Chloé Morgue, gérante de l’EARL Les Serres de Chloé, à Manthes (26). Membre de Vivaplante. « C’est le producteurqui prend les plus gros risques ! »
Dans le cadre de notre dernier indicateur Médioflor/Le Lien horticole de la Toussaint (voir page 44), la pépiniériste évoque le commerce compliqué des chrysanthèmes... mais aussi de la gamme horticole dans son ensemble !
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Le Lien horticole : Quand prenez-vous la décision du choix des quantités et variétés pour l’année suivante ?
Chloé Morgue : Nous nous réunissons fin novembre avec le groupe Vivaplante pour parler de la saison et prendre les décisions pour l’année suivante (tarifs, quantités…).
LLH : Quand devez-vous commander les boutures ?
C.M. : Nous commandons nos plants racinés entre fin janvier et début février, avec des mises en culture en fonction du ressenti commercial, de notre intuition de producteurs et de l’historique des ventes N-1. Autant vous dire que c’est bien nous qui prenons les risques, nous n’avons aucune réservation à cette date !
LLH : Quelles sont les périodes de rempotage des boutures ?
C.M. : Nous rempotons le jeune plant raciné à partir de la semaine 23, jusqu’à la 26, selon les contenants.
LLH : Quand installez-vous les pots en plein air ou sous abri ?
C.M. : Tous nos pots sont sous abri, car les températures dans notre secteur peuvent atteindre 50 °C au sol en période de canicule. Nous brumisons nos cultures dès le rempotage jusqu’à la fin août, selon les températures. Depuis quelques années, il peut faire encore très chaud en septembre, ce qui ne calme pas les attaques de ravageurs, punaises, pucerons, thrips (grosse pression), duponchelias, chenilles et araignée rouge. Nous sommes gâtés... La culture est longue donc il faut être en permanence vigilants sur ces attaques. Sur les multifleurs, nous intervenons peu entre le 1er juillet, lors du distançage, et le 1er septembre, date de la pose des filets. Le risque de passer à côté d’attaques est accentué.
LLH : Quelles sont les opérations les plus coûteuses en main- d’œuvre / rempotage, placement, distançage, pincement-éboutonnage, arrosage, récolte ?
C.M. : Les opérations les plus coûteuses en main-d’œuvre sont le distançage et la pose de filet pour les chrysanthèmes multifleurs. Pour les traditionnels, c’est l’éboutonnage, bien sûr, du 10 septembre au 10 octobre. Ce sont deux à trois personnes à temps plein pour presque 4 000 plantes.
LLH : Quelles sont les raisons qui vous poussent encore aujourd’hui à produire des chrysanthèmes ?
C.M. : Le chrysanthème est une culture qui n’est pas forcément rentable mais qui occupe les surfaces et le personnel présent à l’année dans l’entreprise. Mais c’est une culture longue de cinq mois, avec une pression phytosanitaire haute à cette période, une fertilisation compliquée en raison des fortes chaleurs et une attente lourde dans les derniers jours avant la date butoir. Mais si nous n’avons pas les références disponibles, nous ne sommes pas visibles aux MAF de jardinerie car, la dernière quinzaine d’octobre, cette plante tient encore une place importante.
LLH : La partie commerciale reste difficile...
C.M. : Nos clients ne prennent plus aucun risque pour ces ventes et ne font plus aucune promotion sur les chrysanthèmes dans les grandes enseignes ou, s’ils en font, c’est avec du prix cassé. Ils ne mettent pas du tout en valeur le produit, voire le dévalorisent. Il est donc très difficile de le vendre au bon prix. C’est ma deuxième année de reprise de l’entreprise de mon père, Patrick Morgue. Je suis de nature très optimiste car si on ne l’est pas dans ce métier, on n’avance pas loin ! Je pense que le marché mute, que fleurir n’est pas la priorité des consommateurs mais pourtant beaucoup aiment avoir un peu de couleur chez eux. Ce qui pourrait relancer la profession, ce serait un concours de fleurissement ou autre à une heure de grande écoute sur M6 ou TF1, comme on a relancé la pâtisserie ou la déco. Ça ne tient pas à grand-chose, on ne fera plus de grands massifs comme à une certaine époque, mais une belle terrasse fleurie peut donner beaucoup de bonheur à ses occupants !
Propos recueilis par Brand Wagenaar
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