Heterorhabditis bacteriophora : nématode entomopathogène
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SPECTRE D’EFFICACITÉ ET CULTURES ENVISAGÉES
Proies : Heterorhabditis bacteriophora est un nématode endoparasite obligatoire d’insectes dit entomopathogène, qui héberge dans son tube digestif Photorhabdus luminescens, une bactérie symbiotique létale pour les insectes parasités, mais inoffensive pour l’homme, les animaux à sang chaud et les plantes. On l’utilise en biocontrôle contre certains ravageurs des cultures, dont des larves de coléoptères (charançons noirs, chrysomèles, otiorhynques, doryphore de la pomme de terre, vers blancs de hannetons – phylloperte horticole ou hanneton des jardins Phyllopertha horticola, hoplie floricole ou hanneton argentéHoplia philanthus, hanneton de la Saint-Jean Amphimallon solstitiale, hanneton commun Melolontha melolontha, hanneton bronzé Anomala dubia, scarabée japonais Popillia japonica (organisme de quarantaine prioritaire dans l’Union européenne), hannetons Serica brunnea, autres hannetons Anoxia villosa… –, mais aussi des chenilles de lépidoptères (telles que carpocapses, hépiale du muguet ou petite hépiale du houblon, tordeuses, vers gris de la noctuelle baignée Agrotis ipsilon).
Principales cultures concernées :des pépinières ou plantations d’arbres et arbustes, toutes les cultures ornementales en production horticole ou dans les jardins (et en particulier les végétaux sensibles aux otiorhynques : Astilbe, Aucuba, Azalea, Bergenia, Camellia, Chamaecyparis, Euonymus, Forsythia, Fuchsia, Geranium, Heuchera, Hydrangea, Prunus laurocerasus, Rhododendron, Sedum, Taxus, Tiarella…), muguet, gazons de graminées dont les greens de golfs et autres pelouses sportives, fraisier, toutes plantes fruitières ou légumières.
Comportement : H. bacteriophora est un vers filiforme, incolore, d’une très petite taille. Sous une forme résistante, il se maintient dans la couche superficielle du sol ou du substrat de culture jusqu’à la rencontre d’un hôte. Cet auxiliaire agit en maraude, recherchant activement sa proie pour la parasiter grâce à la détection de composés volatils émis par l’insecte cible. Ce nématode est donc très efficace pour le biocontrôle des organismes nuisibles à faible mobilité.
Endoparasite, il pénètre dans son hôte par les orifices naturels, puis va libérer des bactéries entomopathogènes qui, grâce à l’émission de toxines, se propagent dans le corps de l’insecte et entraînent sa mort par septicémie en 24 à 48 heures. Sous l’action des composés bactériens, le corps de l’hôte devient gluant et se liquéfie ou se dessèche, passant du brun clair à une couleur brun rougeâtre ou rouge foncé. Les tissus de l’hôte se transforment en nutriments facilement assimilables par les larves du nématode. Cette dépouille sert ensuite d’abri pour la multiplication des Heterorhabditis, pouvant engendrer une deuxième génération, elle-même capable de parasiter d’autres proies.
Efficacité : si H. bacteriophora connaît quelques ennemis naturels susceptibles de limiter son efficacité, les facteurs les plus déterminants pour sa survie et sa croissance sont l’humidité, qui doit être suffisante pour assurer la mobilité des larves infestantes, la texture-structure et la température du sol ou du substrat. Le nématode affectionne particulièrement les sols bien drainés, à pH neutre ou légèrement alcalin. Sa survie est de courte durée dans les terrains argileux, saturés en eau et humifères. Il est performant entre 14 et 30 °C, mais peut supporter des valeurs allant de 12 à 35 °C. Bien que sensible au gel, une partie de la colonie peut endurer des températures négatives. La dynamique de population dépend aussi de la quantité d’hôtes disponibles, elle-même tributaire de pratiques culturales telles que la rotation ou le travail du sol. En cultures de plein champ, l’existence d’H. bacteriophora n’excède généralement pas un an, mais si les larves terricoles cibles sont nombreuses, la longévité peut s’étendre à deux ans. Lorsque aucun hôte n’est présent, la demi-vie d’une population est de 25 jours à 8 °C. Pour être pleinement efficace, le traitement avec H. bacteriophora doit être positionné de façon précise par rapport au cycle biologique de l’insecte hôte (stade larvaire), dans des conditions d’humidité et de température du sol appropriées. Par exemple, une intervention en pépinières contre l’otiorhynque s’effectue généralement en septembre-octobre (jeunes larves) ou bien en mars-avril (larves âgées), selon les régions. Pour obtenir un résultat optimal, la surface du sol ou du substrat doit être humectée avant et dans les jours qui suivent l’application. Le nématode étant sensible à la lumière (UV), il est également préférable de traiter le soir, jamais en plein soleil.
CYCLE, CONDITIONS DE DÉVELOPPEMENT
Morphologie : malgré son corps filiforme d’une longueur inférieure au millimètre, donc invisible à l’œil nu, H. bacteriophoraest considéré comme un macro-organisme auxiliaire de biocontrôle, par opposition aux micro-organismes encore plus petits (champignons, bactéries, virus).
Cycle biologique : H. bacteriophora possède un stade adulte femelle hermaphrodite, autofertile, permettant la réalisation d’un cycle de développement complet aux dépens d’une larve d’insecte cible pendant 10 à 14 jours, selon les facteurs environnementaux. Chaque hermaphrodite peut pondre jusqu’à 200 œufs dans le corps d’un hôte. Après l’éclosion, se succèdent quatre stades larvaires (L1, L2, L3, L4). Selon la ressource alimentaire disponible, à savoir la taille de l’insecte infecté, soit les femelles hermaphrodites pondent leurs œufs à l’intérieur des larves d’insectes, soit les premier et second stades larvaires se développent directement à l’intérieur du nématode femelle adulte. Ces jeunes larves vont alors se transformer en mâles et femelles adultes qui se reproduisent sexuellement, puis les mâles meurent.
Les larves de troisième stade (il s’agit de nématodes juvéniles infectieux fournis dans les produits de biocontrôle) sont les seules capables de survivre hors de l’hôte, car elles ne s’alimentent pas, mais utilisent les nutriments stockés dans leur propre corps. Ces jeunes larves pénètrent dans l’hôte par les orifices naturels et par la cuticule car, contrairement à d’autres nématodes auxiliaires comme Steinernema spp., elles possèdent une dent dorsale. Leur nombre est parfois très élevé. Par exemple, une larve hôte de grande taille d’otiorhynque de la vigne et du cyclamen (Otiorhynchus sulcatus) peut ainsi héberger plusieurs milliers de nématodes de troisième stade. Dans la mesure où ces juvéniles transmettent des bactéries entomopathogènes, le ravageur est rapidement intoxiqué et se transforme en nourriture pour les nématodes, qui passent ainsi au quatrième stade larvaire à l’intérieur de l’insecte mort. Ils donnent par la suite une génération d’adultes hermaphrodites ou se conservent dans le sol sous une forme de résistance jusqu’à la rencontre d’un nouvel hôte.
Conditions d’utilisation : le traitement insecticide de biocontrôle est réalisé en pleine terre ou en culture hors sol, sous abri ou en plein air. Chaque produit commercial formulé est livré dans un support inerte, notamment de nature argileuse, et nécessite un stockage au froid. Il contient, par exemple, 86 % d’ H. bacteriophora et 14 % de support inerte. On peut se procurerauprès d’un distributeur les conditionnements suivants : cinq millions de nématodes (un sachet dans une boîte), 50 millions (un sachet dans une boîte), 500 millions (deux sachets de 250 millions dans une boîte), 2 500 millions (dix sachets de 250 millions dans une boîte). Pour la mise en œuvre du traitement, il faut préparer une bouillie en mélangeant le produit à de l’eau selon les recommandations de la notice technique. L’ajout d’un adjuvant (par exemple, à base de triglycérides éthoxylés 10 OE) peut améliorer l’efficacité. Le traitement doit être réalisé immédiatement après la préparation, soit avec un pulvérisateur motorisé ou non, soit directement dans le système d’irrigation.
Jérôme JullienPour accéder à l'ensembles nos offres :