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STÉPHANE MARIE, ANIMATEUR TÉLÉ (SILENCE, ÇA POUSSE !, TOUS LES VENDREDIS SOIR, À 21 H 40, SUR FRANCE 5) ET PARRAIN DU SALON DU VÉGÉTAL 2016 « Pour que les plantes se vendent, il faut que ça saute à la tronche ! »

PHOTO : CHRISTOPHE FILLIEULE/LA FABRIK/FTV FRANCE 5

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Pourquoi avez-vous accepté de devenir le parrain du Salon ?

Les organisateurs m'ont contacté et m'ont exposé la façon dont ils envisageaient la réorganisation de la manifestation et j'ai été séduit par l'idée. Ce n'est pas un Salon que je connais vraiment bien, mais je sais que la filière a du mal, que tout le monde souffre. Si mon image peut permettre d'améliorer la situation, c'est une bonne chose. Le Salon est un objet commercial, mais aussi un lieu de rencontres, d'échanges. Dans un contexte difficile où les affaires sont dures, je trouve important de conserver et de redonner une visibilité à ce rendez-vous.

Que vous inspire le thème de cette année, le jardin en ville ?

Je le trouve pertinent. Je ne mesure pas précisément ce qu'il peut apporter à la manifestation, si les exposants y adhéreront. Mais c'est une bonne façon d'axer et de présenter autrement l'offre végétale, de sortir de la routine. Cela devrait donner à voir des choses plus judicieuses, répondant davantage aux besoins des visiteurs, puisque la plupart des jardins sont aujourd'hui urbains et que les attentes y sont différentes. Lorsque, pour la rubrique « Pas de panique » de mon émission, je travaille sur un jardin urbain, je n'ai pas recours aux mêmes produits. En ville, il faut utiliser davantage de plantes d'ombre, des plantes plus petites et plus légères, parce que l'on ne peut pas forcément s'approcher tout près avec un véhicule... Et si je peux tester à la campagne de nouvelles techniques de potager, comme les lasagnes, c'est plus difficile à mettre en oeuvre lorsqu'il faut porter les matériaux au cinquième étage d'un immeuble !

D'où vous vient votre passion pour le jardin ?

Je n'ai pas de formation horticole. Je viens des Beaux-Arts, j'ai été tapissier et j'ai conçu des décors dans des théâtres. Quand je me suis acheté une maison et que j'en ai aménagé le jardin, je me suis dit qu'il manquait une émission télé dans le domaine. En 1998, j'ai vendu l'idée à France 5. Nous avons lancé un petit magazine de 13 minutes, devenu un 26 minutes, en 2002, lorsque Noëlle Bréham m'a rejoint. La rubrique « Pas de panique » date de 2007, et le format actuel est de 52 minutes.

Quel regard portez-vous sur la production française ?

J'ai eu l'occasion de visiter les pépinières Minier pour le lancement de leur marque Silence, ça pousse !, ou d'apprendre que les pépinières Lepage avaient ouvert un nouveau site de production. Quand je vois comment les choses évoluent, sont repensées pour mieux respecter le développement durable, par exemple, je trouve ça formidable et audacieux. Chez Lepage, quand j'entends Christian Crépin parler des innovations qu'il met en place dans sa pépinière alors qu'il vient d'un tout autre secteur, je suis admiratif de ce que du sang neuf peut apporter dans une filière. Mais le monde que je connais le mieux, c'est certainement celui dont vous parlez le moins et dont on parlera le moins au Salon, celui des petites pépinières de collection. Et il faut absolument préserver ces savoir-faire. Quoi qu'il en soit, entre ces différents professionnels, on trouve toujours ce que l'on cherche. Après, ce qui pèche, c'est le commerce. Dans les magasins, pour que les plantes se vendent, il faut que ça saute à la tronche, que les gens aient tout de suite envie d'acheter. Cela demande des remises en avant des végétaux en fleurs sans arrêt, et aussi que les magasins puissent renseigner les clients, ce qui n'est pas toujours le cas.

Comment expliquez-vous le décalage entre le discours actuel dithyrambique pour le végétal et l'atonie du marché ?

C'est pour moi la quadrature du cercle. Parfois, je pense que c'est dû au fait que l'on vit de plus en plus de manière virtuelle, par internet, via les tablettes et smartphones, et que le végétal, réponse matérielle, vivante, apaisante, est souvent vécu de manière tout aussi virtuelle... L'intérêt des gens pour le végétal pourrait être un fantasme, mais le passage à l'acte est plus compliqué qu'il n'y paraît.

Dans votre émission, vous laissez une très large part au végétal. Vous êtes aussi un peu dans ce décalage...

Les plantes sont centrales dans Silence, ça pousse ! Mais, là aussi, selon que nous traitons du jardin en ville ou à la campagne, les choses diffèrent. À la campagne, l'essentiel du budget passe dans les végétaux. En ville, la part passant dans les pots, qui sont chers, augmente largement. Mais on peut raconter une histoire avec une plante, c'est moins mon rôle de le faire avec un pot ! Je regrette souvent de ne pas trouver des plantes magnifiques avec lesquelles il serait facile de séduire le public. J'ai sous les yeux, au moment où je vous parle, des acanthes Hollard's Gold, superbes actuellement...

Comment imaginez-vous le marché du végétal dans quelques années ?

Je pense qu'il y a un avenir pour le coaching lié au jardin. Apporter du conseil aux jardiniers qui sont un peu perdus face à une offre qu'ils ne connaissent pas assez bien. Il faudra aussi que le commerce se remette en question. Pour les indépendants qui ont su garder du personnel qualifié, il n'y a pas de souci. Mais certaines enseignes n'ont pas oeuvré dans ce sens et rencontrent des problèmes pour éclairer leurs clients. Or il ne faut pas mentir. Si un consommateur va dans un magasin et qu'on lui donne un mauvais renseignement, ce consommateur est perdu. Ce sera par exemple le cas s'il a acheté une plante gélive qu'il a mise en pot, mais pour laquelle on a oublié de lui préciser qu'il fallait la mettre à l'abri l'hiver... Le client a besoin d'avoir des vendeurs à sa disposition, de l'écoute. Il faut parler, échanger, peut-être monter des journées de rencontre des jardiniers dans les magasins. S'il n'y a pas de communication, il achètera sur internet. Ces ventes sont encore faibles en horticulture, et je dis merci ! Les gens ont plus que jamais besoin qu'on les prenne par la main, et de rêve quand ils entrent dans un point de vente. L'avenir du jardin est dans l'homme...

Propos recueillis par Pascal Fayolle

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