Protection des plantes S@m, l’ami qui surveille vos cultures à distance !
Outils d’aide à la décision, pièges connectés… depuis plusieurs années, Astredhor travaille sur de nouvelles technologies permettant de diminuer, voire d’arrêter, l’usage de pesticides.
Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.
Depuis plusieurs années, dans le cadre d’un partenariat entre Astredhor et l’Inrae, l’unité mixte technologique (UMT) FioriMed porte un projet d’outil d’aide à la décision. Baptisé S@m, son objectif était de disposer de suffisamment d’informations pour aider à prendre les meilleures décisions d’intervention à l’échelle de la parcelle. « Au départ, le point central de S@m était d’établir la cartographie spatiotemporelle des bioagresseurs afin de visualiser les dynamiques des populations », rapporte Émilie Maugin, ingénieure recherche conseil en horticulture à Astredhor Sud-Ouest. Cet outil permet de voir les points chauds de la serre, d’avoir une idée des effets des interventions, aussi bien culturales que sanitaires.
Aujourd’hui, les équipes s’évertuent à y ajouter de nouvelles données. La collecte manuelle d’informations climatiques ou sur les bioagresseurs et auxiliaires est chronophage et demande de l’expertise. Utiliser des capteurs connectés pourrait-il permettre de gagner en fiabilité et en temps ? C’est la réflexion que propose l’équipe de FioriMed.
Données climatiques et pièges connectés
Ce nouveau projet, débuté en 2020, est baptisé S@msosa, pour « oser l’intelligence artificielle avec S@m ». Le premier volet du programme consistait à sélectionner les capteurs, pour ensuite collecter des jeux de données qui seront traités grâce à des partenariats avec des « data scientists » utilisant les technologies de l’intelligence artificielle. Les capteurs, et donc les données, sont de deux types. Les informations sur le climat sont récoltées grâce à des stations positionnées dans des sites Ecophyto. Un deuxième volet consiste à détecter précocement des bioagresseurs par captation d’image (pièges connectés). « On travaille sur ces deux typologies de capteurs avec Pessl instruments. Les pièges connectés intègrent déjà des algorithmes de reconnaissance des insectes. Mais, en termes de reconnaissance, des améliorations doivent être apportées. On voudrait aller plus dans le détail et la diversité des insectes reconnus », précise Bruno Paris, coanimateur de l’UMT FioriMed. Plusieurs stations d’expérimentation sont équipées des différents capteurs, à la fois en systèmes horticoles, maraîchers et diversifiés (Astredhor Sud-Ouest, le Cream, Armeflhor, Eplefpa Antibes, le Scradh, et l’UMR institut Sophia agrobiotech).
Ce projet de recherche en est encore à ses débuts. La robustesse et la pertinence des différents outils vont être testées de manière à sélectionner les meilleurs capteurs à mettre à disposition des horticulteurs. Ces outils seront à terme ajoutés à l’interface S@m et les informations seront disponibles sur son tableau de bord. Les utilisateurs pourront ainsi rapidement connaître les données climatiques et biologiques sur leurs parcelles pour conseiller et/ou recevoir des conseils sur la marche à suivre.
Apprendre aux machines à reconnaître les ravageurs
D’autres pièges connectés sont testés par différentes stations de l’institut technique horticole. À Astredhor Sud-Ouest, des tests ont été effectués avec un piège Delta Trap Vision (Cap2020). Il est désormais capable de reconnaître Duponchelia fovealis avec une fiabilité de plus de 98 %.
« Il manquait au piège des algorithmes de détection. Nous avons donc appris à la machine à reconnaître le papillon », explique Émilie Maugin. Les comptages journaliers effectués par le piège sont accessibles sur une interface Web. Sur le site, une carte et un code couleur vont informer l’utilisateur si le seuil d’infestation a été dépassé. Et une alerte mail peut être déclenchée si le piège a rencontré une pression anormale.
Il faut compter à l’achat environ 500 euros par piège, ou entre 30 et 50 euros par mois en location. « Sachant qu’on n’en a pas forcément besoin toute l’année et que les pièges connectés évoluent rapidement, la location semble pour l’instant le plus intéressant pour un producteur », estime l’ingénieure. Le nombre de pièges à installer dépend des serres et des cultures. On peut l’estimer à un pour 100 à 500 m². Mais il pourrait par exemple y avoir un piège sentinelle connecté dans une zone à risque, qui serait complété par des modèles classiques.
Pour élargir la gamme de ravageurs détectés par ce piège connecté, un deuxième projet nommé Catch a débuté en 2021. Ici sont visés les thrips, pucerons, aleurodes et cicadelles. « Pour chacun, entre 200 et 300 identifications sont nécessaires pour que la machine soit capable de l’identifier correctement », précise Émilie Maugin. De bons résultats ont été constatés sur thrips, pucerons et cicadelles. Le projet continue.
D’autres stations s’intéressent à d’autres pièges, comme celui développé par Astredhor Seine-Manche et au CDHR Centre : le piège cocon. À terme, tous pourraient être ajoutés à l’interface S@m.
D’autres déclinaisons de S@m
D’autres partenaires peuvent être amenés à compléter ou améliorer l’outil S@m, qui « travaille très bien à l’échelle de la parcelle, sur des cultures peu diversifiées », constate Bruno Paris. Le projet S@medit a vocation à le rendre performant également pour des cultures diversifiées. Porté par Armeflhor (station expérimentale basée à La Réunion), il a été lancé en 2021 pour une durée de trois ans.
Une application métier a été conçue cette fois à destination des conseillers de terrain : Ses@me. « On ne veut se passer d’aucun maillon de la chaîne de valeur de l’écosystème agricole », souligne Bruno Paris. Ses@me sera un module spécifique de S@m, accessible sur téléphone ou tablette. Il permettra de contribuer à la réduction des pesticides grâce à un conseil professionnel, personnalisé et tracé. Le conseiller y trouvera l’historique des interventions, l’outil proposera à l’horticulteur la gestion des stocks de produits phytosanitaires de même que l’enregistrement des pratiques…
L’outil d’aide à la décision S@m est destiné à la fois aux institutions scientifiques et techniques, aux conseillers et aux producteurs. L’équipe qui le développe réfléchit à une société coopérative d’intérêt collectif pour la commercialisation. Mais elle n’est pas encore prête. « C’est un outil qui a vocation à rendre un service d’intérêt général, on veut le mettre à disposition du plus grand nombre », explique Bruno Paris. Le coût de la mise à disposition ne doit donc pas être prohibitif pour actionner un levier d’entraînement vers la protection agroécologique des cultures.
Léna HespelPour accéder à l'ensembles nos offres :