Angers : la forêt qui ne cache pas la ville

Sur les hauteurs de la préfecture du Maine-et-Loire, trois hectares d’arbres et arbustes adaptés à des conditions de sol et de climat très particulières constituent l’une des forêts urbaines nouvellement implantées pour intégrer la nature dans la cité.

Depuis plusieurs années, sous l’impulsion de son maire, Christophe Béchu, la Ville d’Angers (49), cherche à « valoriser la végétalisation, augmenter les espaces de nature et à faire de la ville un écosys­tème urbain qui allie les habitants aux zones paysagères », explique Fanny Maujean, directrice du ser­vice des parcs et jardins de la ville et de l’agglomération*.

Dans ce contexte, mettre en place des forêts urbaines devient une évidence et, lors de visites de terrain dans le cadre de Végétal Connect, en septembre 2021, un des aménagements les plus récents a été pré­senté. Il s’agit du Grésillé, un espace limitrophe de la ville voisine, Bouchemaine.

L’objectif du site : pro­poser « une coupure verte urbaine », selon Fanny Maujean, mais aussi « développer des espaces forestiers et boisés pour demain, limiter l’étalement de la ville, capter du CO2, réduire les îlots de chaleur urbains, conforter la biodiversité ordinaire, améliorer le cadre de vie des citoyens et mettre en valeur les filières d’essences locales », comme le précise un document d’étude réalisé en amont de la plantation. En somme, répondre aux enjeux identifiés dans les villes pour les prochaines décennies.

Partir de la phytosociologie du site

Sur trois hectares, la forêt du Grésillé surplombe la cité-préfecture. De là se distingue nettement le cœur de ville, son château, sa cathédrale… Le cône de vue a été préservé : depuis un belvédère aménagé au point haut du site, la végétation a été choisie rase sur les parties supérieures et plus élevée au fur et à mesure que le promeneur s’avance vers le lac de Maine, en contrebas (voir le gra­phique page suivante). La technique d’implantation choisie est « alter­native aux plantations classiques », précise la directrice des parcs et jardins, avec une étude sur la phyto­sociologie du site, c’est-à-dire une connaissance fine des sols et des cortèges de végétaux qui peuvent y être associés.

Le site, qualifié de thermoxérophile, donc chaud et sec, avec des sols peu profonds sur des schistes, accueille une végétation très particulière. Les boisements sont constitués essentiellement de chêne des Pyrénées, Quercus pyrenaica, les zones préforestières sont des landes à callunes et bruyères, les prairies sont constituées d’agrostides et de fétuques… Cette phytosociologie étudiée avec soin a permis de définir la palette d’espèces plantées.

Planter dense pour une protection entre végétaux

Les strates végétales ont été respectées lors de la plantation : les arbres ont été entourés d’arbustes installés à des intervalles­ assez courts (tous les 50 cm) pour un effet de protection entre végétaux. Pour ne pas perturber le sol, les plantations ont été faites à la pioche forestière, un travail difficile mais qui permet de planter assez profond pour prévenir la dessiccation des plants.

Le haut du site est donc planté de bruyères et callunes basses, jouxtant une zone plus haute de lande à genêts et ajoncs. Vient ensuite une forêt basse de petits arbres, tels Pyrus cordata, Crataegus monogyna, Prunus spinosa, accompagnés d’arbustes comme des chèvrefeuilles, cornouillers sanguins ou églantiers. En partie basse du terrain ont été implantés­ le fameux chêne des Pyrénées ainsi que des chênes rouvres­, chevelus ou pubescents, voire des bouleaux et peupliers…

Le bas du site étant urbanisé, la forêt a été séparée des maisons par une bande de prairie gyrobroyée, avec à une extrémité des jardins partagés. Une allée fruitière complète le rideau de séparation entre l’habitat et la forêt. Là aussi les espèces retenues sont adaptées à ce site particulier, sec et acide, avec des pruniers ou pommiers classiques mais aussi des feijoas ou des néfliers du Japon…

120 000 plants installés pour 70 % de reprise

L’aménagement de la forêt a coûté 19 €/m2 TTC tout compris, plantations, aménagement des allées et pose des ganivelles de protection des plantations. La mise en place des végétaux a été réalisée en deux fois, une partie en 2019, avant Noël, et une partie fin 2020. Pas moins de 70 000 plantes ont été mises en terre la première année et 50 000 la seconde. Ce sont des « jeunes plants soulevés » qui ont été choisis, avec un taux de reprise en 2021 de 70 %.

L’ensemble du site est rendu accessible par des chemins enherbés et gyrobroyés de 1,5 m de largeur. Ils sont relayés, pour entrer dans les zones­ plantées, par un réseau de sentes­ de 40 cm de largeur.

La forêt du Grésillé est donc tout à la fois un endroit de nature calqué sur l’existant, une réserve de biodi­ver­­sité, mais également un nouveau type d’espace vert accessible à tous, dans ce qui devrait constituer une forêt dans quelques années : « On travaille ici à cin­quante ans », rappelle Fanny Maujean.

Heureusement car, pour l’instant, les arbres­ ont encore un peu de mal à émerger du cortège de plantes qui les entourent. Il faudra évaluer plus précisément le résultat de l’aménagement dans quelques années !

Pascal Fayolle

*Voir notre vidéo sur www.lienhorticole.fr, rubrique photos et vidéos, « Visite hors les murs à Angers », mise en ligne le 29 septembre 2021.

- Le site accueille une végétation très particulière. Les boisements sont constitués essentiellement de chêne des Pyrénées, Quercus pyrenaica.

- La mise en place des végétaux a été réalisée en deux fois. 120 000 « jeunes plants soulevés » ont été choisis, avec un taux de reprise en 2021 de 70 %.

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