Pédagogie en évolution : active et immergée dans les technologies

Les formations agricoles et horticoles s’orientent dorénavant vers la transition agroécologique et le « produire autrement ». Comme le souhaitent les nouvelles consignes pédagogiques, les équipements dernier cri de la nouvelle serre du lycée Angers Le Fresne (49) constituent un bon tremplin pour les étudiants pleinement impliqués dans les choix techniques et  l’expérimentation, en amont du projet.

Éric Duclaud, directeur de l’exploitation horticole de l’établissement, a piloté la préfiguration et la réalisation au long cours. Pour l’utilisation quotidienne du nouvel outil de production de 2 500 m² – opérationnel depuis le printemps 2021 –, il est secondé­ par un contremaître, chargé des pépinières et du matériel, et un technicien de cultures en serre.

L’ensemble, labellisé HVE (Haute Va­leur environnementale), est découvert et pris en main, en parallèle, par le directeur et deux enseignants. Éric Duclaud s’est formé avec les installeurs et leurs documentations techniques. De son côté, Luc Chevré, un enseignant en agroéquipements, s’est approprié l’outil. Durant ses cours, il projette sur écran le superviseur de pilotage, accessible pour une prise en main virtuelle grâce à une application développée par le fournisseur, l’entreprise Aria, à Neung-sur-Beuvron (41). « Enfin, avec Anne Hersent, ma collègue enseignante en horticulture, nous assurons le transfert vers les enseignants durant de courtes sessions. À leur tour de s’en servir en direction de leurs élèves. Je peux venir en appui si nécessaire. Une découverte approfondie est susceptible, bien évidemment, d’intéresser d’autres membres du personnel. »

Reste à assurer un transfert pédagogique élargi vers les apprenants. De l’avis de Régis Triollet, animateur du Réso’them-Hortipaysages de la DGER (1), « la serre dernier cri d’Angers Le Fresne est la plus perfor­mante­ dans notre réseau de serres d’exploitation installées dans des Eplefpa (2). »

Les élèves sur le terrain

Les élèves, accompagnés par Anne Hersent, ont participé durant toute la phase­ de projet. L’enseignante leur a fait lire les cahiers techniques des appels d’offres. Puis elle a sélectionné, pour des travaux de groupe, cinq lots de réalisation du chantier : « Les élèves doivent se rendre compte de la précision souhaitée pour la rédaction de documents techniques. Nous avons suivi tout le chantier et réalisé des comparaisons avec l’ancienne serre. Et nous rencontrions régulièrement Éric Duclaud. »

La lecture de documents techniques est en phase avec les recommandations des inspecteurs pour que l’enseignement ne soit plus uniquement « descendant ». Il doit aider les élèves à comprendre le niveau de difficulté et la technicité de la vie professionnelle.

Ainsi, la confrontation avec ce vaste chantier a permis aux étudiants d’approcher la réflexion sur l’orientation de l’abri en fonction du vent et de la lumière. La prise en compte de l’environnement d’un site conduit à consentir des concessions tech­niques et financières.

« Une réflexion très pertinente pour de fu­turs producteurs », complète Anne Hersent, qui, avec certains de ses collègues, a réfléchi au choix des plantes à cultiver dans la serre et aux exigences liées à un établissement recevant du public (ERP).

Mise en œuvre de nouvelles technologies

Pour un pilotage de l’irrigation très pointu, les équipements de précision comme les tensiomètres individuels dans les pots sont complétés par tout un dispositif pour la col­lecte et le recyclage des eaux. Cette stratégie a donné lieu à la rédaction de fiches-actions sur l’économie de l’eau dans le cadre d’un PLEPA (plan local enseigner à produire autrement), initié par le ministère de l’Agriculture.

Cet axe est d’autant plus facile à aborder que, dans le cadre­ de son tiers-temps dévolu dans le Réso’ them Eau (3), Anne Hersent conduit, entre 2020 et 2023, un projet intitulé « Changements climatiques et végétaux : quelles réponses scientifiques et techniques ? » avec des élèves de différents niveaux.

Le volet scientifique a expérimenté la résilience et la réponse au stress hydrique de pétunias et de plants de tomate buissonnants.

Une nouvelle méthode de l’IRHS (4) d’Angers est également expérimentée dans un des outils de la nouvelle serre, le phytotron de la chambre de culture fournie par Strader, fabricant d’enceintes climatiques à Verrières-en-Anjou (49). « Nos apprenants, qui ont des profils variés, ont participé activement et concrètement à ce projet à travers la mise en place et le suivi d’essais », ajoute l’enseignante.

La crise sanitaire tout comme le bousculement de l’agenda de présence des élèves et des enseignants ont provoqué un décalage dans le temps pour le transfert pédagogique complet. Aussi, la révolution numérique de l’hyperconnexion du nouvel outil n’est peut-être pas encore aisée à appréhender pour les apprenants et formateurs. Mais d’ores et déjà, l’équipement haut de gamme qu’est la serre du Fresne est du niveau de ceux de bien des horticulteurs professionnels.

Linda Kaluzny-Pinon

(1) Établissement public local d’enseignement et de formation professionnelle agricoles.

(2) Direction générale de l’enseignement et de la recherche du ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation.

(3) Collectif d’animateurs, constitués en réseaux thématiques (une dizaine) pour accompagner la transition agroécologique au sein de la DGER.

(4) Institut de recherches en horticulture et semences, à Angers.