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Stepp-Astredhor Loire-Bretagne : lumière et thé au menu des plantes

Le chrysanthème réagit différemment à la stimulation mécanique selon les variétés.PHOTO : VALÉRIE VIDRIL

La Stepp-Astredhor Loire-Bretagne, dans les Côtes-d'Armor, poursuit ses expérimentations sur les Leds, la réduction des intrants dans le cadre de Dephy et la biotisation des substrats.

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La Stepp (Station technique d'expérimentation des plantes en pot), située à Langueux (22), a présenté ses essais le 14 septembre dernier. Au programme : différents spectres lumineux pour la production végétale, les extraits de compost ou encore les stratégies complémentaires en protection biologique intégrée (PBI).

1. DE LA LUMIÈRE. La Stepp travaille depuis quatre ans sur les effets des différentes longueurs d'ondes issues d'éclairage Led (marques Valoya et Philips) sur la croissance, le développement et l'architecture des jeunes plants. La station a accumulé de nombreuses données sur le sujet. L'intérêt est avéré, plus particulièrement en hiver, en conditions de lumière naturelle faible (1, voir l'encadré Repères). Toutefois, les espèces végétales étudiées présentent des sensibilités variables. Ainsi, un éclairage Led (AP 67 - majorité de bleu et rouge - et NS1 - bleu, vert, rouge - de Valoya), d'une intensité de 60 µmol de photons/m2/s entre minuit et 5 heures du matin de décembre à mars, a permis d'améliorer la qualité (vigueur et/ou compacité et/ou homogénéité) de jeunes plants de semis de Perovskia 'Blue Steel' et d'Osteospermum 'Akila Purple'. Autre exemple : pour la même intensité et le même horaire d'éclairage, sur une période de culture de septembre à avril, la production et la qualité de boutures de dipladénia augmentent sous éclairage Led, en particulier avec le module Greenpower DR/W 150 de Philips émettant dans le bleu, le rouge mais aussi légèrement dans le vert et le jaune.

L'évolution des connaissances amène les fabricants de lampes Led à intégrer dans certains de leurs produits les ondes vertes. Même si elles sont bien moins absorbées par les feuilles que les ondes rouges et bleues, elles traversent plus facilement le feuillage et peuvent atteindre les feuilles moins exposées. Elles peuvent donc présenter un intérêt pour les plantes à architecture complexe (grand nombre d'étages de feuilles). Selon Valoya, fabricant de modules Leds : « Le rouge est le principal composant nécessaire à la photosynthèse et à l'inhibition de l'allongement de la tige (...). Le bleu stimule l'ouverture stomatique, l'inhibition de l'allongement de la tige, l'expansion des feuilles,la courbure vers la lumière et la floraison photopériodique (...). Ajouter d'autres couleurs de spectre telles que le vert pourrait améliorer le taux d'expansion des feuilles et l'allongement de la tige, entraînant une accumulation plus élevée de biomasse (rendement). »

Rappelons que si les lampes classiques (HPS, MH...) restent moins coûteuses à l'achat que les modules Leds, leur spectre lumineux est peu adapté aux besoins de la plante et une grande partie de l'énergie fournie est transformée en chaleur.

2. DU THÉ ET AUTRES STIMULANTS. Les essais de la station bretonne sur les extraits ou thés de composts oxygénés confirment l'intérêt de biotiser le substrat avec une diversité de micro-organismes, grâce aux extraits ou thés de compost (2). Trois origines de composts, mélangées à des additifs - qui servent à nourrir les champignons et bactéries (*) - ont été testées : compost végétal Faliénor ; compost végétal Terraktiv (Klasmann) ; lombri-compost (M. Rockaboy). Cinq litres de produit sont mélangés avec 50 l d'eau, 30 grammes de paille broyée et 250 ml de mélasse dans une cuve chauffée à 20-25 °C. Une pompe à air oxygène la suspension. Après 48 heures à 2 semaines, on obtient un jus chargé en micro-organismes. La suspension est filtrée, diluée (à 50 %) et appliquée sur les cultures à l'aide d'un injecteur (cyclamen en pot) ou d'un pulvérisateur (Impatiens en peine terre). Les traitements sont effectués durant toute la culture une fois tous les quinze jours (100 ml par pot de 14 cm).

Les effets bénéfiques, tout au moins dans le cas étudié de la fusariose du cyclamen (Fusarium oxysporum f. sp. cyclaminis), ne le sont toutefois qu'en condition de pression parasitaire faible. Dans le cadre de la lutte contre cette maladie tellurique (3), deux constats ressortent des essais : une fertilisation trop importante (supérieure à 1 g/l à chaque arrosage) sensibilise la plante à la fusariose ; l'ajout de charbon broyé au substrat offre des résultats prometteurs.

Les essais sur mildiou de l'Impatiens walleriana (Peronosporae grisea) sont en cours.

3. DEPHY DU CHRYSANTHÈME. Les programmes Dephy Expe permettent d'expérimenter des systèmes de culture (SDC) innovants et de les comparer aux SDC conventionnels, en vue de réduire l'Indice de fréquence de traitement (IFT). Par exemple, la Stepp travaille sur le chrysanthème avec quatre autres stations Astredhor. L'utilisation d'auxiliaires et de plantes de service (PDS) complétée par des traitements chimiques de rattrapage en cas de forte pression de ravageurs, de stimulateur de défenses de plantes (Inssimo) pour la gestion de la rouille blanche, et de stimulation mécanique (thigmomorphogenèse) pour la régulation de croissance permettent de réduire l'IFT (- 44 % en moyenne). Toutefois, la marge opérationnelle (le chiffre d'affaires moins les charges) reste pour quatre stations sur cinq inférieure en SDC innovant, du fait du coût des lâchers d'auxiliaires ou d'une moins bonne qualité finale des fleurs. « Dans les essais futurs, les stations Astredhor s'engageront à prendre des risques plus importants pour augmenter cette marge opérationnelle dans les SDC innovants », indique Oscar Stapel, responsable de la station Stepp.

4. NOUVELLES STRATÉGIES : DU SERVICE ET DE L'AIL. Disséminées au sein de la culture, les plantes de services, comme leur nom l'indique, offrent différentes utilités (4). Dans le cadre de la protection, elles peuvent attirer et maintenir les auxiliaires (plantes-réservoirs, à pollen, fleuries) ou servir à détecter et détourner les ravageurs (plantes pièges, répulsives). Elles complètent utilement la PBI. La Stepp étudie l'intérêt de la potentille à fleur jaune Potentilla fruticosa en culture extérieure de chrysanthème dans la lutte contre le puceron. Elle attire beaucoup d'auxiliaires (parasitoïdes et prédateurs), mais aussi de nombreux ravageurs, sans incidence dans la production. Sur culture de géranium de printemps, la stratégie push-pull s'est révélée efficace. L'Alsa (extrait d'ail) a un effet répulsif assez important : après son application, les thrips migrent de la culture devenue peu attractive (effet push) vers la PDS Tagetes erecta plus attractive (effet pull). Il suffit de détruire les tagètes et de les remplacer par des plantes saines pour diminuer la pression parasitaire.

5. ET DES CARESSES... La croissance des plantes - et donc le recours au nanifiants chimiques - peut être diminuée grâce à une stimulation mécanique (effet thigmomorphogenèse) occasionnée par le passage d'une traîne accrochée au chariot d'arrosage qui « caresse » ainsi plusieurs fois par jour l'apex des plantes (5). L'ajout d'une bande engluée (jaune ou bleue) permet de piéger en masse les ravageurs qui s'envolent à la suite du passage de la traîne, mais cet effet reste à quantifier. Il faut veiller à ne pas utiliser de parasitoïdes pour éviter de les attraper en même temps. La double action nanification + piégeage de masse réduit l'IFT. Selon les travaux de la Stepp, l'efficacité de la stimulation mécanique dépend du taxon et peut-être même de la variété. Cette efficacité dépend aussi des caractéristiques de stimulation : épaisseur de la bâche, vitesse de passage, nombre de passages quotidiens (cinq allers-retours minimum recommandés) et horaires de fonctionnement. La qualité des taxons non sensibles ne semble pas dégradée si la stimulation est modérée. Alain Brichet, producteur à Lannion (22), est satisfait de ce procédé qu'il a mis en place dès 2013. Il remplace simplement chaque année les roulements des chariots d'arrosage davantage sollicités.

Valérie Vidril

(*) Un extrait avec plus de bactéries est obtenu avec un compost d'origine animale, un extrait avec plus de champignons est obtenu avec un compost d'origine végétale.

Module led Valoya. L'éclairage led permet d'accélérer le cycle de production des jeunes plants selon les espèces végétales.

PHOTO : VALÉRIE VIDRIL

La large diversité de microorganismes des thés de compost est bénéfique à la plante et peut la protéger contre certaines maladies, en fonction du niveau de pression parasitaire.

PHOTO : STEPP

Capteur solaire testé dans le cadre du programme Techn'Au d'Astredhor (solutions innovantes pour l'agriculture urbaine).

PHOTO : VALÉRIE VIDRIL

Ci-dessus, la lumière naturelle est transportée jusqu'à une chambre confinée par des fibres optiques.

PHOTO : VALÉRIE VIDRIL

Les expérimentations de la Stepp valident l'intérêt de la potentille jaune pour attirer les auxiliaires et du push-pull (association Alsa et Tagetes pour le couple géranium-thrips).

PHOTO : VALÉRIE VIDRIL

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