En dehors du plastique, les gammes s’affirment
Les produits « historiques » croient en leur avenir, et de nombreuses autres solutions arrivent sur le marché. Reste à trier en fonction d’impératifs techniques et économiques.
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des solutions existent, pour tous ceux que le plastique rebute. Bien sûr, elles ne sont pas parfaites, sinon, au vu des pressions environnementales émanant de l’opinion publique, nul doute qu’elles auraient vite pris une place plus importante dans le marché. On manque également souvent de recul sur les procédés les plus récemment lancés, mais une offre est déjà là, parfois depuis longtemps…
Les pots dégradables de Jiffy sont commercialisés depuis des années. Composés d’un mélange pour moitié de tourbe et de fibre de bois, voire de fibre de coco uniquement pour certaines références, ils permettent une plantation directe avec le pot.
Même constat pour les pots de Fertil, constitués aujourd’hui uniquement de fibre de bois (la marque est désormais sous contrôle de Florentaise, un spécialiste de la matière). Ils sont utilisables avec le label AB et viennent d’obtenir la certification allemande TÜV, prouvant de manière indépendante que ces contenants se révèlent biodégradables dans les sols.
Une offre qui s’étoffe rapidement
Mais la forte demande des consommateurs ou des distributeurs a stimulé les fournisseurs. Ils peuvent être des acteurs du domaine des plastiques, comme Soparco, qui propose une gamme, Bio-Fibra, à base de fibre de bois, liant végétal et PLA. Elle est biocompostable en milieu industriel, se dégrade plus lentement dans un compost domestique chez le jardinier, à condition de broyer les produits. Modiform conçoit une gamme Eco-Expert, réalisée à partir de carton. Une nouvelle génération de pots fabriqués aux Pays-Bas, et plus en Chine, fins et résistants, est annoncée pour 2020.
Un fournisseur allemand, Pottburri, a récemment lancé un pot réalisé à partir de coques de tournesol. Ce produit est soumis à des tests par Astredhor dans l’est de la France, comme d’autres innovations du marché, par exemple le Netpot de Bachmann, récompensé lors du concours de l’innovation du dernier Sival. Il s’agit d’un filet thermoformé en pot de culture, composé de polypropylène, donc un plastique. Mais celui-ci se dégrade, selon le fournisseur, en carbone dans le compost, même domestique. L’incorporation dans la matière d’une molécule le décomposerait en huit mois.
On peut citer enfin, dans cette liste non exhaustive, la démarche de l’Unep (Union nationale des entrepreneurs du paysage) Méditerranée, qui travaille avec l’Ademe et un consultant spécialisé dans l’économie circulaire, Emmanuel Delannoy. Objectif : travailler à la mise au point d’une toile en PLA pour remplacer les conteneurs dans lesquels sont livrées les plantes sur les chantiers (voir la revue Matériel et paysage n° 149 d’août-septembre 2019, p. 22).
Des limites connues
Beaucoup de ces produits sont encore méconnus. Ceux qui sont en test dans les stations Astredhor feront l’objet d’observations plus complètes. Mais, globalement, on sait qu’ils ne répondent pas aujourd’hui à l’ensemble des critères de choix de la filière horticole quant à ses pots, à savoir un beau contenant vendeur dans le point de vente, propre, bon marché et, cerise sur le gâteau, facile à mécaniser en culture.
Le premier écueil rencontré est souvent celui du prix. La plupart des alternatives au plastique sont deux à quatre fois plus chères, voire davantage, la palme semblant revenir au Pottburri, annoncé à 29 centimes départ usine pour un pot de 12… Les autres griefs sont la faible durabilité de ces contenants (puisqu’ils doivent se dégrader), qui les réserve à des cultures courtes et en général à des litrages limités, souvent trois au maximum. Leur adaptation aux machines à rempoter a souvent aussi été montrée du doigt, d’autant que si certaines gammes passent bien dans les dépileurs quand elles sont neuves, quand elles vieillissent et s’humidifient, le dépilage devient nettement plus chaotique.
Enfin, les consommateurs, malgré leur demande de produits plus respectueux de l’environnement, sont néanmoins attachés à un pot semblant « propre », que ceux du type « pots à planter », par exemple, ne donnent plus une fois mis en culture et arrosés. Ces clients sont aussi en recherche d’informations apposées sur les produits qu’ils achètent qu’un pot en fibre de bois ou en matière recyclée ne peut pas vraiment accueillir.
Des perspectives intéressantes, néanmoins
Les fournisseurs sentent toutefois qu’ils ont avec ce genre de produits des marges de progression intéressantes, même s’ils regrettent parfois de n’être pas prophètes en leur pays : « Nous exportons 60 % de notre production de pots, explique Sandra Villette, responsable marketing de Fertil, vers des pays plus sensibles que la France aux questions environnementales : par exemple l’Allemagne, les États-Unis ou l’Australie. » De son côté, Michel Miribel, le directeur commercial France de Jiffy, constate que « les ventes dans l’Hexagone progressent, les villes en particulier sont intéressées. Elles nous ont beaucoup interrogés lors de la dernière édition de Paysalia ».
Pour les prix, certains fournisseurs annoncent qu’ils baisseront avec le temps. « Les pots de la gamme Eco-Expert sont près de quatre fois plus chers que les contenants classiques, explique Xavier Renaud, chef des ventes Modiform pour la France. Mais les coûts vont baisser avec l’automatisation de la production. »
Quant à l’adaptation à la mécanisation, elle a réalisé de gros progrès, même pour les pots à planter en fibre de bois ou en tourbe, surtout avec les récentes machines à rempoter.
Le rôle majeur des professionnels
Les choses évoluent rapidement du côté des fournisseurs, qui mettent sur le marché de plus en plus de nouveaux produits, qui devront être testés, améliorés, etc., mais aussi du côté de la filière. De nombreuses enseignes sont prêtes à tester auprès de leur clientèle, pour le prochain printemps, des plantes en pots biodégradables. Même la grande distribution s’y prépare, avec des produits qui ne seront évidemment pas vendus à un prix très bas, comme c’est souvent le cas.
Un changement de paradigme ? À voir. « En France, les pots biodégradables en fin de culture et mouillés sont jugés sales, poursuit Sandra Villette. Mais ce regard évolue, on sent que les gens raisonnent différemment. » Un travail de marketing efficace, avec des stickers, des collerettes ou encore des manchons – parfois en PLA – a été effectué dans l’objectif de mieux promouvoir les produits.
Mais c’est du côté du marché professionnel que les acteurs du secteur se tournent beaucoup pour accompagner le développement de leurs produits. En effet, si les pots biodégradables représentent un surcoût à la production, « au moment de la plantation, pour l’entreprise du paysage, ils sont une économie, car il n’y a plus de pot à enlever », se réjouit Michel Miribel.
Pascal Fayolle
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