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Face au Covid-19 : que faire des cultures et des emplois ?

Résultats d’une enquête du Lien horticole auprès de ses lecteurs et des internautes sur leur situation en mars, dès les premiers jours du confinement.

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Avec des conditions de travail minimalistes dans un contexte où il est fort déconseillé de se déplacer, Le Lien horticole a sollicité les professionnels de l’horticulture au travers d’une enquête. Dans les 48 heures qui ont suivi la mise en ligne du questionnaire, 80 témoins ont répondu. Synthèse des premières réactions, centrées sur l’activité de production et la responsabilité d’employeur.

Ceux qui ont répondu se soucient d’emblée à la fois des plantes (fleurs coupées, productions prêtes à vendre pour Pâques, la fête des Mères et les plantations de printemps) et du devenir de leurs employés. La survie de l’entreprise vient ensuite, avant leur situation personnelle.

Dans quelle situation globale vous trouvez-vous ?

À cette question, les plus démunis, les plus défaitistes aussi, ont tenté d’utiliser rapidement le chômage partiel. « Notre entreprise est fermée à la vente au détail depuis mardi 17 mars. Pas de chiffre d’affaires, une présence du personnel jusqu’à aujourd’hui. Les cultures de bisannuelles sont passées au broyeur après constat d’huissier. Que peut-on en espérer ? » Un autre poursuit : « Nous avons dû fermer notre point fleuriste et la serre de vente. De plus, nous avons mis nos salariés au chômage partiel. » Ou encore  : « Personnel au chômage forcé depuis lundi 16 mars à midi. Compte créé sur le site “activité partielle” mais non activé à ce jour, vendredi 20 mars, alors que cela devait être fait sous 48 heures... Impossible de contacter la cellule de crise de la Dirrecte, que ce soit par téléphone ou par e-mail. Nous avons bloqué tous les paiements à nos fournisseurs et continuons à venir travailler pour entretenir les cultures dans l’espoir d’une éventuelle reprise. » Car la plupart ont de nombreuses tâches à assumer pour poursuivre la production, même en période de mévente. Et ont donc besoin de leur personnel.

« Je suis producteur de plantes fleuries pour le marché couvert, essentiellement dans une coopérative. Plus aucun produit ne sort des serres. Celles-ci sont pleines et les séries suivantes pour le rempotage affluent. Je ne peux pas mettre mes salariés au chômage. J’ai besoin d’eux pour jeter les plantes dépassées, pour desserrer ce que je vais peut-être vendre plus tard. »

« Je suis horticulteur-pépiniériste. Nous sommes fermés à la vente directe­ et, parfois, même les employés municipaux n’ont pas l’au­torisation de venir chercher leurs commandes ! Nous travaillons à huis-clos avec nos deux salariés et nous continuons le planning de rempotage dans une incertitude totale pour la saison. Je suis assez pessimiste sur le déroulement du printemps. À mon avis, nous allons être bloqués (à juste titre) et faire 0 euro de chiffre d’affaires jusqu’en juin. » « Les serres sont pleines à 80 % et nous devons faire les derniers rempotages pour juin. Nous avons jeté la fin des bisannuelles et nous commençons à jeter les premières séries d’annuelles qui devaient être vendues ces deux semaines à suivre aux magasins du sud de la France. Nous allons retailler les espèces qui le permettent, mais nous ne savons pas si cela vaut le coup. Nous avons tout ouvert pour ralentir la pousse et nanifié les séries que l’on espère pouvoir vendre prochainement. Nous ne savons pas la date de reprise, donc dur de tout arrêter pour perdre la totalité du chiffre ou continuer avec une activité ralentie pour être prêts quand l’activité reprendra. Nous attendons de voir et restons plus ou moins optimistes selon les moments de la journée ! »

« Dans tous les cas, si l’État ne nous aide pas, je dépose le bilan des deux sociétés : mon épouse et moi avons 53 ans, et pas le courage ou la force de continuer. Nous avons investi, depuis 2016 jusqu’à aujourd’hui, plus de 500 000 €. »

Quels problèmes majeurs à résoudre dans l’urgence ?

À cette question, les producteurs estiment­ avoir « la double peine de devoir­ garder les salariés et de jeter ce qui nous a coûté le plus cher à produire­ », avec « aucune trésorerie pour maintenir et payer nos salariés » et la seule solution de mettre en place le chômage partiel reviennent très souvent.

Parfois, les employés préfèrent ne plus venir travailler. Il faut dans ce cas « pallier les manques de main- d’œuvre introuvables pour la production ». Pour certains de ceux qui ont témoigné, « la » question est aussi : « sauver nos biens personnels ».

Premières solutions trouvées ou tentées ?

« Séparer le personnel par équipes de deux, avec une distance de deux mètres » ou « veiller à la rotation journalière de trois personnes (sur quatorze), pour un entretien et un nettoyage des plantes. De façon à éviter la promiscuité ».

Une autre entreprise a recours au chômage partiel pour une fraction des salariés, tandis que du personnel travaille à mi-temps pour l’entretien et la mise en place d’autres cultures... et pour détruire les plants « que l’on ne vend plus ».

Pour plusieurs entreprises, l’agacement prime car « une demande de chômage partiel en ligne a été réalisée », mais sans réponse du gouvernement. Il faut « poursuivre l’entretien des cultures en cours, mais sans espoir de vente, tout en y croyant quand même, afin d’éponger un ma­ximum de dettes. Nos biens personnels étant engagés dans les emprunts avec les banques, nous avons peur de tout perdre ».

Si la mise en chômage partiel a été choisie « afin de limiter la casse, en ce qui concerne mes revenus personnels, pour l’instant, je préfère ne pas y penser ».

Odile Maillard et la rédaction

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