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« Monsieur le ministre, notre filière n'a plus les moyens d'attendre »

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La Fédération nationale des producteurs de l'horticulture et des pépinières (FNPHP), la Fédération française de la coopération fruitière, légumière et horticole (Felcoop) et l'Union nationale des intérêts professionnels horticoles (Uniphor) ont envoyé une lettre ouverte au ministre de l'Agriculture pour lui faire part de leur inquiétude. Nous la reproduisons ici, très légèrement raccourcie pour pouvoir s'incrire dans le format de cette page.

« Monsieur le ministre, mercredi 21 septembre 2016, le Conseil spécialisé horticole s'est réuni, 3 mois après l'adoption à l'unanimité d'une motion déposée par l'ensemble des syndicats représentant les producteurs. La question du niveau d'engagement de votre ministère auprès de la filière y était posée au travers de quatre points pour lesquels des mesures d'urgence doivent être prises. Au-delà des résultats des travaux menés sur les quatre points, le Conseil spécialisé a été l'occasion d'un bilan de l'état de la filière avec la présentation des chiffres de l'observatoire structurel... Ils sont catastrophiques. En deux ans, la production française a vu 543 entreprises mettre la clé sous la porte, le chiffre d'affaires global s'est effondré (- 12 %) et 1 935 équivalents temps plein (ETP) ont été détruits. Dans ce contexte, vos services, dont nous tenons à souligner l'implication dans le travail réalisé cet été, nous ont présenté les solutions d'aides mises en oeuvre. Concernant les problématiques phytosanitaires, nous voyons plutôt les choses avancer dans le bon sens : une véritable politique de gestion sanitaire émerge, impliquant le terrain, l'Astredhor, le syndicalisme et les pouvoirs publics. En attendant, et c'est dommage, notre filière subit toujours une pression particulièrement forte de vos services de contrôle, à croire que le plus simple est encore de s'attaquer aux secteurs fragilisés !

À propos des aides conjoncturelles, après la météo catastrophique du printemps dernier, les producteurs ont désormais la possibilité d'émarger au dispositif de Fonds d'allègement des charges (FAC). Ce n'est certes pas mauvais, mais dans la mesure où ce FAC finance en réalité la restructuration de la dette des entreprises, le dispositif n'intéressera au mieux, que quelques dizaines d'acteurs du secteur, pour quelques milliers d'euros seulement. Et ces aides sont limitées par la règle des minimis, dans laquelle entrent de plus en plus de choses, et que le montant (15 000 euros sur 3 ans) rend inopérantes.

Nous ne demandons pas l'aumône, mais la véritable prise en compte d'une situation dans laquelle les aléas conjoncturels ne peuvent plus être encaissés puisque les producteurs subissent sans cesse de nouvelles contraintes.

Pour ce qui est du financement de la recherche et de l'innovation, alors qu'il s'agit de l'axe que vous défendez depuis deux ans pour limiter l'appui à l'investissement des entreprises, aucun fonds complémentaire ne va contribuer au développement de la recherche dans notre secteur. Au regard de la situation de la filière, comment pouvez-vous justifier encore aujourd'hui que les 400 000 euros perçus sur le chiffre d'affaires au titre de la taxe pour l'Agence de développement agricole et rural (ADAR) ne reviennent pas automatiquement au financement de la recherche et développement en horticulture ?

Enfin, concernant l'investissement, vos services nous renvoient vers les régions qui ne sont pas encore en ordre de marche. Le ministère ne propose rien de spécifique à l'horticulture, alors que nos concurrents européens qui, eux, en ont compris les enjeux, investissent dans ce secteur, portés par le contexte post Cop 21. Les entreprises françaises restent sur le bord du chemin en regardant passer le train des enveloppes communautaires. Nous vous rappelons que vous aviez pourtant pris l'engagement d'étudier de nouvelles solutions pour l'aide à l'investissement lors de la table ronde organisée chez nous le 16 décembre dernier.

Monsieur le ministre, les mesures proposées par vos services sont largement insuffisantes et nous ne pouvons que déplorer l'absence totale de moyens financiers pour appuyer l'horticulture, alors qu'il y a urgence. Urgence à développer une vision à long terme, fondée sur le « plan stratégique de la filière horticole » que vous nous avez demandé et sur lequel les professionnels se sont investis. Nous partageons les objectifs et devrions d'ores-et-déjà partager les moyens pour reconquérir notre marché intérieur, développer la compétitivité des entreprises, investir dans la recherche et répondre aux enjeux environnementaux et sanitaires.

Cela devrait passer par davantage de moyens financiers. Pourtant, l'année 2016 est celle de la fin de l'appui à la modernisation et nous vous rappelons que ce renoncement intervient après des années de baisse des budgets du Conseil spécialisé horticole. FranceAgriMer ne finance plus l'appui à l'export pour l'horticulture, alors qu'il s'agit de l'une de ses missions fondamentales. Devons-nous rappeler que la filière a subi ces dernières années une double hausse de la TVA, ce qui l'a doublée ? Nous participons à l'effort national, nous en subissons les conséquences avec la baisse de la consommation à cause de cette hausse des prix, et nous n'avons rien en retour !

Le 16 décembre 2015, vous réunissiez l'ensemble de la filière pour une table ronde qui n'a permis en rien d'éviter la situation actuelle. C'est pourquoi, un an après, le 6 décembre 2016, nous vous attendons au Conseil spécialisé de FranceAgriMer, afin que vous nous présentiez un plan d'urgence financé qui donnera à la filière les moyens des ambitions que nous plaçons tous en elle. S'il vous plaît, Monsieur le ministre, ne vous soustrayez pas à cette invitation, notre filière n'a plus les moyens d'attendre.

Nous vous prions de croire, Monsieur le ministre, à l'assurance de notre très haute considération. »

PAR FRANÇOIS FÉLIX, PRÉSIDENT DE LA FNPHP, CHRISTOPHE THIBAULT, PRÉSIDENT DE LA SECTION HORTICOLE DE FELCOOP ET MAX BAUER, PRÉSIDENT DE L'UNIPHOR

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