutte biologique : les principaux prédateurs. Fiches techniques Plante & Cité. 26 pages.

Adulte (ci-contre) et larve (ci-dessus) de coccinelle à 7 points Coccinella septempunctat a.

Adulte (ci-contre) et larve (ci-dessus) de coccinelle à 7 points Coccinella septempunctat a.

Coccinelle à damier Propylea quatuordecimpunctata.

La coccinelle asiatique, Harmonia axyridis, offre une large gamme de coloris : du rouge à points noirs (ci-contre) au noir à points rouges (ci-dessous). Sur le pronotum de ces adultes, les deux bandes blanches latérales vont de l'avant à l'arrière.

La coccinelle asiatique, Harmonia axyridis, offre une large gamme de coloris : du rouge à points noirs (ci-contre) au noir à points rouges (ci-dessous). Sur le pronotum de ces adultes, les deux bandes blanches latérales vont de l'avant à l'arrière.

La coccinelle asiatique, Harmonia axyridis, au stade de larve (ci-contre) et de nymphe (ci-dessus).

La coccinelle asiatique, Harmonia axyridis, au stade de larve (ci-contre) et de nymphe (ci-dessus).

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