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L’huile de colza, acaricide et insecticide

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Spectre d’efficacité et cultures envisagées

Propriétés : ce produit liquide d’origine naturelle est extrait de graines de colza. La formulation la plus souvent utilisée pour un usage phytosanitaire acaricide, insecticide ou adjuvant insecticide est le concentré émulsionnable (EC) ou le liquide huileux sans dilution (AL), appliqué en pulvérisation. Certaines huiles de colza sont estérifiées.

Mode d’action et cibles : l’huile de colza forme une pellicule qui enrobe certains arthropodes ravageurs et les élimine par asphyxie. Les plus vulnérables sont les insectes­ piqueurs-suceurs de sève (hémiptères) et les acariens phytophages (tétranyques, phytoptes, tarsonèmes), en pa­rticulier les œufs et les jeunes larves. Grâce à son action de contact, cette huile détruit divers ravageurs au stade hivernant sur les arbres et arbustes d’ornement, la vigne et les cultures fruitières. Elle est également capable d’agir par voie chimique, en interagissant avec les acides gras et les fonctions cellulaires de l’in­secte. En outre, elle peut avoir un effet répulsif, en décourageant la ponte et la prise de nourriture, par exemple chez le psylle du poirier. Certains acaricides et insec­ticides autorisés sur les plantes d’ornement associent l’huile de colza à des py­réthrines ou pyrèthres naturels de façon à renforcer l’effet de choc. Mais, dans ce cas, des arthropodes auxiliaires peuvent être intoxiqués, à l’exemple de Typhlodromus pyri (acarien de la famille des Phytoséiides, prédateur de tétranyques jaunes ou rouges et de phytoptes) et d’Aphidius rhopalosiphi (hyménoptère endoparasitoïde primaire de pucerons des graminées sauvages et cultivées). On note par ailleurs avec intérêt le faible risque de développement de résistance des bioagresseurs à l’huile de colza, compte tenu de son mode d’action essentiellement physique.

Principales cultures concernées : en productions horticoles ornementales, ainsi que dans les jardins et espaces verts, l’huile­ de colza est utilisable en traitement des parties aériennes sur les arbres et arbustes d’ornement (acariens, cochenilles, psylles, pucerons, phytoptes), les rosiers (acariens, aleurodes, cochenilles, pucerons, thrips), les cultures florales et plantes vertes (acariens, aleurodes, cicadelles, cochenilles, pucerons, thrips), de même que les plantes d’intérieur et de balcon (acariens, aleurodes, cochenilles, pucerons, thrips).

Essais d’efficacité : les expérimentations phytosanitaires réalisées avant la mise sur le marché de produits commerciaux à base d’huile de colza ou en posthomologation, dans le cadre de la mise au point d’une méthode de lutte, fournissent des informations intéressantes sur les niveaux d’efficacité constatés. Dans la plupart des situations très infestées, le traitement est renouvelé sept à quatorze jours après la première application.

r Acariens : en France, des essais de lutte contre les tétranyques du rosier en pé­riode de végétation, réalisés avec de l’huile­ de colza à raison de deux traitements successifs, ont révélé un bon effet de choc, supérieur à ceux obtenus après l’application de pyréthrinoïdes de syn­thèse. En Allemagne, une vingtaine d’essais ont mis en évidence une bonne efficacité de l’huile­ de colza, trois jours après application, pour lutter contre les acariens nui­sibles. Des essais de traitement d’hiver réalisés­ en France pendant le repos végétatif des plantes contre les œufs d’hiver d’acariens rouges (Panonychus ulmi) ont montré une efficacité autour de 70 %.

r Aleurodes : les essais réalisés en France et en Allemagne en cultures florales sous serre, avec des préparations à base d’huile de colza appliquées deux fois à dix jours d’intervalle en moyenne, ont montré un faible effet de choc après la première application. Mais, après le second traitement, un résultat similaire ou supérieur à celui des produits de référence agissant sur les formes mobiles (larves ou adultes) a été constaté. En plein champ, le contrôle a été noté « moyen » à « très bon ».

r Cochenilles : divers essais ont mis en évidence­ une bonne efficacité de l’huile de colza contre les cochenilles des cultures­ florales et des végétaux ligneux d’ornement. Mais, dans certains cas, les résultats sont contradictoires, certains exprimant une faible maîtrise du ravageur et d’autres un très bon résultat. Rappelons que les meilleures efficacités contre­ les cochenilles (à carapace, à bouclier, à corps mou) s’obtiennent au stade lar­vaire, dit « baladeur », lorsque ces insectes ne sont pas encore enduits de miellat­, ni protégés par une couche ci­reuse ou farineuse sur leur corps.

Parmi les meilleures efficacités, citons la cochenille pulvinaire de l’hortensia (Eupulvinaria hydrangeae), la cochenille à bouclier du fusain (Unaspis euonymi), la cochenille lécanine du tilleul (Euleca­nium tiliae).

r Pucerons : plusieurs expérimentations réalisées en France contre divers pucerons des cultures florales, tels que celui du rosier Macrosiphum rosae, ont montré à la dose homologuée une efficacité moyenne entre trois et sept jours après la première application et un très bon ré­sultat un à trois jours après la seconde pulvérisation­. Dans certains cas, après le deuxième traitement, le contrôle des pucerons avec l’huile de colza s’est révélé inférieur­ à celui des préparations de ré­férence contenant des pyréthrines ou des pyréthrinoïdes de synthèse, mais il est res­té­­ acceptable (80-90 % d’efficacité). Il a même parfois surpassé les produits de référence pour certaines espèces de pu­cerons. D’autres essais ont mis en évi­dence l’intérêt des traitements d’hiver avec l’huile de colza contre les formes hivernantes­ des pucerons, de façon à réduire­ le potentiel d’infestation en période végétative­.

Risques de phytotoxicité : les essais de sélectivité­ réalisés sur différentes es­pèces végétales (arbres et arbustes d’ornement, rosiers, pommiers, cultures florales ou légumières) n’ont entraîné aucune phytotoxicité sur de nombreuses espèces. Néanmoins­, des altérations de tissus ont pu être observées sur certaines espèces ou variétés, notamment des rosiers (impact léger et passager), des plantes­ fleuries d’extérieur (après deux traitements), ainsi que quelques plantes vertes et arbustes d’ornement. Sur une majorité de végétaux testés, l’huile de colza apparaît sélective si elle est utilisée suivant les recommandations­ indiquées sur l’étiquette :

proscrire toute intervention par chaleur élevée ou en cas de fort ensoleillement prévu dans la journée. Si nécessaire, ombrager les plantes après la pulvérisation ;

– ne pas traiter les végétaux sensibles tels que les plantes à fleurs ou feuillages délicats : Hypoestes phyllostachya, fou­gères, hortensias, bégonias, misères, coléus, poinsettia, saintpaulia, orchidées, cactées, plantes grasses, yucca, Prunus padus­ ‘Colorata’…

Toxicologie : en principe, l’huile de colza est sans risque pour la santé de l’utili­sateur. Il est recommandé de ne pas l’appliquer­ en présence d’insectes pollinisateurs et/ou d’auxiliaires (abeilles, bour­dons, coccinelles...), c’est-à-dire ap­pliquer­ de préférence en début de ma­tinée­ ou en fin de soirée. Afin de protéger les organismes aquatiques, proscrire tout traitement à moins de cinq mètres­ d’un point d’eau.

Jérôme Jullien

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