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Le polypore soufré, un champignon haut en couleur

Volumineuse fructification regroupant plusieurs consoles imbriquées, de couleur jaune orangé, du polypore soufré sur le tronc d'un saule blanc (Salix alba).PIERRE AVERSENQ

Saprophyte, Laetiporus sulphureus s'installe dans le bois de coeur à la faveur d'une blessure.

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1. PORTRAIT DE CE CHAMPIGNON TRÈS COSMOPOLITE

Le polypore soufré apparaît essentiellement sur les feuillus : chênes, saules, châtaigniers, pruniers, peupliers, robiniers, féviers d'Amérique. Mais, il se fait plutôt rare sur les conifères ; il est cité sur Taxus baccata, Thuya plicata et Larix europaea.

Répartition géographique : très cosmopolite, il se développe sur tous les continents, des zones boréales jusqu'aux tropiques. En Europe, il est présent dans toute l'espace géographique du chêne.

Description de la fructification : elle est annuelle et constituée de nombreux chapeaux en forme d'éventail, imbriqués, superposés et serrés en masse. Elle peut être très volumineuse et atteindre 20 kg. La croissance des sporophores est rapide. Les chapeaux dépourvus de pied mesurent de 10 à 40 cm de diamètre et de 1 à 4 cm d'épaisseur. La marge initialement obtuse devient aiguë. Les dimensions et la coloration des chapeaux sont assez variables. Les jeunes fructifications sont réputées comestibles mais peu consommées en Europe ; en Amérique du Nord par contre, c'est le polypore le plus apprécié ! La surface piléique est lisse, bosselée et ondulée. Souvent zonée concentriquement, elle comporte de larges rides radiales. Les chapeaux, de teinte jaune soufre à orangé vif au départ, se ternissent et prennent une couleur paille grisâtre en vieillissant. La face inférieure est d'un jaune soufre caractéristique. Les pores sont fins (de 3 à 5 par mm), ronds et réguliers. Parfois, des gouttelettes de sudations apparaissent. La sporée est crème blanchâtre. Les tubes très courts (de 1 à 3 mm) et de couleur jaune soufre forment une couche régulière non dissociable de la trame. La trame de teinte crème à blanchâtre est épaisse (de 10 à 30 mm d'épaisseur) et molle chez les jeunes fructifications. Elle devient ensuite sèche et cassante. Sous la pression des doigts, le chapeau se rompt aisément, un peu comme du plâtre.

Confusion possible : la couleur jaune soufre intense et la générosité des fructifications suffisent à caractériser ce polypore et il n'est généralement pas confondu avec d'autres espèces. Sur le tronc des conifères cependant, les fructifications du phéole de Schweinitz (Phaeollus schweinitzii) présentent des caractéristiques assez proches lorsqu'elles apparaissent en groupe. Jaune clair au début, les sporophores deviennent brun rouillé en vieillissant. La surface piléique est tomenteuse feutrée alors qu'elle est lisse chez le polypore soufré et les pores sont de grand diamètre et de forme irrégulière.

Période de fructification : elle a lieu du milieu du printemps jusqu'à la fin de l'automne et se montre éphémère ; les chapeaux se désagrègent assez rapidement et tombent au sol.

2. CONSÉQUENCES POUR LES ARBRES

Le polypore soufré est un champignon saprophyte qui s'installe dans le bois de coeur à la faveur d'une blessure d'origine naturelle ou anthropique. Généralement, il épargne le bois vivant périphérique. Il se développe principalement dans la partie épigée des arbres - le tronc ou les grosses charpentières - mais il s'observe également au niveau du collet chez les vieux sujets.

Dégradation du bois : le champignon dégrade les composés cellulosiques du bois entraînant une pourriture de type « rouge cubique » encore appelée « carie brune ». Les fissures dans le bois sont souvent tapissées de plaquesmycéliennes blanches à consistance de peau de chamois.

Activité lignivore : la décomposition du bois est réputée très rapide et des ruptures d'arbres sont possibles. Cependant, la progression latérale du polypore soufré semble bien contenue par les mécanismes de défense de l'arbre (la compartimentation). La zone de barrage s'oppose alors efficacement à son extension radiale.

3. DIAGNOSTIC ET PRÉCONISATIONS À SUIVRE

La fructification ne passe jamais inaperçue mais elle ne persiste pas longtemps. Il n'est donc pas toujours aisé de mettre en évidence la présence de ce champignon. Parfois, des « restes » d'anciennes consoles de teinte blanchâtre et à la consistance du plâtre mouillé persistent sur les écorces. La pourriture étant bien sectorisée dans les parties duraménisées, le sujet infecté peut rester parfaitement vigoureux sans exprimer le moindre symptôme de dépérissement. Ce type d'altération interne est souvent révélé à l'aide d'un maillet, lors de la « frappe » du tronc ou de la base. En cas de détection ou de suspicion, il est impératif d'évaluer l'étendue du foyer de pourriture avec des outils de mesure spécifiques : les tomographes à ondes sonores ou les pénétromètres. Lorsque la couronne de bois sain périphérique est continue, la tomographie est préférable. Si les mesures doivent s'effectuer au niveau d'un enfourchement ou du collet, les pénétromètres se montrent plus performants. Quand les seuils de « risque acceptable » sont franchis ou si la compartimentation interne paraît inopérante, la suppression de l'arbre est recommandée. Lorsque l'altération est développée au niveau d'un enfourchement maître, le risque d'arrachement de charpentières existe.

Pierre Aversenq

Jeune fructification vivement colorée et à marge obtuse de Laetiporus sulfureus sur le tronc d'un merisier (Prunus avium).

PIERRE AVERSENQ

Quelques « restes » d'une fructification à la base d'un robinier faux-acacia (Robinia pseudoacacia).

PIERRE AVERSENQ

Pourriture du bois de type rouge cubique sur un saule blanc.

PIERRE AVERSENQ

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