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Interprofession Valhor « Nos ambitions : l’attractivité des métiers, la compétitivité de notre filière et sa transition environnementale »

Artisan fleuriste depuis près de trente ans, Florent Moreau, nouveau président de Valhor, succède à Catherine Muller (issue du collège « Paysage »), pour respecter la présidence tournante de l’interprofession.

Les statuts de l’interprofession prévoient une présidence tournante par « collège » tous les trois ans. Interview de Florent Moreau, nouveau président de Valhor, qui succède à Catherine Muller, issue du collège « Paysage », elle-même ayant succédé à Mikaël Mercier, qui venait du collège « Production ».

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Le Lien horticole : Vous venez d’être élu à la présidence de Valhor, pouvez-vous vous présenter en quelques mots et nous donner votre sentiment sur ce nouveau défi qui vous attend ?

Florent Moreau : Artisan fleuriste depuis près de trente ans, passionné et convaincu de l'intérêt collectif, je suis installé depuis vingt ans avec mon associée à Saint-Laurent-sur-Sèvre, en Vendée. Aujourd'hui, pour nos trois boutiques, nous sommes entourés de sept collaboratrices, salariées et apprenties. 

Très tôt, suivant un modèle parental très engagé, je me suis consacré – en parallèle de mon activité professionnelle – à porter la voix de mes confrères jusqu'à présider, durant toute la période Covid, la Fédération française des artisans fleuristes. Mon investissement, entre autres, nous a permis, avec l'ensemble de la filière, d'être reconnus comme essentiels et d'obtenir l'ouverture de tous les fleuristes en France. 

Précédemment administrateur de Valhor, présider désormais l'interprofession est pour moi un honneur ainsi qu’une responsabilité importante. 

Nous avons pour mission de valoriser le végétal et les savoir-faire des 200 000 professionnels qui la composent. Et nous avons pour objectif d'unir sous la bannière Valhor nos 45 000 entreprises.

Valhor est un outil à leur service pour apporter des solutions aux problématiques actuelles mais aussi pour engager la filière végétale vers les enjeux à venir.

LLH : Quelles sont vos priorités à la tête de l’interprofession ?

F. M. : Tout d’abord, il s’agira pour moi de concrétiser les ambitions du projet stratégique qui animera l’interprofession pour les prochaines années, avec des ambitions très claires autour de l’attractivité des métiers, de la compétitivité de notre filière et de sa transition environnementale, ceci pour répondre aux besoins de nos professionnels ressortissants.

L’accompagnement des entreprises dans leur développement ainsi que dans leur transformation sera également au cœur de ma feuille de route. Nous nous inscrivons aujourd’hui dans un contexte résolument concurrentiel, à l’échelle européenne comme internationale. Face à ce constat, nous devons impérativement remettre au cœur de nos sujets l’expertise technique et ornementale de nos professionnels, et réaffirmer le rôle clé de Valhor. Cette technicité est non seulement inimitable mais elle répond également à des attentes sociétales fortes. J’aurai à cœur de toujours porter le message que tous les secteurs ne peuvent pas s’improviser experts dans nos métiers.  

Parallèlement à cela, je considère qu’il est du rôle de l’interprofession de donner les moyens aux professionnels d’adapter leurs entreprises et leur exercice des métiers aux évolutions des normes et labels, aux attentes des consommateurs, aux changements climatiques. J’accorderai donc une attention toute particulière à ce que Valhor joue pleinement ce rôle d’accompagnement, de pédagogie, mais aussi d’anticipation collective.

Enfin, je veillerai à replacer l’interprofession dans sa posture référente, pour qu’elle soit à la fois, en quelque sorte, le réflexe positif pour chaque femme et chaque homme qui la composent, et le porte-voix de toute la filière. Ceci toujours avec l’aval et l’appui de toutes ses fédérations, qui sont le cœur même du consensus interprofessionnel, car chaque fédération reste l’expert en son métier.

LLH : Vous travaillez dans la distribution, quels sont dans ce métier les principaux enjeux pour les prochaines années ?

F. M. : À travers mon quotidien de fleuriste, j’ai bien sûr une sensibilité particulière aux tendances et aux attentes des consommateurs, à la valorisation des labels, aux certifications et à leurs promesses (qualité, critères environnementaux…), mais aussi au savoir-faire et à la créativité.

Mais, au-delà de cela, mon rôle de président de l’interprofession est bien de porter les priorités partagées par toutes nos « familles ». Je me suis d’ailleurs attaché ces derniers mois à « prendre le pouls » des priorités de chacune, ce que je continuerai à faire très régulièrement. Avec forcément une vision plus orientée distribution.

Notre feuille de route collective se structure autour d’enjeux très clairs :
- donner envie de venir travailler dans la filière ;
- préserver la compétitivité de cette dernière et s’inscrire dans une démarche vertueuse de respect de l’environnement.

Cette mission s’inscrit dans un temps long et, en parallèle, à plus court terme, il s’agira de répondre ensemble aux défis actuels de nos métiers, en préservant par exemple nos professionnels de potentielles crises.

LLH : Le marché du végétal d’ornement et du jardin en général affiche des performances contrastées. Quels sont les leviers d’action possible à disposition de Valhor pour le soutenir et le relancer ?

F. M. : Avant même de répondre à cette question, je pense qu’il est important de rappeler quelques chiffres qui témoignent de l’environnement français en matière de distribution horticole.

Notre pays compte dans ce domaine 15 140 entreprises spécialisées. Les dernières études menées nous apprennent que 72 % des dépenses des particuliers en végétaux d’ornement se font dans un circuit de distribution spécialisée. En parallèle, 80 % des foyers français qui achètent des végétaux se rendent dans un circuit spécialisé.

Il est essentiel de partager les constats, les diagnostics.

Au sein de Valhor, nous avons une véritable expertise économique et réalisons de nombreuses études, à l’image de celles que nous menons chaque mois auprès d’un panel de 7 000 foyers interrogés sur leurs achats, dont les végétaux. Véhiculer cette information jusqu’à chaque professionnel sur le terrain est une étape clé et cela passe, entre autres, par nos outils, à l’image de « l’Espace pro », que nous avons imaginé comme une vraie plateforme de ressources concrètes et pratiques pour chaque professionnel.

Toutes ces données précieuses sur les attentes des consommateurs et leurs préférences, par exemple, se trouvent sur l’Espace pro de Valhor : j’invite donc tous les professionnels du végétal à s’y connecter !

LLH : Le Covid avait permis à la filière de se faire entendre du gouvernement. Cette écoute de la part des élus est-elle toujours une réalité aujourd’hui ?

F. M. : Il est vrai que lors de la crise du Covid nous avons su construire autour de l’interprofession une communauté d’élus attentifs aux enjeux de notre secteur, ce dont nous ne pouvons que nous réjouir car c’est une vraie force pour la filière.

Cette relation de proximité est d’ailleurs toujours d’actualité et nous l’entretenons via des rencontres régulières, que ce soit directement à l’Élysée, ou encore avec des députés, et plus globalement avec l’ensemble des décideurs.

Aujourd’hui, ces interlocuteurs sont sensibles à la diversité de nos activités, à la réponse aux enjeux sociétaux de notre époque, à notre présence sur tout le territoire, en zone rurale, comme au cœur des villes, en passant par les commerces de proximité dans nos bourgs et villages. Ils ont compris que nous sommes une branche très particulière des filières agricoles.  

Nous avons par exemple sensibilisé les élus et le gouvernement à la notion de « souveraineté végétale ». Ici, il s’agit, en miroir à la notion de « souveraineté alimentaire », de solliciter l’appui des décideurs publics à notre filière, qui est en capacité de répondre aux enjeux d’adaptation de nos villes aux effets du changement climatique, par exemple. 

LLH : Nous avons écrit un éditorial il y a quelques semaines pour dire combien la situation globale avait tendu les relations entre les différents métiers de la filière. Partagez-vous ce sentiment ?

F. M. : Je ne partage pas entièrement votre point de vue. Je suis plutôt à regarder le « verre à moitié plein » et à capitaliser sur « l’envie de faire ensemble ».

Quand je vois dix fédérations se mettre autour de la table pendant un peu moins d’un an pour se projeter dans une stratégie de filière à six ans, je ne vois qu’un succès. Les défis sont là et ont suscité ce travail, mais le collectif l’a emporté.

Le végétal est notre socle commun, et notre ambition est de valoriser les savoir-faire qui permettent de le cultiver et de renforcer toute notre filière. L’interprofession est un outil au service des professionnels et de notre secteur. Ensemble, nous répondons aux enjeux actuels, dans le court terme, tout en orientant collectivement notre filière vers l’avenir.

LLH : Parmi les actions actuelles menées par l’interprofession, quelles sont celles qui contribuent le mieux à faire avancer ensemble les différents métiers de la filière ?

F. M. : Certaines actions de l’interprofession se démarquent particulièrement en réunissant nos différents métiers autour d’objectifs communs et structurants.

Je pense déjà à notre action autour de la gestion de l’eau. C’est un sujet central en raison des épisodes de sécheresse de plus en plus fréquents. En déployant un volet pédagogique auprès des collectivités pour sensibiliser à l'importance de l’arrosage des jeunes plantations, nous œuvrons à valoriser le rôle des végétaux dans le rafraîchissement urbain. L’appropriation de cet enjeu et l’implication dont les collectifs interprofessionnels témoignent sur le terrain illustrent l’engagement commun des acteurs de la filière, créant ainsi une dynamique de coopération.

La logique de partenariat innovant construit par exemple avec Vadeho pour la création d’une REP* sur les pots horticoles professionnels, pour leur collecte et leur recyclage, illustre, elle aussi, la capacité des différents métiers de la filière à avancer ensemble.

C’est également le cas pour nos partenariats avec trois organisations essentielles que sont Excellence végétale, pour les labels et certifications visant le développement de la valeur dans le secteur, ce qui contribue à la reconnaissance et à la valorisation des métiers ; Astredhor, l’institut de la filière, et Plante & Cité, que nous soutenons financièrement pour le développement de projets de R&D. Ces partenariats permettent de financer des projets innovants, servant directement les intérêts de l’ensemble de la filière en répondant à ses besoins de compétitivité et d’adaptation aux nouveaux enjeux environnementaux.

LLH : Quelles sont les actions à venir qui pourraient y contribuer ?

F. M. : Travailler sur une marque employeur forte permettrait d’attirer de nouveaux talents et de fidéliser les professionnels existants. En valorisant les métiers de la filière et en mettant en avant les valeurs communes, cette démarche pourrait renforcer l’attractivité du secteur et encourager une plus grande cohésion entre les différents métiers.

Le renforcement du lien et de la communication vers les professionnels est également crucial. En intensifiant les échanges et en communiquant davantage avec les professionnels de la filière, l’interprofession pourrait favoriser un sentiment d’appartenance et d’implication plus fort. Cette dynamique de proximité permettrait d’impliquer directement les acteurs sur les évolutions et les initiatives sectorielles, consolidant ainsi les liens entre les différents métiers.

Enfin, la mise en avant des réalisations de la filière est aussi essentielle. Communiquer de façon plus visible et accessible sur les actions déjà entreprises et leurs résultats pourrait renforcer la reconnaissance de la filière et encourager un esprit de collaboration. Faire connaître davantage ce qui est accompli permettrait à chacun de mesurer l’impact des actions collectives et de mieux comprendre leur rôle au sein de la filière.

LLH : Enfin, comment ressentez-vous les retours parfois violents des consommateurs finaux envers certains produits horticoles ? Par exemple les fleurs coupées porteuses de produits phytosanitaires et qui viennent de loin, ou les plantes à massifs présentées comme peu pérennes et donc peu en phase avec l’époque qui vise la durabilité... Est-ce pour vous un danger, à terme, pour notre secteur ?

F. M. : Concernant les réactions parfois vives des consommateurs envers certains produits horticoles, il est important de rappeler que la filière respecte un cadre législatif strict pour l’utilisation des produits phytosanitaires. Toutes les substances utilisées sont soumises à des autorisations par les pouvoirs publics et font l’objet de contrôles rigoureux.

En ce qui concerne les productions hors Union européenne, les acteurs de la filière mettent en place des outils pour mieux tracer l’origine et les modes de production des produits importés. Je pense notamment aux normes de durabilité rassemblées au sein de la FSI - Floriculture Sustainability Initiative.

De plus, la filière s’engage activement dans la recherche et l’innovation pour développer des alternatives aux produits phytosanitaires traditionnels. Cela se traduit par des démarches volontaires, des labels et des certifications visant à répondre aux attentes des consommateurs en matière de durabilité. Notre rôle est de faire savoir tout cela, et peut-être plus encore aujourd’hui.

Enfin, je tiens également – et surtout – à rappeler que la filière promeut les bonnes pratiques afin de limiter toute exposition de ses professionnels.

A regarder en vidéo : Florent Moreau se prête au jeu de répondre à cinq questions.

https://dai.ly/x99837m

*Responsabilité élargie du producteur.

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