Réactions Ce que pensent les syndicats agricoles de la réforme des retraites
Après l’adoption du texte par le Parlement, les organisations syndicales se positionnent.
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Les députés ont rejeté le 20 mars deux motions de censure déposées par l’opposition après le déclenchement par la Première ministre, Élisabeth Borne, de l’article 49.3 de la Constitution, pour l’adoption du projet de loi de réforme des retraites. Dans le texte final, le report de l’âge légal de départ de 62 ans à 64 ans à l’horizon de 2030 est confirmé, ainsi que l’accélération de l’allongement de la durée de cotisations (à 43 années pour une retraite à taux plein).
Après l’adoption du texte par le Parlement, la mobilisation se poursuit pour empêcher sa promulgation : par la saisine du Conseil constitutionnel, l’organisation d’un référendum d’initiative partagée (voir l’encadré) ou encore dans la rue. Les syndicats agricoles se positionnent.
Carrières longues
La FNSEA « prend acte » en insistant sur les avancées concernant les carrières longues. « Ça compte pour les agriculteurs, car il y a beaucoup de carrières longues, 11 points de plus que la moyenne nationale », note Luc Smessaert, son vice-président.
L’élu en charge des questions sociales souligne aussi l’assouplissement des modalités d’accès aux dispositions de la loi Chassaigne 1. « D’après le gouvernement, 45 000 assurés, en invalidité ou en incapacité, injustement écartés des revalorisations, vont bénéficier des 85 % du Smic. »
Il y voit un autre point positif : le complément emploi retraite. « Avec la réforme, un agriculteur peut prendre sa retraite agricole, céder sa ferme à un jeune, puis bénéficier d’un statut de salarié ouvrant des droits. Lorsqu’il arrêtera de travailler, il pourra compléter sa petite retraite agricole avec les droits ainsi acquis. »
Évolution de l’assiette sociale
Au syndicat agricole majoritaire, on regarde aussi d’un bon œil la réforme promise par le gouvernement de l’assiette sociale des travailleurs indépendants. « La FNSEA travaille avec les indépendants, la CPME, pour revoir l’assiette de la CSG-CRDS. Le sujet est bien engagé. Ce pourraient être plus de 300 millions d’euros qui profiteraient à tous les agriculteurs français, au lieu d’aller dans les poches de Bercy. C’est une avancée sur laquelle nous travaillons depuis trois à quatre ans et l’objectif est le PLFSS (projet de loi de financement de la Sécurité sociale) pour 2024 », explique Luc Smessaert.
Et de poursuivre : « Là où la FNSEA estime qu’on n’a pas été assez loin, c’est par rapport aux agricultrices, dont les revalorisations sont très faibles. Aujourd’hui, avec la loi Chassaigne 2, elles sont en moyenne à seulement 740 euros par mois. On est loin du compte par rapport aux 1 200 € annoncés de retraite minimale dans la réforme. » L’élu espère aussi de nouvelles discussions sur la transmission progressive et la prise en compte des fins de carrière difficiles, « peut-être dans le projet de loi d’orientation agricole ».
Calcul sur les vingt-cinq meilleures années
Autre sujet important pour la retraite agricole : le calcul des pensions sur les vingt-cinq meilleures années et non plus sur l’ensemble de la carrière, comme actuellement. Sur les nouvelles modalités de calcul, Luc Smessaert espère que le gouvernement présentera des scénarios d’ici à la fin de l’année. « Notre objectif est de faire évoluer le système par points et de rendre les retraites agricoles plus attractives. C’est comme au rugby, on a aplati, maintenant il faut transformer l’essai ! »
Créer une TVA sociale
De son côté, la Coordination rurale annonce être « favorable à une réforme, mais pas celle-là ! » dans une position publiée le 7 mars. Le syndicat dénonce le recul de l’âge légal, une mesure « inacceptable pour les agriculteurs et agricultrices dont la pénibilité de la profession n’est nullement prise en compte ». Pour assurer le financement des retraites, le syndicat propose de créer une « TVA sociale » qui consisterait à « transférer le coût des cotisations sociales assises sur le travail sur le prix des biens de consommation ».
Appel au retrait de la réforme
Quant à la Confédération paysanne et au Modef, ils restent mobilisés aux côtés des syndicats de salariés contre la réforme des retraites.
Dans un communiqué publié le 16 mars, la Confédération paysanne estime que le recours au 49.3 est « un déni démocratique et un bras d’honneur aux citoyens mobilisés pacifiquement depuis plusieurs mois ».
Pour le Modef, dans un communiqué du même jour, la réforme « constitue une grave régression sociale et aggrave les inégalités femmes-hommes ».
Le 21 mars, la Confédération paysanne appelait à la convergence des luttes dans un courrier adressé aux organisations de l’intersyndicale contre la réforme des retraites en vue de la mobilisation du 23 mars sur les retraites et « des mouvements sociaux et écologiques qui suivront, dont celle pour la défense de l’eau et contre les mégabassines les 24, 25 et 26 mars prochains dans le marais poitevin ».
« Nous vous encourageons, de la même manière que le mouvement écologique sait le faire sur les retraites et les luttes sociales, à ne pas manquer cette occasion de lier nos luttes et nos destins pour imposer un rapport de force qui nous sera enfin favorable », exhorte le syndicat.
Référendum d’initiative partagée
En parallèle des motions de censure, 252 parlementaires de la Nupes ont lancé le 17 mars dernier la procédure pour obtenir un référendum d’initiative partagée (RIP) sur la loi. Son but : demander aux Français s’ils veulent, oui ou non, limiter l’âge légal de départ à la retraite à 62 ans, alors que la réforme la reporte à 64 ans.
Longue et très complexe, cette procédure n’a pour l’instant jamais abouti.
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