Un printemps presque rescapé de Covid-19 !
« Les clients sont fidèles malgré tout, cela fait plaisir ! » C’est sur cette note optimiste que se conclut le cycle de trois enquêtes mené sur www.lienhorticole.fr auprès des internautes durant et après le confinement. Bien sûr, un bilan à nuancer* !
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Ce sont 41 professionnels qui ont répondu à la troisième enquête en ligne du Lien horticole du mercredi 3 juin, relancée dans la newsletter du vendredi 5 juin. 50 % de producteurs, 30 % de producteurs-distributeurs ont pris le temps de faire état de leur situation et de leurs espoirs… Tout juste avant la fête des Mères, ces premiers résultats montraient déjà une tendance très positive et – assez majoritairement – indiquaient une relative confiance.
Une saison pas si mauvaise pour 65,8 % des enquêtés
Pendant la stupeur et le désespoir de mi-mars (dus à l’annonce du confinement), suivis des inquiétudes les plus vives et de la colère d’avril (en raison du maintien de l’interdiction de la vente au détail en magasin, hors grandes surfaces et jardineries, et chez les fleuristes), la plupart des professionnels craignaient de ne pas sortir indemnes du printemps.
Dans l’édition de juin du Lien horticole, nous indiquions (à la suite de notre deuxième enquête**) que « véritablement rincés après deux mois épuisants de confinement stratégique pour leur survie, floriculteurs et pépiniéristes avaient encore un peu d’espoir de sauver leur saison. Les atouts de ceux qui ont mieux réussi dans la tempête : réactivité, cohésion d’équipe, entraide. Et l’espoir d’une vraie reconnaissance – à long terme – des plantes locales ».
Heureusement que la fête des Mères arrivait le premier week-end de juin. Car le 11 mai, date du déconfinement, le moral était au plus bas ou, au mieux, s’accrochait à une lueur d’espoir sur la consommation de plantes de jardin par des amateurs tout juste « libérés ».
À la question « Après quelques semaines de relance de l’activité dans les points de vente, vous semble-t-il qu’une dynamique soit enclenchée qui permette d’envisager de sauver la saison de printemps ? » :
- 65,8 % des répondants acquiescent. Ils estiment même que la saison ne sera, finalement, pas si mauvaise ;
- 24,4 % disent que la dynamique est enclenchée mais qu’il était déjà tard pour sauver totalement la saison ;
- seuls 9,8 % regrettent que les consommateurs aient ralenti leur activité de jardinage, qui n’a été qu’un feu de paille dû au confinement.
Puis à la question « Quel est aujourd’hui votre niveau d’activité comparé à une année “normale” ? », sur 39 réponses :
- 71,8 % ont déjà réalisé plus de 75 % du chiffre d’affaires (CA) ;
- 12,8 % ont réalisé moins de 25 % du CA ;
- 10,3 % ont réalisé 50 à 75 % du CA habituel.
Un producteur reflète bien la situation : « Nous avons eu une grosse peur à la mi-mars quand tout s’est arrêté, une légère reprise en avril et un très bon mois de mai... soit une baisse du CA de 8 % à fin mai par rapport à 2019. Ce n’est pas catastrophique, tout compte fait... »
Mévente de géraniums, manque de plants potagers
À la troisième question : « Depuis plusieurs saisons, les ventes de juin et juillet ont tendance à monter. Quels signes percevez-vous pour les prochaines semaines ? », il a été apparemment plus facile pour les répondants, à ce stade, d’établir des constats sur la situation en cours que de faire des prévisions.
Ainsi, pour les exploitants où « tout se joue en mars-avril-mai et plus grand-chose en été, dès la fin mai, la baisse de fréquentation a été visible, cette année aussi ». Pour certains, « ce n’est pas mieux qu’une année normale », « ce qui est perdu est perdu ! » ou encore « ce n’est pas fini ! ».
Un des témoins (dont l’activité n’est pas identifiée, dommage) livre une appréciation de filière complète : « Un ralentissement assez important se fait sentir depuis la fin de la semaine dernière (fin mai). La demande en potées fleuries reste en dessous de celle de l’année dernière. Une mévente des plants de géraniums se fait lourdement sentir (- 60 %). La demande en plants de légumes est toujours aussi présente, mais difficile à satisfaire. Le désir d’écouler le reste de la production n’engage pas la volonté de faire rentrer des plantes estivales. La fête des Mères s’annonce très médiocre. Les commandes pour les communes sont en chute libre par rapport à l’année dernière. »
Déjà mentionnée dans nombre d’articles, la tendance des plants potagers « a été supérieure à nos attentes pour avril et mai ». Leur poids dans la dynamique des ventes se confirme et « le chiffre perdu au mois de mars est déjà rattrapé fin mai ».
Pour un producteur, à l’avis nuancé : « À partir de mi-avril, les ventes ont été très bonnes. Elles ont duré, avec un volume plus important qu’à l’habitude jusqu’aux “saints de glace”. Depuis, c’est revenu à la normale, avec un manque énorme de diversité à proposer aux clients fidèles et habitués de fin de saison. La fête des Mères ne sera pas une grande réussite car trop de produits font défaut. Mais, dans l’ensemble, le CA doit être bien meilleur. »
Une envie de jardin, mais dépendante de la météo
Les avis les plus positifs pressentent que « les consommateurs vont désormais bouger. Depuis le début de la semaine, on retrouve des ventes normales pour la saison » ou : « Les clients veulent se faire plaisir. Beaucoup ne partiront pas en vacances. Les ventes de beaux sujets se portent très bien. »
Un distributeur constate : « Avec la fête des Mères en juin, contrairement aux années précédentes, le mois semble s’annoncer plutôt bon et peut même laisser espérer des ventes “dopées”. Les clients manifestent toujours leur envie d’embellir leur jardin. » Autre constat souvent cité : « Si nous avons encore assez de marchandises, l’été sera positif ! » car « la fréquentation reste soutenue ». Et d’espérer : « Nous aurons peut-être gagné des nouveaux clients. Encore faut-il que la mise en place du jardin perdure ! »
On peut dire que, globalement, depuis mi-mai, la météo a été plus fraîche et humide que pendant le confinement – ironiquement plutôt beau et chaud – sans être vraiment mauvaise. Plusieurs répondants (sans indiquer leur région) constataient une « météo plutôt favorable pour le moment », mais redoutent déjà « les premières chaleurs de juillet ou des canicules qui risquent de stopper les ventes ». Le spectre des premiers « arrêtés sécheresse » pointant déjà ici et là inquiètent. Les achats des clients restent bien dépendants de la météo car, là où « le temps est déjà sec, les ventes se tassent, depuis près d’une semaine. Celles de fin de printemps ne sont guère en évolution chez nous ». En fait, idéalement (mais y a-t-il une année avec une météo idéale partout, qui convienne à tout le monde ?) : « Il faut… ni trop froid, ni trop chaud ! » résume un témoin.
La saison où il fallait être réactif !
Dans les commentaires libres, les répondants reviennent sur l’urgence :
- « d’une aide comme dans nos pays voisins » ou « sans une aide directe à hauteur de 70 à 80 % du chiffre perdu, quand les reports de charges vont tomber, un certain nombre d’entreprises devront stopper leur activité. Pourquoi ne serions-nous pas aidés comme nos collègues de l’UE*** ? » ;
- « de baisser nos charges sociales afin de rester compétitifs, et surtout revaloriser la filière, qui a beaucoup souffert. En France, nous n’avons plus de fonds propres pour pouvoir lutter à armes égales contre la concurrence étrangère ! »
Beaucoup pensent que nos voisins nous ont inondés mais un producteur relate, chez lui : « Surprenant pour la région des Hauts-de-France : la frontière belge étant fermée, les ventes ont très bien fonctionné et même battu des records ! La baisse de chiffre de 70 % pour ces jardineries belges a fait énormément de bien pour notre secteur à nous ! »
Une autre réponse projette des inquiétudes vives, car reste la bien difficile question du comportement futur des acheteurs : « Nous nous posons beaucoup de questions sur le pouvoir d’achat des Français et l’impact commercial qu’une hausse galopante du chômage pourrait engendrer sur nos magasins et le commerce en général. Une interrogation se pose sur le fonctionnement du commerce en juillet-août. Quant à la rentrée de septembre, nous espérons que les Français n’auront pas trop d’arbitrages à faire ! Mais si une seconde vague de Covid-19 réapparaît à l’automne, ce sera une catastrophe. »
Une certitude : ce printemps « est une saison où il fallait être réactif dès l’arrivée des dérogations pour vendre fin avril/début mai », ce témoin ajoutant : « car les consommateurs sont des girouettes tournant aussi vite que le vent ! Il leur faut tout tout de suite ! Après, et même pas longtemps après, c’est trop tard ! »
« Merci pour toutes ces enquêtes de tout le monde, mais il va falloir qu’elles se coordonnent et se complètent afin de donner des résultats concrets ! » conclut un ou une internaute.
Que les lecteurs qui ont pris le temps de répondre à la troisième enquête du site du Lien horticole soient remerciés, alors que la période est bien chargée pour eux !
La rédaction du Lien horticole*Ces résultats sont issus d’une enquête par voie électronique (site Web et newsletter), donc ne donnant pas un échantillon représentatif national.
**Deuxième enquête producteurs sur https://www.lienhorticole.fr/actualites/enquete-internautes-les-producteurs-temoignent-1,13,2900219873.html et « Productions horticoles : la vente, les chantiers… et vite ! », dans le dossier spécial du Lien horticole n° 1096 de juin.
Première enquête sur https://www.lienhorticole.fr/en-direct/face-au-covid-19-que-faire-des-cultures-et-des-emplois-1,13,1160984029.html et article « Face au Covid-19, que faire des cultures et des emplois ? », dans Le Lien horticole n° 1095 de mai.
***[NDLR : cette enquête a été réalisée avant https://tinyurl.com/yadk2qoye (lire en page 31 et « Crise : 25 millions d’euros et des exonérations de charges pour l’horticulture » sur https://tinyurl.com/yadk2qoy), mais les modalités pour obtenir ces aides ne sont pas encore connues].
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