Lille (59) Promenade au fil de l’eau autour d’une ancienne filature reconvertie
Sur les rives de la Haute Deûle à Lille, un projet de renouvellement urbain a transformé un site industriel désaffecté. Dans une friche devenue écoquartier, l’eau est un élément fondateur et fédérateur.
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Evoquer la mémoire industrielle du site, tout en étant ouvert sur l’avenir : tel était l’enjeu pour cette ancienne filature lilloise, un temps complètement abandonnée, qui a été reconvertie en pôle d’excellence et d’innovation dédié au numérique. Le site accueille, sur 80 000 mètres carrés, diverses start-up, des laboratoires et des entreprises spécialisées dans les nouvelles technologies. L’Atelier de paysages Bruel Delmar a été choisi pour réaliser les aménagements extérieurs du quartier, qui accueille donc des sociétés, mais également des logements.
Un défi pour les paysagistes
« Il y a quatre points principaux dans ce projet. L’eau, comme élément d’identification ; faire du bâtiment EuraTechnologies la centralité et l’articulation ; développer un axe nord-sud de part et d’autre de la Deûle pour renouer les quartiers ; enfin, réaliser un travail de tissage vers le marais de Lomme, à l’ouest, afin de le désenclaver », explique la paysagiste Anne-Sylvie Bruel, qui s’est occupée de cet aménagement.
Pour les concepteurs, il s’est agi d’un défi, puisque rien n’était fait comme d’habitude : palette végétale différente, nouveaux matériaux, gestion spécifique de l’eau. Il fallait anticiper et surtout convaincre. Par exemple, les matériaux, dont le parti pris était de refléter le passé industriel, étaient parfois jugés inesthétiques.
Une gestion alternative et intégrée de l’eau
La présence de l’eau est incontestable dans le quartier. Déjà avant que les nouveaux aménagements ne soient réalisés, outre quelques cours d’eau affleurants, on devinait sa présence passée, notamment par la palette végétale en place ou par les alignements d’arbres poussant le long d’anciennes rigoles : des frênes, des saules ainsi que des aulnes. Le projet s’est appuyé sur les vestiges de cette mémoire dans l’objectif de s’inscrire dans une continuité.
« La mise au jour de l’eau passait à la fois par la valorisation de ce qui existait déjà, en conduisant les promenades vers elle, mais aussi en révélant celle présente en sous-sol au travers de la palette végétale et en gérant les eaux de ruissellement par une grande variété de dispositifs : des noues, un jardin d’eau, un autre de pluie », précise Anne-Sylvie Bruel.
Les eaux pluviales sont gérées dans un bassin paysager. Elles sont acheminées par un système de canaux et de noues. Ce jardin d’eau, qui joue le rôle de stockage et de phytoremédiation, évolue au rythme des intempéries. Au-delà de la récupération des eaux pluviales, c’est aussi un lieu de loisir et de promenade pour les habitants du quartier.
« L’installation du jardin d’eau a été complexe », se souvient la paysagiste. Cinq années se sont révélées nécessaires afin d’affiner le fonctionnement hydraulique et la palette végétale, en raison de la présence de nitrates dans l’eau, du développement de plantes invasives, mais de bonnes surprises se sont également produites, comme l’installation des poules d’eau… « Nous avons choisi d’accompagner les évolutions sans s’accrocher à un plan figé », note-t-elle. La végétation, aujourd’hui mature, contribue à l’établissement d’un écosystème dynamique.
Jean-Louis Ducreux, écologue à l’Atelier d’écologie urbaine, a d’ailleurs réalisé un inventaire au sein du site une fois le projet terminé. « C’est une sorte d’audit de la biodiversité. Il a fait un constat de ce que nous avons mis en place depuis 2005, ce qui nous permet d’en tirer des conclusions pour la deuxième partie du projet », se félicite Anne-Sylvie Bruel.
Une deuxième partie du quartier à reconvertir
La même équipe de paysagistes a été choisie pour aménager une deuxième partie du quartier, également en friche, à l’ouest. « Ce n’était pas gagné, il a fallu montrer que l’on pouvait se renouveler, avec un objectif similaire », rapporte-t-elle. L’Atelier de paysages Bruel Delmar vient de rendre un avant-projet. Dans cette friche de huit hectares, l’équipe développe, en concertation avec l’urbaniste Jean-Pierre Pranlas-Descours, un projet d’un fragment de ville entièrement piétonnier autour d’un parc public de deux hectares.
Léna HespelPour accéder à l'ensembles nos offres :