“Vendre du bambou, du conseil et de l'accompagnement !”
Simon Crouzet dirige les Pépinières de la Bambouseraie d'Anduze, dans le Gard. Le positionnement de l' entreprise sur des créneaux commerciaux porteurs soutient son développement. Une nouvelle unité de production a été récemment implantée près de Nîmes.
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Selon l'enquête présentée au Salon du végétal d'Angers en partenariat avec La Lettre du végétal, le bambou occupe la quatrième place au palmarès des plantes préférées des Français, plébiscité par 11 % de nos concitoyens. Loin derrière les rosiers (plantes préférées de 22 % des Français) ou des orchidées (20 %), juste derrière l'olivier ( !) qui recueille 12 %, mais devant les palmiers (8 %) ou le camélia (7 %)...
Certes, l'âge d'or de cette famille végétale est en partie derrière elle, des plantations mal conçues, dans des jardins mal protégés, et des espèces à rhizomes traçants ayant rafraîchi l'enthousiasme de jardiniers pas toujours avertis.
Le potentiel des bambous, leur résistance à la sécheresse, aux maladies et aux ravageurs leur conservent néanmoins de belles perspectives d'avenir. Suffisamment, en tout cas, pour justifier la création, début 2009, par les Pépinières de la Bambouseraie d'un nouveau site de production aujourd'hui opérationnel.
– En 2000, quand Simon Crouzet a racheté à ses parents l'activité pépinière, les affaires n'étaient pas aussi florissantes : « Lorsque mon père m'a appelé pour me proposer de reprendre une partie des activités familiales, j'avais 27 ans. J'aurais pu choisir la Bambouseraie. Le jardin disposant d'une très bonne notoriété et d'une assise financière confortable, cela aurait été la solution de facilité. J'ai préféré reprendre la pépinière, par affinité et par défi... pour prouver que je pouvais mener un projet d'entreprise. » À l'époque, la pépinière ne vendait qu'aux entreprises du paysage, aux collectivités et à une seule enseigne de jardinerie. La commercialisation auprès du grand public n'était pas à l'ordre du jour. « Nous avons fait le choix de rester sur le marché du professionnel, poursuit le jeune chef d'entreprise. Mais nous avons orienté l'activité vers le marché des jardineries. » Avec quelques précautions : « Il n'était pas question de vendre des bambous à des jardineries dont les vendeurs auraient été insuffisamment formés. En général, ceux-ci ne connaissent que trois ou quatre espèces, et un défaut de conseil peut entraîner des erreurs propres à décourager les jardiniers et, à moyen terme, à nuire au développement du marché. » Dont acte. Les jardineries ont été soigneusement sélectionnées.
L'entreprise a par ailleurs continué à enrichir son catalogue de nouveautés. Celui-ci compte aujourd'hui une centaine de taxons.
– Le développement des Pépinières de la Bambouseraie a aussi été mené sur le terrain. En 2001, l'entreprise était constituée de deux unités. L'une destinée à la production, à Anduze, en périphérie de la Bambouseraie. L'autre, basée au Portugal, au sud de Lisbonne. Sur 40 hectares, la première unité était affectée à la multiplication des bambous traçants et cespiteux, et produisait près d'un million de conteneurs chaque année. Mais il était nécessaire de produire davantage, d'agrandir les surfaces de production, et le terrain manquait. En 2005, un partenariat a été mis en place avec l'entreprise Agrumes de Méditerranée, à Tiercé (49), dirigée par Frédéric et Sandrine Sérusier, pour assurer la production et la diffusion de la gamme au nord de la France.
Une parcelle d'une trentaine d'hectares a par ailleurs été achetée à une dizaine de kilomètres d'Anduze. Yves Crouzet, le père de Simon, y a semé des bambous pour vendre des jeunes pousses d'espèces comestibles. Le succès n'ayant pas été au rendez-vous, cette parcelle a été utilisée pour les pieds mères de bambous et d'érables du Japon. Elle a également permis de fournir des cannes vendues en frais à des décorateurs ou à des paysagistes, ou bien en sec. Mais l'essentiel de la surface (25 hectares) était en culture et seuls 5 hectares étaient disponibles. Cette solution s'avérait donc insuffisante.
– En 2007, Simon Crouzet s'est mis en quête d'un terrain répondant à des exigences très précises. Il ne devait pas être trop éloigné du siège social, être situé dans une zone non inondable (les inondations sont fréquentes dans la région et celles de septembre 2002 ont laissé un souvenir douloureux au site d'Anduze), bénéficier d'un apport d'eau disponible et de qualité, et être d'un prix abordable.
Ces critères ont orienté les recherches vers la plaine gardoise, où le canal du Bas-Rhône apporte de l'eau bon marché en grande quantité.
Un domaine a été trouvé à quelques kilomètres au sud de Nîmes, à une altitude suffisante pour être à l'abri des « débordements » cévenols, capables d'apporter plusieurs centaines de millimètres de pluie en quelques heures, en particulier en automne. Le site de 20 hectares était planté de kiwis en production, protégés du mistral par des haies coupe-vent constituées de cyprès. Il était idéalement placé, à proximité de l'entrée de l'autoroute A 54 qui relie Nîmes à Arles. Mieux encore, l'arrivée du TGV – le tronçon Nîmes- Montpellier passera à proximité de la propriété – prévue dans les prochaines années a entraîné une décote importante des terrains limitrophes, qui a rendu possible l'acquisition d'une telle propriété. L'achat du terrain s'est concrétisé fin 2008 : « Le banquier est venu me rencontrer le jour de la chute de la banque américaine Lehman Brothers, ce qui n'a pas contribué à accélérer la prise de décision », confie Simon Crouzet. Mais les travaux d'aménagement ont finalement pu commencer en 2009...
– Aujourd'hui, 6 hectares sont plantés en culture de bambous, le reste est toujours en production de kiwis, en partenariat avec un producteur local. Mais ces surfaces constituent une réserve de terrain stratégique pour les prochaines années. Des filets « brise-vent » et des haies de bambous géants ont été installés pour protéger les rangées de conteneurs, des chemins ont été tracés et empierrés : « Ce n'est pas bitumé, comme en Italie, mais cela permet de bien circuler », estime le chef d'entreprise. Cette nouvelle unité de production, située à une heure de route environ du siège d'Anduze, doit permettre à l'entreprise d'assurer pleinement son avenir et le développement du chiffre d'affaires, actuellement autour de 3 millions d'euros, en améliorant fortement la réactivité au niveau logistique. Un objectif qui doit être atteint en continuant à élargir la gamme à partir du jeune plant produit au Portugal, mais aussi « en poursuivant le maillage de revendeurs locaux, des pépiniéristes ou des entreprises du paysage qui revendent les plantes localement aux particuliers, conclut Simon Crouzet. Et il reste aussi un potentiel de développement important auprès des clients professionnels ».
– L'entreprise réalisait, par le passé, quasiment la moitié de son chiffre d'affaires à l'export. En raison du départ à la retraite d'agents commerciaux, mais également de la crise économique, certaines positions ont été perdues et l'activité ne représente actuellement que 30 % du chiffre d'affaires, un recul compensé par le développement du marché français. La reconquête de certains pays du nord de l'Europe est prévue pour 2012-2013.
Quant à la concurrence de l'Italie, Simon Crouzet estime qu'elle est supportable « pour peu que l'entreprise assure la vente de bambous, mais conseille et accompagne aussi ses clients dans la durée, et propose un suivi sur site et une garantie de reprise de douze à dix-huit mois selon les projets ». Un concept de mise en place de plantes en magasin clés en main a été imaginé. Il permet d'optimiser les ventes dans les jardineries.
Dans ce contexte, les perspectives semblent effectivement intéressantes...
Pascal Fayolle
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