Login

Exposition universelle Floriade, à Almere (Pays-Bas) La ville verte de demain réinventée en mode multidisciplinaire

4. Le plan de masse de l’exposition mondiale anticipe Hortus, le futur nouveau quartier écologique d’Almere. DR

L’emblématique événement horticole international des Pays-Bas, qui se tient tous les dix ans, propose encore pour l’édition 2022 une vision très prospective de l’habitat urbain et du paysage.

Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.

La fermeture, dans seulement quelques jours, de l’exposition universelle décennale horticole Floriade 2022, à Almere, aux Pays-Bas, va clore une présentation de six mois sur le thème « aménager des villes vertes ». Ce laboratoire vivant à ciel ouvert ne se restreint pas à la végétalisation urbaine liée à une politique municipale. Il s’inscrit dans une stratégie nationale d’aména­gement spatial de grande ampleur avec des connexions entre les territoires, selon la stratégie des Pays-Bas depuis la Seconde Guerre mondiale. Dans cette logique, il y est plus facile de créer des groupes professionnels multidisciplinaires. En comparaison, les CAUE (conseils d’architecture, d’urbanisme et d’environnement) hexagonaux semblent insuffisamment utilisés !

Renouvelé tous les dix ans, le site choisi pour cette­ septième édition a l’originalité d’être un district­ poldérisé situé à quatre mètres sous le niveau de la mer. La conception est très applicative puisque Hortus, le futur quartier écologique d’Almere, qui naîtra des cendres de l’exposition, a généré­ le plan de masse et les infrastructures. Les parcelles de la Floriade correspondent en effet à de futures unités cadastrales. Le schéma en quadrillage de l’arboretum dispersé sur les 60 ha, avec des essences et espèces végétales qui sont présentées par ordre alphabétique selon les sections, est pensé avec une logique d’usages futurs : arbres d’alignement, entourage de jardins privés avec des haies basses très prisées dans le pays…

L’héritage de Floriade

Les idées dans l’air du temps – biodiversité, changement climatique, produits biosourcés, agriculture urbaine et évidemment bienfaits de l’arbre en ville – sont exploitées plus ou moins directement par les exposants. Leurs pavillons servent autant de boîtes à idées paysagères pour les par­ticuliers que de sources d’inspiration pour les professionnels.

La recherche est présente dans la serre et en ex­térieur. Ainsi, le projet d’Urban Climate Arboretum de l’université technologique TU Delft y a installé l’une de ses parcelles de différentes essences d’arbres en conditions contrôlées, en vue de mesurer leur potentiel de rafraîchissement en ville ainsi que leur résistance à des conditions extrêmes­ de chaleur et de sécheresse.

Le sens du collectif

Les pavillons sont soit internationaux, soit néerlandais. Ces derniers sont souvent montés par des collectifs de professionnels, établis de longue date ou nouveaux pour suivre les tendances. Ainsi Treeport Zundert, cluster des pépiniéristes de cette ville, la région horticole de Boskoop, des organisations et fédérations de filière, le collectif « Des fleurs 365 jours par an » financé par quelque 2 000 producteurs fournisseurs de FloraHolland. La section rosiers du LTO (le syndicat national, équivalent de la FNSEA) milite pour le potentiel de l’espèce dans une ville durable. Plus récent, Wilde Weelde (ce qui signifie « le bonheur sauvage », portant comme slogan « la ville, votre seconde nature ») est un réseau national plu­ri­discipli­naire autour de l’environnement naturel. Des compétences combinées se révèlent de plus en plus indispensables dans l’optique d’aménager la ville verte du futur. Très peu d’entreprises individuelles de production ou de fournisseurs exposent en direct.

Le bâtiment ouvert sur le végétal particulièrement apprécié

Les vertus affirmées des plantes en extérieur et en intérieur invitent à privilégier l’écosystème de proximité. Les particuliers apprécient des propositions comme le « bâtiment à bras ouverts sur le végétal » avec des chambres vertes extérieures (mini-jardins ou patios) ou bien les toitures et les pignons végétalisés. En parallèle, ils découvrent de manière pédagogique la richesse botanique au fil de l’arboretum.

Les professionnels repèrent des solutions pour créer des corridors écologiques, des continuums de biodiversité, pour éviter le damage du sol au pied des arbres. L’usage du lierre rampant est très courant dans le pays, le paillage était d’ailleurs très rare à Floriade. Pour répondre aux préoccupations omniprésentes autour de la ressource en eau, l’entreprise Wavin, à Zwolle, aux Pays-Bas, et son implantation française à Varennes-sur-Allier (03) ont conçu le TreeTank. Ce bac enterré en PVC optimise l’alimentation hydrique et la croissance de l’arbre en ville.

La « grande serre » – une structure de 10 000 m– offre en parallèle une présentation numérisée des innovations prospectives et une galerie de découverte le long de cellules de production (ornement et légumes). De plus, elle accueille plusieurs entreprises (dont le collectif d’horticulteurs Air So Pure pour la qualité de l’air intérieur) et un concours de nouveautés végétales se dé­roulant par espèces au fil du semestre.

L’identité des jardins privés néerlandais est visible

Le pavillon Panorama Nederland (Pays-Bas) propose une vision groupée pour l’aménagement du pays. Il est proposé par le « collège de conseillers auprès du gouvernement », qui est composé d’experts pluridisciplinaires de l’aménagement spatial, avec le partenariat de la fondation Cité verte.

Par ailleurs, l’identité des jardins privés néerlandais est lisible durant la visite. La culture protestante impose naturellement la visibilité entre voisins et freine les séparations végétales hautes, tout comme l’absence de volets aux fenêtres les transforme en vitrines vertes. Les jardinets de devanture proposent un schéma inspiré des jardins médiévaux : carré enserré d’une bordure basse de buis, soit habillé d’une masse végétale dans laquelle se distingue souvent un plus ou moins grand sujet de pépinière, soit conçu comme un jardin minéral minimaliste.

L’idée que l’homme contribue aux changements de pratiques en ville

La sculpture vigie d’un père et de son fils (photo 9) n’a pas été choisie par hasard pour symboliser le fil vert de la thématique décennale de Floriade : l’idée est que l’homme fait partie intégrante du renouvellement urbain. Il contribuera aux changements de pratiques dans une ville créée pour ses usages et son confort. L’écologie (du grec oikos, signifiant la maison) le mettra toujours au cœur des projets comme usager et si possible comme acteur. Hortus, un futur quartier d’Almere, est d’ailleurs le fer de lance de la thématique de cette édition de Floriade.

Développer les villes vertes se veut la réponse aux mutations des prochaines décennies en réduisant l’empreinte carbone de l’activité humaine. Le pavillon francophone (voir Le Lien horticole n° 1118 page 15) s’affiche comme une symbiose entre l’homme et la nature grâce à son architec­ture vitrée totalement ouverte sur le jardin.

Linda Kaluzny-Pinon

(1) Le terme horticulture doit être pris au sens international et inclure productions ornementales et alimentaires.

- 5. Dans son pavillon « La cité verte », le collectif Panorama Nederland (Pays-Bas) a implanté une prairie fleurie sauvage à développement rapide sur tapis ensemencé.

- 6. Le bâtiment de l’école supérieure d’horticulture Aeres constitue une vigie verte architecturale de Floriade, avec 11 000 végétaux en façade et en toiture, 2 500 plantes

© Photos LKP sauf indiqué - 1. La « banque alimentaire » sur un mur de briques jouxtant un jardin circulaire exploite la vision écologique de Wilde Weelde, un collectif professionnel multidisciplinaire. Photos LKP sauf indiqué

- 2. La culture à l’honneur : les pépiniéristes de Zundert se sont inspirés du peintre Van Gogh, natif de leur ville.

- 3. Les arbres architecturés sont appréciés aux Pays-Bas pour améliorer le design urbain. Les sujets de chaque parcelle font partie d’un arboretum dispersé sur le site.

- 7. L’alignement végétal étagé dans ces jardinets de devanture classiques des maisons néerlandaises contribue à une trame verte urbaine, comme ici à Zundert.

- 8. Le lierre couvre-sol est souvent préféré au paillage, comme ici à Breda. À l’arrière-plan, des haies basses de séparation bornent un parking.

- 9. Sculpture géante de Florentijn Hofman représentant un père et son fils recouverts de 10 000 abeilles en acier Corten. Devant la tour Flores, résumé vertical de l’arboretum.

- 10. Pourquoi pas, comme dans le projet Urban Jungle, des arbres en motte, moins lourds sur toiture et adaptés à des surfaces urbaines viabilisées ?

A découvrir également

Voir la version complète
Gérer mon consentement