Vente directe et Web pour assurer la continuité
Bigot-Fleurs, à Allonnes (72), mélange production locale et délocalisée pour alimenter la grande distribution, mais aussi trouver de nouveaux marchés, en gros et au détail.
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«Cultivées avec amour depuis trois générations, producteur de roses, de tulipes, de pivoines et de muguet », le message est clair ! Depuis sa création en 1958 par Jean Bigot, à Allonnes, dans la Sarthe, l’entreprise ne cesse de se développer et de conquérir de nouveaux marchés.
Cultivant au début des œillets, du muguet puis des roses, la société prend en 1988 un nouveau tournant, sous l’impulsion de son fils, Jean-Philippe, qui reprend l’affaire. Arrivent à cette époque les pivoines, mais surtout les tulipes. Les investissements se poursuivent, sur les terres familiales – afin d’agrandir et de moderniser les installations – comme au Kenya, où une filiale est créée en 2002 (lire l’encadré), pour produire des roses et pérenniser ainsi le groupe.
En 2010, avec la création des Fleurs de Nicolas, le site de vente en ligne du fils de Jean-Philippe, Nicolas, le marché des particuliers s’ouvre, suivi en 2015 du Cash pour les grossistes et les fleuristes. Le groupe est déjà bien implanté en grande distribution et doit s’assurer d’un maximum de débouchés. Il faut dire que la fibre commerciale anime cette famille de producteurs autant que la responsabilité environnementale et sociale.
L’hydroponie, un choix innovant
Avec un million d’euros investis depuis 2011 dans trois centrales de production photovoltaïque et un nouveau bâtiment au toit recouvert de panneaux en 2021, l’entreprise est maintenant en autoproduction d’électricité pour 50 % de sa consommation, tout en disposant d’assez de surfaces pour répondre aux pics d’activité.
La marque « Tulipe du bocage sarthois » a été déposée en 2001. L’entreprise est depuis labellisée Fleurs de France et certifiée MPS A. Les tulipes sont depuis trois ans « cultivées sans pesticides », grâce à cinq ans de recherche de solutions innovantes ayant conduit à l’installation d’ozoneurs d’air et à la désinfection au sel de toutes les caisses de mise en culture et de cueillette. En effet, conduites au début de l’aventure en pleine terre puis en hors-sol, elles sont actuellement entièrement en hydroponie, en circuit fermé de circulation d’eau additionnée d’engrais. Les bulbes mis en caisses, directement dans l’eau, passent un mois en chambre d’enracinement entre 2 et 9 °C puis un mois en serre chauffée à 17 °C pour la mise en floraison. Les chariots de cueillette sont stockés au froid tout au plus deux jours selon les commandes. Afin de garantir une fraîcheur maximale, les tiges ne sont séparées de leurs bulbes qu’à la mise en bouquets, juste avant l’expédition.
Les variétés ont été choisies et testées selon des critères de productivité au mètre carré, d’étalement des floraisons dans tous les coloris, de bonne tenue lors du conditionnement et du transport et de durée de vie en vase. Les achats de bulbes se font auprès des bulbiculteurs sélectionnés aux Pays-Bas, notamment, mais aussi, depuis 2011, au Chili. Des mises en culture initiées afin de désaisonnaliser la production en France grâce à ces bulbes précoces, en fleurs de début octobre jusqu’à la fin décembre. Un nouveau créneau qui n’existait pas il y a dix ans.
L’épreuve surmontée de la crise sanitaire
« Si la grande distribution tire encore une partie importante de nos volumes, depuis plusieurs années nous avons développé les autres circuits, commerces de gros et de détail avec le Cash et la vente directe en ligne », explique Jean-Philippe Bigot. Le label Fleurs de France, en outre, génère un gros impact sur les ventes, surtout depuis la Covid-19. Il y a un vrai besoin. L’activité du Cash a ainsi été multipliée par trois cette année.
L’effet « aider nos producteurs » fonctionne à plein. L’enseigne Intermarché en a été un des promoteurs, particulièrement au mois de novembre, à la fermeture des commerces alors considérés comme « non essentiels », lors du deuxième confinement. En achetant la majeure partie de la production disponible pour les offrir à ses clients sur les parkings, le distributeur a fait un beau geste et a très largement aidé l’entreprise, déjà durement affectée au printemps. « Nous étions sonnés, avec deux millions d’euros de perte et un prêt garanti d’État d’un montant supérieur, explique Jean-Philippe Bigot. Il a fallu annoncer à nos mille salariés kenyans que nous devions cesser la cueillette de nos roses labellisées Max Havelaar – commerce équitable, tandis qu’ici, à Allonnes, 160 salariés qui étaient mobilisés pour les tulipes ont dû cesser le travail d’un coup. À cette annonce, certains pleuraient. Mais nous leur avions promis de ne pas les laisser tomber, nous nous sommes battus avec nos fédérations », raconte le dirigeant. Les deux confinements lui ont fait jeter pas moins de dix millions de roses et trois millions de tulipes.
Le groupe poursuit ses projets. L’exportation depuis la France vers le Royaume-Uni ne représente pour le moment que moins de 5 % du chiffre d’affaires. Cependant, il existe un créneau pour les tulipes sarthoises dont la très bonne tenue est un atout à la mi-carême, période de fête des Mères outre-Manche. Les pivoines sont aussi très demandées en Allemagne. La consommation de fleurs est bien plus développée dans ces deux pays car ils disposent de plus de points de distribution et le label commerce équitable y représente 80 % des ventes de roses.
« Développer le marché français est tout à fait possible, à condition de ne pas s’opposer les uns aux autres. Les fleuristes et la grande distribution sont complémentaires », estime Jean-Philippe Bigot.
Isabelle CordierPour accéder à l'ensembles nos offres :