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OLIVIER RIOLS (CAPSEL), CO-CRÉATEUR FONDATEUR DE JARDINS, JARDIN AUX TUILERIES, QUI AURA LIEU DU 1ER AU 4 JUIN, À PARIS « Jardins, Jardin, moment fort de rencontres pour profession diversifiée »

OLIVIER RIOLS (CAPSEL), CO-CRÉATEUR FONDATEUR DE JARDINS, JARDIN AUX TUILERIES, QUI AURA LIEU DU 1ER AU 4 JUIN, À PARIS

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Jardins, Jardin est-il conforme à ce que vous en attendiez quand vous l'avez créé ?

Lorsque nous avons lancé Jardins, Jardin en 2003, avec Xavier et Dominique Laureau (Fermes de Gally), et Pierre-Alexandre Risser (Horticulture et Jardins), nous souhaitions faire connaître auprès d'un public urbain nos savoir-faire de jardiniers. Nous sommes une association et non des organisateurs professionnels de salons. Nous avions alors trouvé un moyen d'exposer dans Paris en rénovant le jardin de l'école de la rue Monsieur, dans le 6e arrondissement. L'année suivante, à l'occasion du rattachement du jardin des Tuileries au domaine du Louvre et à la même date que la manifestation nationale Rendez-vous au jardin, les nouveaux dirigeants nous ont demandé de réaliser, en partenariat avec le Louvre, un événement dans le jardin des Tuileries. Nous étions loin de la centaine d'exposants, des 13 grands jardins et de la vingtaine de terrasses que nous proposons aujourd'hui. Et non, nous n'imaginions pas cela ; le jardin à l'époque avait un rôle esthétique, d'embellissement de la nature, alors qu'il représente aujourd'hui, en ville, une vraie nécessité, un défi incontournable pour faire pénétrer le végétal dans le bâti. Pour preuve, nos entreprises se voulaient des établissements de création et d'entretien de parcs et jardins. Cela ne correspond plus tout à fait à ce que nous faisons réellement. Notre objectif reste de parler métier alors que notre activité a profondément changé.

Quel est l'impact de la journée professionnelle ?

Très rapidement, nous nous sommes rendu compte que nous devions aller au-devant du grand public, mais aussi nous parler entre professionnels, quel que soit notre rôle dans la filière (concepteur paysagiste, entrepreneur du paysage), mais aussi producteurs, interprofession, SNHF, Parcs botaniques de France, etc. Née en 2008, la journée professionnelle du vendredi, qui attire maintenant plus de 800 participants, comprend de nombreux temps forts : conférences, tables rondes, concours de l'innovation, etc. Nous sommes tous submergés par le quotidien, et nous avons peu de temps pour échanger. Avec Jardins, Jardin nous avons voulu mettre en place un moment fort de rencontres transversales pour que tous les acteurs de notre profession, si variée et somme toute assez dispersée, puissent se rencontrer, échanger, penser aux nouveaux défis de la ville émergente, et tout simplement se connaître. Dans notre monde virtuel, je pense que la relation humaine doit rester au coeur des activités.

Le thème retenu pour cette année est la Ville nature...

Et c'est un thème parlant ! Jardiniers, nous devons avoir un rôle de premier plan dans l'aménagement des villes de demain. Déjà Alphand (nous fêtons cette année le bicentenaire de sa naissance), avait compris cela en y créant des parcs, des squares, des bois. Malheureusement, le XXe siècle, tout à son urbanisation sauvage avait un peu oublié cela. Pour nous faire entendre, nous faire comprendre, nous devons être créatifs et innover afin de trouver les solutions, avec le végétal comme matière première, pour intégrer la nature au coeur de nos villes.

Comment se porte le marché du jardin de particuliers ?

Les situations ne sont pas homogènes, selon qu'on se trouve à la ville ou à la campagne. L'argent est rare. Les acteurs économiques vont à l'essentiel et les économies restent à l'ordre du jour. En milieu rural, les consommateurs sont tournés vers des jardins naturels demandant peu de conception et d'entretien, et ils s'interrogent sur le « comment vivre dehors », investissent dans des terrasses et des piscines, mais peu dans le végétal. En milieu urbain et périurbain, à l'inverse, le végétal est un besoin fondamental et représente un marché d'autant plus actif que les terrains sont rares et chers. Les entreprises qui sont sur ce créneau ont aujourd'hui du travail, les propriétaires fonciers n'hésitent pas à investir, car il y a une véritable plus-value !

Le prochain Salon du végétal, à Nantes (44), aura pour thème Le végétal facile. Qu'est-ce que cela vous inspire ?

Cela me fait bondir. Voilà un débat provocateur qui montre bien la complexité de notre époque. Le végétal facile est une vraie contradiction ! Tout est fait pour prôner la vie facile, la plante toujours en fleurs, sans entretien, sans aucun besoin. Le grand public voit les choses un peu comme ça, mais les jardiniers savent que c'est par le travail de la terre que les plantes nous récompenseront, que les efforts se voient, que le temps long est important. Quand on plante, il faut imaginer l'avenir, savoir que le végétal est vivant ; il va grandir, arriver à maturité puis décroître. Dans un jardin, il faut toujours l'anticiper... Cela demande un véritable investissement personnel, en temps et en moyens ; et le temps est devenu un bien rare. Cela montre d'ailleurs l'importance du rôle des élus dans nos villes, nos collectivités. Nos concitoyens attendent d'eux qu'ils prennent en charge ce besoin de nature en fleurissant nos habitats, via les parcs et espaces verts. Que cela devienne un argument électoral est une bonne chose.

Quelles sont pour vous les tendances actuelles concernant les végétaux ?

La notion de végétal indigène est primordiale. Plantons des sujets locaux, élevés localement en circuit court, comme on dit. Lorsqu'on explique à nos clients que planter un olivier au nord de la Loire, ou semer une pelouse dans le sud saharien n'a pas de sens, ils le comprennent. Notre rôle doit être de leur expliquer le « bien planter », car ce sont des décisions importantes qui vont modeler notre paysage. Quand je vois l'initiative des pépinières d'Île-de-France qui se sont regroupées pour proposer des sujets locaux, je me dis que tout n'est pas perdu pour le marché du végétal en France et que nous avons les moyens de relever le défi de la production française régionale.

Comment imaginez-vous l'avenir de Jardins, Jardin ?

Nous souhaitons nous ouvrir à l'international. Beaucoup de professionnels de pays comme la Belgique ou l'Angleterre ont des choses intéressantes à nous montrer et ils viennent déjà à Jardins, jardin. Cet échange favorise le développement du jardin urbain. Les expériences menées à New-York, Singapour, sont à ce point de vue passionnantes et c'est fondamental, puisque l'on sait que 80 % d'entre nous seront des urbains à un horizon proche. C'est donc l'avenir de notre métier...

Propos recueillis par Pascal Fayolle

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