Installation : les avantages du parrainage
Novice dans le domaine de la pépinière, Thomas Morizur s'est installé à Mazé, dans le Maine-et-Loire, en s'appuyant sur l'accompagnement du propriétaire qui partait à la retraite et sur des formations en gestion d'entreprise. Un pari réussi alors que débute sa cinquième campagne de ventes.
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Thomas Morizur est pépiniériste à Mazé (49), près d'Angers. Spécialisé dans les jeunes plants en racines nues, il propose des sujets de 1 à 2 ans destinés à l'ornement, aux fruitiers et au reboisement forestier. Après un brevet de technicien agricole (BTA) généraliste et un BTS Technologies végétales, il a travaillé dix ans dans les semences et les phytosanitaires, avec en tête le projet de s'installer dans une entreprise du secteur végétal.
Parrainage technique
APPRENDRE LES FICELLES DU MÉTIER
L'opportunité s'est présentée par hasard. « En 2007, à l'occasion de la fête de l'école de mes enfants, j'ai appris que le pépiniériste Serge Lecomte cherchait quelqu'un à qui céder son entreprise, sans succès jusqu'alors. Après plusieurs rencontres et visites, j'y suis entré en tant que salarié en octobre. Je ne venais pas du monde de la pépinière : les onze premiers mois ont été à 100 % consacrés au travail de terrain pour accumuler de l'expérience aux côtés du personnel. Quand il a été décidé que je reprenais l'entreprise, j'ai suivi un stage de parrainage. Jusqu'en 2008, j'étais encore principalement sur le terrain et à la gestion du personnel. Je n'abordais pas les aspects commerciaux. J'ai souvent fait le point avec Serge Lecomte sur mon projet. » À partir du mois de septembre 2008, les deux hommes travaillent conjointement et s'occupent des ventes : rédiger les offres et les devis, suivre le fichier clients, acheter (intrants, matériels), gérer les stocks. « Je me suis demandé si la clientèle allait m'accepter et me suivre, car les pépiniéristes attendent d'un fournisseur de jeunes plants qu'il assure un suivi de la qualité… » Mais cette période de transition a été l'occasion de rassurer Thomas. Serge Lecomte était là, surtout au plus fort de la saison. « Du mois de décembre et jusqu'à la fin mars, il venait encore tous les jours. Il n'était toutefois plus présent en permanence, afin que je puisse avoir un contact direct avec les clients qu'il m'avait d'ailleurs présentés sur les salons. Son accompagnement s'est ensuite centré sur les principales étapes, comme la période des semis. Ce parrainage a été important pour apprendre les ficelles du métier. Le banquier de la pépinière en a d'ailleurs mesuré l'importance. » Désormais, Thomas Morizur reste davantage sur le terrain en été, et beaucoup plus au bureau en hiver, où il reçoit l'aide d'une personne deux fois par mois pour finaliser la comptabilité.
Bilan positif
CLIENTS, SALARIÉS ET SAISONNIERS FIDÉLISÉS
Au bout de quatre campagnes en tant que responsable de la pépinière, le bilan est positif : « J'ai conservé la même base de clients et réussi à en gagner de nouveaux. J'en compte deux cents aujourd'hui. Je reste en contact avec Serge Lecomte, et je sais que je peux lui demander son avis à tout moment si besoin. » Thomas Morizur a également pu garder les quatre salariés : deux hommes et deux femmes présents dans l'entreprise depuis cinq à vingt-cinq ans. Et il a par ailleurs pu embaucher un jeune qui avait déjà fait plusieurs saisons dans la pépinière. « Pour les périodes de pointe, je passe par le groupement d'employeurs Forval, à Beaufort-en-Vallée. L'un des saisonniers vient depuis trois ans. C'est intéressant pour moi, car il est opérationnel tout de suite, entre novembre et mars, pour les arrachages. Je sais que je peux compter sur lui. Le reste du temps, Forval gère son planning, entre une grande pépinière régionale et une ville. Je souhaiterais pouvoir embaucher encore deux à trois saisonniers, mais ce n'est pas facile, surtout sur de courtes périodes. »
Journées de formation
DES TÉMOIGNAGES TRÈS ENRICHISSANTS
Comment apprend-on son métier de chef d'entreprise quand on est issu du monde des salariés ? Pour les aspects administratifs de la démarche d'installation, Thomas Morizur a été conseillé et épaulé par deux organismes, entre fin 2007 et début 2008, juste avant de reprendre la pépinière. « La chambre de commerce et d'industrie d'Angers m'a permis de rencontrer des banquiers, des assureurs et des comptables sur les volets relatifs à la gestion d'une entreprise. Les témoignages de personnes déjà installées – parcours, impressions et retours d'expérience – ont été très enrichissants. Pour les aspects comptables, j'ai suivi une formation d'une semaine. Là encore, les témoignages, y compris dans d'autres secteurs professionnels que le mien, m'ont beaucoup apporté, comme ceux de créateurs qui avaient déjà échoué une première fois, mais repartaient pour un nouveau challenge. » Le candidat à la reprise a par ailleurs participé à une formation de six jours menée avec la chambre d'agriculture d'Angers. Seul pépiniériste lors de ce stage, il a côtoyé à cette occasion d'autres professionnels du monde agricole : céréalier, responsable de centre équestre, horticulteur… Cette période a été mise à profit pour préparer son dossier DJA (dotation jeune agriculteur) auprès d'un tuteur référent : une étape qui permet de vérifier la cohérence d'un projet d'installation. « Serge Lecomte m'avait donné tous ses chiffres comptables, ses éléments de gestion et administratifs : j'ai pu, dès mon installation, avoir le recul sur les saisons précédentes, faire des comparaisons et des prévisions. » L'entreprise est également suivie, une fois par an, par le cabinet comptable Afga, à Angers.
Depuis l'an passé, avec le conseil territorial du Pays des vallées d'Anjou, deux à trois fois par an, il retrouve des chefs d'entreprise de tous secteurs : « Nous parlons de nos expériences et de nos problèmes pour faire évoluer nos entreprises. La dernière fois, nous avons évoqué le recrutement des jeunes. Certains d'entre nous vont dans les écoles pour présenter leur métier et leur entreprise, d'autres mettent en avant des salaires attractifs…, mais le constat de tous est que les candidats potentiels ne veulent pas aller travailler à la campagne, même à seulement une vingtaine de kilomètres d'Angers… Issus de la ville, ils souhaitent rester dans un environnement citadin. » Aujourd'hui doté d'un équipement et d'une organisation bien huilés, Thomas Morizur va, pour sa part, reprendre contact avec l'École supérieure d'agriculture (ESA) d'Angers et le lycée Le Fresne, à Sainte-Gemmessur-Loire, pour accueillir des stagiaires.
Dès l'installation
DES OPPORTUNITÉS POUR S'AGRANDIR
« Trente-cinq ans est un bon âge pour se lancer », précise le pépiniériste. « J'ai fait un gros investissement à 34 ans. Aujourd'hui, j'en ai 38 et je commence à avoir un peu de recul. L'installation est bien sûr une période stressante. Mon épouse a heureusement souscrit à mon projet et en a accepté les contraintes. » Il n'a aucun regret : « Je suis heureux dans mon travail, même si les hivers restent difficiles, la clientèle réservant de moins en moins à l'avance. Il y a toujours de la crainte lors de la germination des semis… On ne maîtrise pas tout. »
Par ailleurs réactif et chanceux, Thomas a pu récupérer, à peine installé, une dizaine d'hectares qui venaient de se libérer ; une occasion particulièrement rare dans la région. Puis en octobre 2011, une seconde opportunité s'est présentée. Il a pu racheter une pépinière voisine qui était en liquidation judiciaire. « Cette étape n'était pas prévue . Même si l'investissement était moins lourd qu'au moment de l'installation, il a fallu négocier de nouveau avec les banques. Mais ce rachat est arrivé à point nommé : nous étions dans des locaux anciens, peu fonctionnels. Nous perdions beaucoup de temps. Nos bureaux ont été réorganisés dans un espace de 300 mètres carrés, plus adapté, et nous avons pu anticiper le projet d'extension qui devait se réaliser en 2015. » Outre les bâtiments, 10 hectares sont venus agrandir la pépinière, dont 4 repris en location. « Des terres adjacentes aux miennes ! J'ai fait une offre au mandataire judiciaire ; j'étais le seul candidat, donc prioritaire. Maintenant, je fais une pause dans les investissements. Il faut d'abord maintenir l'activité et assurer la pérennité de l'entreprise. Les prochains investissements concerneront des matériels... Tout d'abord des godets antichignons pour étaler la période de vente sur un à deux mois supplémentaires au minimum, plutôt au printemps ; le commerce des racines nues étant trop restreint entre les mois de novembre et de mars. »
Odile Maillard
www.lienhorticole.fr Retrouvez le témoignage de Thomas Morizur en rubrique Photos&Vidéos.
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