Amblydromalus limonicus, un prédateur généraliste
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Spectre d’efficacité et cultures envisageables
- Proies : décrit pour la première fois en 1956 sur des agrumes en Californie, Amblydromalus limonicus, acarien prédateur polyphage, a d’abord attiré l’attention des spécialistes de la lutte biologique dans les années 1960 en tant qu’ennemi naturel des acariens nuisibles Oligonychus punicae et Tetranychus cinnabarinus sur l’avocat et d’autres fruitiers. Aujourd’hui utilisé en biocontrôle, il consomme surtout des œufs et larves d’aleurodes de premier stade, ainsi que des larves de thrips, mais aussi d’autres petits insectes (dont des cochenilles), des acariens juvéniles (tétranyques, tarsonèmes) et du pollen. Cette dernière ressource, quand elle est disponible, lui permet de s’installer dans la culture avant l’apparition des ravageurs.
- Principales cultures concernées : bien que reconnu depuis longtemps pour son efficacité contre les thrips, A. limonicus ne fait son apparition sur le marché européen qu’en 2012, quand la société Koppert parvient à développer un système d’élevage de masse viable sur le plan économique. Dès lors, son utilisation est considérée comme intéressante pour la protection de nombreuses plantes d’ornement cultivées sous abri, exposées à des attaques d’aleurodes, thrips et/ou acariens phytophages (par exemple, le rosier), ainsi qu’à des productions maraîchères sous serre (aubergine, concombre, fraisier, laitue, poivron…), sauf la tomate, qui ne lui convient pas. Cet acarien naturellement répandu dans les régions subtropicales et tempérées à climat humide (zones maritimes, jamais à l’intérieur des terres où le climat est plus sec) d’Amérique du Nord, centrale et du Sud, de Nouvelle-Zélande et d’Australie, est moyennement rustique. N’entrant pas en diapause, il ne peut survivre aux hivers rigoureux. C’est pourquoi il est utilisé sous abri en France. Cependant, l’espèce semble adaptée au climat méditerranéen. Elle est signalée comme installée dans le nord-est de l’Espagne depuis 2011. Mais un faible taux d’humidité lui est néfaste à différents stades de son cycle de développement : ponte, éclosion des œufs, survie des larves, longévité au stade adulte.
Comportement et efficacité :
A - Consommant des larves de thrips de premier et deuxième stades (à 25 °C, une femelle adulte d’A. limonicus se nourrit de sept larves de thrips de premier stade par jour), son efficacité est globalement plus durable que celle de Neoseiulus cucumeris ou d’Amblyseius swirskii, qui ne mangent que le premier stade larvaire de ce ravageur. Mais contrairement à N. cucumeris, les larves prédatrices d’A. limonicus, elles, doivent absolument se nourrir. Si elles sont privées d’aliments, leur développement est ralenti et le taux de mortalité élevé. Dans une stratégie de lutte intégrée contre les thrips, A. limonicus, de même que Transeius montdorensis, autre acarien auxiliaire, est complémentaire de prédateurs généralistes utilisables en productions horticoles sous abri, à l’image des punaises Orius laevigatus, O. strigicollis et Pluteus insidiosus, prédatrices de tous les stades des thrips, à l’exception des œufs. On peut également citer la synergie possible en cultures sous serre avec Macrocheles robustulus ou Stratiolaelaps scimitus, acariens prédateurs de nymphes de thrips dans le sol ou encore de Steinernema feltiae, nématode entomopathogène de thrips à tous les stades (surtout nymphal, sauf œuf).
B - Dans la lutte intégrée contre les aleurodes, A. limonicus agit efficacement vis-à-vis des œufs et des larves de l’aleurode du tabac (Bemisia tabaci) et de celui des serres (Trialeurodes vaporariorum), ce qui le rend très intéressant pour la protection des plantes d’ornement sous abri. Son introduction se fait dès les premiers signes d’infestation (piégeage, observation visuelle). Au stade larvaire comme à l’état adulte, A. limonicus chasse ses proies ou attend leur passage à l’affût pour les attaquer par surprise, en les perçant et en aspirant leur contenu corporel.
Toxicité de substances actives : A. limonicus se montre très sensible (avec une mortalité de 75 % et plus) à certaines substances actives phytosanitaires, telles que l’abamectine et les pyréthrinoïdes de synthèse (lambda-cyhalothrine, tau-fluvalinate). Il est sensible (mortalité de 50 à 75 %) au spinosad. Il l’est moyennement (25 à 50 % de mortalité) au boscalid, au krésoxim-méthyl, au flonicamide, à l’indoxacarbe, au pirimicarbe. Il s’avère peu ou pas sensible (avec une mortalité inférieure à 25 %) à l’acéquinocyl, à l’azadirachtine A, au bifénazate, au chlorantraniliprole, au cyantraniliprole, au fluopyram, à l’hexythiazox, à l’imazalil, à la maltodextrine, au myclobutanil, au pyriproxyfène, au spiromésifène.
Cycle, conditions de développement
Morphologie
- Adulte : huit pattes, corps plat allongé en forme de gouttelette, blanc translucide à beige rosé, de 0,4 mm de long. On constate un dimorphisme sexuel, les mâles étant plus petits que les femelles.
- Œuf : forme ovale, transparent ou blanc, 0,14 mm de diamètre.
- Larve : six pattes, corps blanc comme l’œuf, mais un peu plus grand.
- Nymphe (protonymphe, deutonymphe) : huit pattes, jaunâtres, de taille intermédiaire entre les larves et les adultes.
Observation : on peut suivre A. limonicus sur le terrain à l’aide d’une loupe de poche grossissant huit à dix fois, principalement sur la face inférieure des feuilles et le long des nervures principales. Mais le fait qu’il soit très mobile, à la recherche active de proies, et que sa couleur se confonde parfois avec celle des tissus végétaux le rend difficile à repérer. De plus, il est impossible de le distinguer d’Amblyseius andersoni, A. swirskii, Neoseiulus cucumeris et N. californicus, car ces acariens phytoséiides sont trop semblables sur le plan morphologique. Toujours au revers des feuilles, on peut détecter les œufs d’A. limonicus fixés sur les poils de la plante.
Cycle biologique : le cycle de développement complet se déroule en cinq stades : œuf, larve, protonymphe, deutonymphe, mâle et femelle adultes. À 25 °C, celles-ci peuvent pondre trois à quatre œufs par jour. Le ratio de femelles est de 60-70 %. Les œufs sont sensibles à une faible hygrométrie. Seulement 50 % éclosent à 70 % d’humidité relative dans l’air. Cependant, le microclimat qui règne au niveau du feuillage sur des plantes qui sont arrosées régulièrement peut suffire à satisfaire leurs besoins.
Conditions d’utilisation : insensible à la diapause, A. limonicus peut être utilisé tout au long de l’année sous abri, y compris dans une serre froide à des températures relativement basses, jusqu’à 13 °C. À une température de 10 °C, son développement reste possible, mais le cycle biologique de l’œuf à l’adulte prend plus d’un mois. Il faut compter quinze jours à 15 °C, dix à 20 °C, six à 25 °C et quatre à 30 °C. Au-delà, les acariens arrêtent d’évoluer. Avant de lâcher A. limonicus dans une serre, il est essentiel de déterminer le niveau d’infestation de thrips, d’aleurodes ou d’acariens phytophages pour ajuster la dose d’apport à la pression biotique.
Les nymphes et adultes d’A. limonicus sont commercialisés dans des bouteilles ou flacons de 1 litre contenant 12 500 individus, qui sont conditionnés dans du son, de la sciure ou des boules de millet. Avant de répartir minutieusement les acariens prédateurs sur les feuilles des végétaux, il convient de secouer la bouteille avec précaution pour homogénéiser la population. Il est également important de ne pas travailler dans les cultures dans les heures qui suivent l’introduction pour permettre leur installation dans les meilleures conditions. Précisons que cet auxiliaire a une espérance de vie courte et doit donc être introduit dans la culture le plus vite possible après réception, sinon son efficacité potentielle peut être affectée. Dans le cas où un stockage est nécessaire, la bouteille se conserve un à deux jours au maximum après réception, à une température ambiante de 12 à 14 °C, à l’obscurité et dans un lieu suffisamment aéré.
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