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“L'éducation à l'environnement est un enjeu majeur”

Arrivé au service des espaces verts de Besançon en 1995 comme objecteur de conscience, Johnny Magnenet a travaillé en lien avec l'Atelier permanent d'initiation à l'environnement urbain (APIEU) pour lancer « La petite école dans la forêt » avant de mettre en place de nouveaux projets au sein de la ville...PHOTO : CÉCILE CLAVEIROLE

Johnny Magnenet, qui dispose d'une mission « gestion des espaces naturels » au service des espaces verts de Besançon (25), organise la relation entre les humains et les espaces naturels avec des animations permettant la découverte de ces espaces dédiés à la nature et de toute leur richesse.

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Dès les années 1990, le souci de la qualité écologique était présent à la direction des espaces verts de Besançon. Utiliser les bons outils de gestion pour avoir des espaces fonctionnels tout en maintenant les milieux en bon équilibre écologique était déjà la règle.

Une maison pour l'éducation à l'environnement.

Cette ville du Doubs possède plus de 2 000 hectares de forêts, dont 1 630 hectares en un seul massif dans la forêt de Chailluz, en bordure nord. Dès 1978, un plan de gestion forestière a conforté les différents usages constatés dans ce lieu périurbain : accueil du public, production de bois et espace naturel protecteur de biodiversité. La forte fréquentation par les Bisontins a porté la nécessité de sensibiliser la population au bon comportement de chacun pour que puissent cohabiter les diverses utilisations dans des attitudes adaptées au milieu naturel.

Parallèlement, les bâtiments communaux du hameau des Grandes baraques ont été réhabilités en salle d'accueil polyvalente dans le cadre du projet de La petite école dans la forêt. Initié en 1992, ce dispositif d'éducation à l'environnement et au développement durable (EEDD) est un outil au service de tous les porteurs de projet dans ce domaine : enseignants, responsables de centre de loisirs, formateurs et animateurs de tous poils. Un comité de pilotage pédagogique valide l'ensemble de l'action en lien avec l'Éducation nationale, la DREAL (Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement), les techniciens des espaces verts, les techniciens forestiers et de l'ONF. « On rencontre les enseignants ou les porteurs de projet pour définir ce qu'ils veulent faire. Les animations ont lieu à la journée : le matin est consacré à une activité avec l'animateur de La petite école dans la forêt, l'après-midi en autonomie. La forêt communale est le support des animations autour de thèmes comme l'arbre vivant, le travail en forêt, les fruits sauvages, le rôle des insectes, les traces d'animaux... On accueille de 3 000 à 4 000 enfants tous les ans et des groupes d'adultes », explique Johnny Magnenet, chargé de mission « gestion des espaces naturels » au service des espaces verts. D'autres projets se tournent davantage vers le milieu urbain : les insectes auxiliaires, la biodiversité, les continuités socio-écologiques, les imbrications ville-nature, les mosaïques de milieux variés, sont autant de sujets permettant d'aborder la réalité de la résilience des milieux.

« L'éducation et la sensibilisation à l'environnement constituent des enjeux majeurs pour Besançon qui crée l'occasion de vivre avec la nature pour prendre conscience de sa fragilité. Et il est important de faire évoluer la vision de l'espace vert afin de bien faire comprendre qu'il s'agit d'un milieu vivant. »

Dans le même temps, le programme « Nature et Culture » est proposé à tous les publics. Son objectif est lui aussi de créer du lien entre la population et la nature. « Nous jouons sur les partenariats, explique Johnny Magnenet. Nous travaillons avec le jardin botanique de la ville, le Conservatoire des espaces naturels de Franche-Comté, et avec les associations locales. » Des animations originales sont proposées, comme « Les inattendus », spectacles en plein air, montés avec La petite école dans la forêt et une compagnie théâtrale locale, avec une approche artistique pour parler de la nature autrement.

Vergers et pelouses dans l'inconscient collectif.

Deux autres angles de protection de la nature sont mis en valeur : les pelouses sèches et les vergers. Besançon est bâtie dans les méandres du Doubs, rivière majestueuse qui a creusé ces reliefs calcaires en laissant de vastes collines parfois abruptes. Autant d'espaces privilégiés pour les pelouses sèches, milieux ouverts qui se développent sur des sols superficiels où la roche affleure. Ces pelouses sont très riches en espèces végétales et animales spécifiques, notamment les insectes. Un plan de gestion a été établi par le Conservatoire des espaces naturels de Franche-Comté, confirmant le diagnostic de la richesse de ces endroits mais aussi de leur fragilité. Un partenariat a été conclu avec un éleveur local, afin de faire pâturer 24 hectares de pelouses sèches, avec un suivi scientifique réalisé par le Conservatoire. L'éleveur est autorisé à faire pâturer ses chèvres sur les pelouses, mais doit respecter un cahier des charges. Il peut participer aux opérations de débroussaillage ou aux animations pédagogiques et perçoit des indemnités. Le but est qu'il gère son activité économique de manière autonome et viable. Tous les ans, de 800 à 1 000 personnes participent à la transhumance des chèvres sur les pelouses, au printemps.

Pour les vergers, la démarche est légèrement différente. Il s'agit d'impliquer plus encore la population au maintien de ces milieux diversifiés. « Les vergers font appel à un côté émotionnel, sensible, lié à l'inconscient collectif. Ils font partie des paysages traditionnels de la ville, car vergers et vignes ont toujours été présents sur ces coteaux. Le message que nous voulons faire passer, c'est que le verger doit être cultivé. Il est le fruit de la relation entre l'homme et la nature », note Johnny Magnenet. Vergers individuels ou collectifs, le souhait est de réhabiliter les plus anciens, de créer une dynamique de gestion, et de valoriser les espaces abandonnés. Restaurés sur des terrains communaux, certains vergers ont été confiés à l'association locale des Jardins et vergers familiaux ou aux Jardins de Cocagne qui en assurent le suivi et la gestion. Un ancien verger en friche est géré en partenariat avec un lycée agricole privé qui, par de petites interventions de débroussaillage et de mise en lumière du site, favorise la structuration paysagère et son évolution vers plus de diversité écologique.

Les espaces privés de Besançon ne sont pas en reste.

Une plaquette a été éditée à destination des propriétaires afin de les sensibiliser à la nécessité de la gestion. Ceux qui le souhaitent peuvent, à titre expérimental, la confier à la ville, qui restaure ou replante, et à une association pour une utilisation collective. Toutes les combinaisons sont possibles, du moment que les arbres sont suivis et les espaces entretenus dans un esprit de préservation de la biodiversité. « La qualité paysagère et écologique n'est pas forcément identifiée par la population. Nous cherchons à lui faire prendre conscience de sa valeur et à la mettre en lumière. Faire vivre aux habitants des moments agréables en développant les intérêts écologiques, ça fonctionne plutôt bien et ça donne du sens à l'espace ! », reconnaît Johnny Magnenet. Dans ce même esprit, les murets en pierres sèches et les cabottes, anciennes cabanes de vigne et de verger, sont en cours de restauration.

Une gestion écologique globale.

La direction des espaces verts gère aussi 110 hectares d'espaces naturels et 200 hectares de forêt sur ces collines qui encadrent la ville, sur lesquels serpentent 75 km de sentiers balisés de randonnées. « Le travail engagé permet de développer des approches qui pourraient être poursuivies en milieu urbain : accompagner la prise de conscience de la biodiversité, faire accepter que l'espace vert public soit le support d'autre chose que la seule esthétique, et responsabiliser les habitants dans leur rôle d'acteur. » Telle est la réflexion de Johnny Magnenet. Et c'est aussi l'ensemble de la direction des espaces verts qui évolue vers plus d'écologie globale. La recherche du « zéro phyto », par exemple, pousse à réaliser des essais de paillages différents : fibres de chanvre, plantes couvre-sol locales ou horticoles vivaces, comme les fraisiers ou la pétasite. La fauche tardive permet de tester des structurations paysagères utilisant l'herbe haute comme élément paysager. « Nous essayons sans cesse de trouver l'équilibre entre l'impact visuel et la pertinence écologique et de trouver la pertinence de la juste intervention. La réflexion est en cours de construction : quand faucher et pourquoi. »

Parallèlement il est nécessaire de communiquer, d'expliquer les changements. La gestion des arbres en taille douce est réalisée ici depuis longtemps, y compris le maintien des arbres creux offrant des espaces de nichoirs pour les oiseaux. Le choix des variétés à la plantation est primordial, pour tailler le moins possible. « On peut encore améliorer la strate arbustive, choisir des espèces locales et les gérer en port libre. On laisse aussi des tas de bois par endroits, qui sont des refuges pour les animaux. Et dans les nouveaux espaces, on réfléchit pour ne pas figer les choses, pour rester ouverts à la demande de la population », poursuit Johnny Magnenet.

Cécile Claveirole

Les vergers font partie des paysages traditionnels de la ville. Avec les vignes, ils ont toujours été présents sur ces coteaux.

PHOTO : VILLE DE BESANÇON

Dans le parc Micaud, sur les bords du Doubs, les arbres morts sont conservés car ils abritent une diversité d'animaux.

PHOTO : CÉCILE CLAVEIROLE

Les murets en pierres sèches et les cabottes, anciennes cabanes de vigne et de verger, sont en cours de restauration.

PHOTO : VILLE DE BESANÇON

Les pelouses sèches sont pâturées pour maintenir le milieu ouvert. Un partenariat a été conclu avec un éleveur local qui respecte un cahier des charges.

PHOTO : VILLE DE BESANÇON

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