Véhicules du paysage Faibles émissions, fortes tensions dans les ZFE-m

La création des ZFE va accélérer le développement de véhicules électriques en ville, même si certaines entreprises n'ont pas attendu cette législation. Photo prise à Besançon (25) en 2015...
La création des ZFE va accélérer le développement de véhicules électriques en ville, même si certaines entreprises n'ont pas attendu cette législation. Photo prise à Besançon (25) en 2015... ©P. Fayolle

En rapide développement, les zones à faibles émissions inquiètent le monde du paysage, roulant essentiellement au diesel. La profession se mobilise pour obtenir des aménagements mais commence aussi à s’adapter…

Les « zones à faibles émissions mobilité » (ZFE-m) visent à réduire la pollution de l’air dans les villes. Dans un avenir proche, l’accès des véhicules aux centres-villes des agglomérations de plus de 150 000 habitants sera fortement réglementé, ce qui ne sera pas sans poser de gros problèmes pour les entreprises résidant ou travaillant dans ces secteurs. Ce sujet était à l’ordre du jour d’un webinaire ÉchosPaysage Auvergne Rhône-Alpes le 28 novembre dernier.

Sur plus de 30 000 entreprises du paysage en France, on estime que 90 % de la flotte de véhicules fonctionne au diesel. Ceux-ci seront, à l’horizon 2026-2030, bannis des centres-villes. C’est pourquoi l’Unep, Union nationale des entreprises du paysage, s’est emparée du sujet pour, d’une part, bien comprendre et expliquer la réglementation et, d’autre part, présenter aux entreprises des solutions techniques et économiques tenant compte des différentes aides publiques mises en place par l’État et les collectivités locales. En Île-de-France, un groupe de travail ZFE-m a été mis en place et quelques entreprises ont commencé leur transition.

Sortir du diesel

Bryan Bomy, chargé de mission en affaires publiques à l’Unep, a présenté le contexte réglementaire. Le dispositif ZFE-m est destiné à faire baisser les émissions de polluants dans les grandes agglomérations pour améliorer la qualité de l’air en agissant sur la flotte de véhicules : seuls les moins polluants seront autorisés à circuler à l’intérieur de ces zones. Il y a un cadre national, puis chaque collectivité est libre de fixer sa propre réglementation plus ou moins ambitieuse selon les territoires. « Il s’agit d’une forte ambition politique de la part de l’État dans un souci de santé publique et d’urgence environnementale », explique l’intervenant. La pollution de l’air, c’est 40 000 morts par an durant la période 2016-2019 en France, 400 000 à l’échelle européenne. Le dispositif ZFE-m répond à une directive européenne de 2008 qui contraint les États à agir.  Il y en a 230 en Europe.

En France, leur création s’est faite en deux temps. Tout d’abord la loi d’orientation des mobilités du 24 décembre 2019, pour laquelle onze métropoles étaient concernées. Puis, la loi dite climat et résilience du 22 août 2021 a élargi le dispositif à toutes les agglomérations de plus de 150 000 habitants, avec une interdiction progressive du diesel. Fin 2024, ces nouvelles agglomérations seront contraintes d’établir à leur tour une zone à faibles émissions. Parmi les plus ambitieuses actuellement, on peut citer Paris et Lyon. Pour cette dernière, on s’oriente vers une interdiction des véhicules dont la vignette est classée Crit’air 5 dès le 1er janvier 2023, et du Crit’air 4 en 2024, avec l’ambition d’une sortie du diesel à l’horizon 2026 dans un périmètre assez large qui englobe la banlieue proche.

Des aides nationales et locales

Pour atteindre ces objectifs, professionnels comme particuliers devront s’orienter vers des véhicules dits propres de type électriques, à biocarburant ou gaz naturel. Pour aider les entreprises, des dispositifs d’accompagnement financiers ont été instaurés. Les professionnels peuvent également avoir droit à des aides nationales et locales mises en place par les agglomérations. Il est important de souligner que les deux dispositifs sont cumulables. Ces aides concernent essentiellement l’achat ou la location longue durée 36 mois de véhicules électriques neufs ou d'occasion.

Pour l’achat d’un véhicule électrique neuf, en 2022, les aides nationales (bonus écologique) pouvaient s’élever jusqu’à 7 000 euros pour un véhicule utilitaire léger (le barème sera abaissé de 1 000 euros à partir du 1er janvier 2023) et 50 000 euros pour un poids lourd. En parallèle, les aides des diverses métropoles peuvent atteindre des montants assez importants. Cumulés avec celles de l’État, le total des aides peut ainsi atteindre jusqu’à 18 000 euros pour un véhicule utilitaire léger.

De nombreux critères entrent en compte pour l’attribution des aides (consulter les sites des métropoles pour connaître les différents dispositifs). Par exemple, dans l’agglomération lyonnaise, ces derniers sont plafonnés à six véhicules au maximum par entreprise  pour les professionnels situés dans le périmètre de la zone ZFE, trois pour ceux situés dans la métropole en dehors de la ZFE et un seul pour ceux situés dans quelques communautés de communes de l’est et du sud de Lyon. Ces deux dernières catégories doivent justifier d’un minimum de 20 % de chiffre d’affaires dans le périmètre de la ZFE.

Du lobbying mené par Valhor

Bryan Bomy souligne que, malgré ces aides, il existe peu de solutions à l’heure actuelle pour faire évoluer la flotte des entreprises de paysage. La création des ZFE demeure un problème majeur, comme pour tous les artisans situés dans les centres urbains. L’Unep pointe le fait que la filière n’aura pas la possibilité de s’adapter à court terme et une absence de solutions alternatives économiques et techniquement viables. Par exemple, un véhicule utilitaire léger électrique coûte a minima le double d’un véhicule thermique, avec souvent peu d’autonomie.

Étant donné l’obligation d’agir rapidement auprès des pouvoirs publics, des actions de lobbying ont été initiées avec Valhor pour évoquer avec diverses métropoles et les représentants de l’État les contraintes posées par la transition énergétique des diverses flottes, en l’occurrence la flotte paysage. L’objectif est aussi d’obtenir des dérogations, de renforcer les mesures d’accompagnement auprès des entreprises pour l’achat de véhicules propres, de demander une mutualisation des différentes aides par la création de guichets uniques. L’ambition politique doit s’adapter à l’état actuel de la flotte et des solutions alternatives possibles. Le dialogue se poursuit pour obtenir des résultats et proposer des solutions aux professionnels qui n’auraient pas la possibilité de s’adapter à l’horizon 2025, ce qui sera forcément le cas dans de nombreux territoires.

 Une forte volonté des entreprises de réduire leur empreinte carbone

Juliette Allenet, déléguée régionale Unep Île-de-France et animatrice du groupe de travail mobilité Île-de-France, souligne le manque de concertation avec l’agglomération du Grand Paris et la mairie de Paris qui n’ont pas forcément impliqué les acteurs économiques dans les décisions qui ont été prises. Aussi, les professionnels se sentent un peu pris de court et misent sur des dérogations, « mais on ne peut pas tout miser là-dessus, précise-t-elle. C’est pourquoi, dans la région, l’Unep a essayé, à travers un groupe de travail, de mettre des choses en place avec plusieurs entreprises qui avaient envie de s’impliquer. Ces dernières affichent une forte volonté de réduire leur empreinte carbone et montrer une image de l’entreprise plus vertueuse. La hausse du coût des énergies fossiles est aussi un critère essentiel. Au-delà de l’achat de véhicules propres ou d’un changement de carburant pour la flotte de véhicules existante, la démarche vise aussi à repenser et réorganiser les déplacements – quels type de véhicules pour quels chantiers (le vélo cargo électrique peuvent trouver sa place) ? – ou optimiser le chargement des véhicules pour limiter les kilomètres parcourus en ZFE. 

IMG_3863.JPGAnthony Guitton, chargé de projets « innovation, concours d’excellence et sols sportifs » à l’Unep, a travaillé sur les différentes solutions offertes pour faire évoluer la flotte de véhicules des entreprises du paysage dans le cadre de la transition écologique et pour s’adapter au cadre réglementaire des ZFE. Cette liste non exhaustive a été construite en lien avec les témoignages recueillis dans le cadre du groupe de travail Île-de-France et celui de la commission innovation de l’Unep.  

Chaque solution présente des points forts et des points faibles. À moyen ou long terme, le remplacement des véhicules thermiques par de l’électrique est sans conteste la solution idéale (qui n’est toutefois pas sans impact environnemental par rapport à la fabrication et au recyclage des batteries). À court terme, il faudra miser sur cette option pour quelques véhicules mais aussi adapter la flotte existante en choisissant des carburants moins polluants.

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