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L'indigotier : du vert au bleu

Les indigotiers prospèrent en milieux tropicaux ou subtropicaux, mais certains taxons sont acclimatés en France métropolitaine.PHOTO : JÉRÔME JULIEN

Le bleu indigo, « septième couleur de l'arc-en-ciel » selon Isaac Newton, est obtenu traditionnellement à partir de l'indigotier. Revalorisé dans l'artisanat, ce bel arbuste ornemental trouve une place de choix dans les jardins où il joue un rôle utilitaire remarquable.

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Même si aujourd'hui, la couleur indigo est souvent obtenue à partir d'un mélange de pigments bleus ou violets issus de la chimie de synthèse (outremer synthétique, phtalocyanine), afin de répondre aux besoins de l'industrie, elle demeure extraite de l'indigotier pour la confection artisanale de vêtements et accessoires de mode, les loisirs créatifs ou encore la création et la restauration d'oeuvre d'art. Les personnes exigeantes en produits haut de gamme plébiscitent l'origine naturelle et ancestrale de ces dégradés de bleu très singuliers.

Les pigments naturels bleu indigo sont extraits des tiges et des feuilles de plusieurs espèces d'indigotier comme I. anil, I. arecta, I. argentea, I. leptostachya et I. suffruticosa, de la famille des Fabacées. Mais c'est surtout celui des teinturiers (I. tinctoria) qui est utilisé. Ces plantes prospèrent en milieux chauds. De nombreux taxons vivent sur le continent africain, américain ou du sud-est asiatique en biotopes tropicaux ou subtropicaux. Ils sont cultivés dans les pâturages et terres arables. Acclimaté en France métropolitaine, I. tinctoria se plaît dans les régions méditerranéennes ou de climat doux sous influence océanique, du Sud-Ouest au Val de Loire, voire plus au nord en situation protégée.

Une teinture à la cuve

La substance tinctoriale extraite de l'indigotier provient de l'indican et de l'isatan B, précurseurs du bleu indigo ou indigotine. Son utilisation pour la coloration des tissus remonterait à l'Antiquité gréco-romaine et proviendrait d'Inde (d'où l'étymologie d'Indigofera, du latin indicum, signifiant « de l'Inde »). L'indigo s'est développé à partir du XVIIe siècle avec la découverte du Nouveau Monde. Il a supplanté le pastel des teinturiers grâce à ses couleurs plus profondes et intenses, et ses pigments environ vingt fois plus actifs. De nos jours, la teinture naturelle avec l'indigo suscite à nouveau de l'intérêt. Elle est principalement utilisée sous forme d'une poudre cristalline bleu foncé dans l'artisanat africain et asiatique, mais certains tisserands, teinturiers, créateurs et décorateurs français la valorisent aussi à petite échelle, notamment pour la rénovation, la vente locale ou en circuit court.

Comment extrait-on l'indigo ? En Asie du sud-est, les feuilles de l'indigotier sont récoltées à la main avant la floraison, lorsque les pigments sont les plus nombreux et intenses. Puis, elles sont séchées, pilées et compressées sous forme de boules de pâte d'indigo. Ensuite, une longue fermentation en milieu anaérobie et basique va entraîner la dissolution de l'indigo végétal (insoluble dans l'eau) grâce à des produits réducteurs d'origine minérale mélangés à une solution ammoniacale de type alcali. Une fois fermentées, les boules de pâte d'indigo sont introduites dans des cuves (d'où le nom de la méthode intitulée : « teinture à la cuve »), où elles sont réhydratées et mélangées à de la cendre de bois. Elles y macèrent jusqu'à ce que les tissus végétaux libèrent la substance tinctoriale et que la cuve soit colonisée par des bactéries. Le bain est maintenu ainsi pendant plusieurs mois à une température ambiante de 25 °C. En fin de maturation, l'étoffe ou le textile peut être teinté. D'emblée, c'est une couleur jaunâtre ou vert anis qui s'exprime, mais lorsque le tissu imprégné est étendu sur un fil pour sécher, la substance colorante s'oxyde à l'air et se teinte peu à peu en bleu indigo. Ce procédé est répété autant que de besoin jusqu'à l'obtention de l'intensité de bleu désirée.

Jérôme Julien

Un long processus Une longue fermentation en milieu anaérobie et basique entraîne la dissolution de l'indigo végétal.

PHOTO : GITANE

Du vert anis... Lors de la teinture, d'emblée, c'est une couleur jaunâtre ou vert anis qui s'exprime.

PHOTO : MAISON AVEC VUE

... au bleu indigo Lorsque le tissu est imprégné, la substance colorante s'oxyde à l'air et se teinte en bleu indigo.

PHOTO : MAISON AVEC VUE

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