" Robotique et informatique au service de la production "
Cédric Lambert dirige depuis trois ans la pépinière Pep'Seed à Beaufort-en-Vallée (49). Pour la prod uction de porte-greffes et de semences, il n'hésite pas à tester de nouvelles solutions technologiques pour faciliter la gestion de son entreprise.
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C'est en visitant les Terrenales, salon de l'agriculture écologiquement intensive basé dans le Maine-et-Loire, que Cédric Lambert a découvert Oz. Développé par la start-up toulousaine Naïo Technologies (31), le petit robot de travail du sol a séduit le jeune agriculteur passionné de technologies. Non content d'adopter un équipement nouvelle génération dès son installation, il n'a pas non plus hésité à opter pour un logiciel de gestion récemment mis sur le marché. En mettant la robotique et l'informatique au service de la production, Cédric Lambert, qui dirige depuis trois ans son entreprise à Beaufort-en-Vallée (49), souhaite ainsi rationaliser au maximum son travail. Pep'Seed produit des porte-greffes pour arbres fruitiers et les semences potagères.
> Oz désherbe seul les 3,5 ha de pépinière en trois jours. Son autonomie varie de 4 à 11 heures selon les travaux effectués avec une batterie lithium nécessitant 4 à 6 heures de recharge. Pour le producteur, les possibilités offertes compensent l'investissement - 22 000 € sans GPS et 42 000 € avec GPS -. Selon son calcul, le robot lui permettra d'économiser environ 30 000 € par an, soit l'équivalent d'une personne à plein temps dédiée au désherbage. « Ce qui prend le plus de temps, c'est de savoir ce dont il est capable, et ce dont il a besoin pour bien faire. » Cédric Lambert a compris qu'il lui fallait adapter l'environnement à son robot. Ainsi, « sa polyvalence est appréciable mais le terrain doit être plat sinon il bascule. » Autre contrainte, dans le cas de l'emploi du guidage laser : la parcelle doit être parfaitement rectangulaire, et le bout de champ propre. En effet, en bout de rang, le capteur ne détectant plus la culture, le robot effectue un demi-tour ; si le bout du rang est encombré, le robot est « perdu ». Il peut également prendre un brin d'herbe pour un obstacle. La hauteur du capteur doit être réglée en fonction des plants qu'il est censé détecter. Et si le sol est en pente, il s'arrête... Bref, autant de caprices qui ne rendent pas le guidage laser très pratique !
Outre le guidage laser, Oz peut être guidé à l'aide d'une caméra (cependant, le soleil pose parfois problème) ou d'un GPS encore à l'essai. « Avec ce dernier, la différence est incommensurable : il y a beaucoup moins de surveillance par rapport au laser. » La planteuse du jeune homme possède un système GPS qui établit une cartographie de la parcelle dont les données sont ensuite transmises au robot.
> Oz n'est pas encombrant : il mesure 40 cm de large sur 100 cm de long et 60 cm de haut, et pèse 150 kg. Sa garde au sol est de 7 cm. Il avance entre les rangs de culture à 1,3 km/h équipé d'outils différents (proposés en option), selon la tâche qu'on lui confie : herse étrille, bineuse, brosse, siège, remorque... Sa puissance (24 V x 100 Ah) lui permet de porter 90 kg et tracter 300 kg (sans travailler le sol en même temps). De sorte que, outre le binage sur les cultures de pépinière et semences potagères, le pépiniériste l'utilise pour la plantation des jeunes plants et l'aide à la récolte en se faisant tirer sur un chariot roulant de son invention.
Après un essai sur son site de production, Cédric Lambert a décidé d'acquérir l'équipement sous la forme d'une location longue durée avant l'achat. Grâce au Plan de compétitivité et d'adaptation des exploitations agricoles (PCAE) 2015-2020, qui prévoit des aides aux alternatives au désherbage chimique, il a obtenu 20 % d'aides sur le montant total du robot (22 000 €). Le jeune agriculteur a ainsi mécanisé toute sa production : la plantation, la récolte et le désherbage, qu'il effectue à l'aide d'une bineuse, de traitements chimiques et avec Oz.
> Avant de s'installer après un bac pro agricole, un BTS semences (obtenu à l'Esa d'Angers), un certificat de spécialisation (CS) machinisme et un CS informatique, le pépiniériste a voyagé un an en Australie (dont 7 mois de stage) et eu plusieurs expériences professionnelles (Monsanto, Terrena). En 2015, il a racheté l'exploitation agricole (500 000 €), puis traversé une année difficile en 2016 suite à la diminution des contrats de semences. Malgré tout, il a investi rapidement dans l'achat d'un système GPS pour ses tracteurs (20 000 € + 5 000 € par tracteur), s'est lancé dans l'essai du robot de Naïo qui venait à peine d'être commercialisé et opté pour un logiciel de gestion agricole tout juste mis sur le marché également. « Ekylibre gère presque tout : la production, les stocks, la commercialisation (achats, ventes), la comptabilité, les clients, les fournisseurs, les salariés. Seule la gestion de la paie est effectuée par un cabinet comptable. Par exemple, à partir du stock de semences, le logiciel peut anticiper l'achat d'un sac de semences. Il garde en mémoire l'étiquette pour assurer la traçabilité (gestion électronique des documents) et peut remonter différentes informations : sur quelle parcelle les semences ont été semées, avec quel matériel, à quel coût à l'hectare... Toutes les données sont liées entre elles. »
Les mises à jour du logiciel sont automatiques. Il existe une version gratuite mais les fonctionnalités sont loin d'être aussi efficaces (pas d'export comptabilité, limite de stockage...). Le jeune producteur a choisi la version Premium à 29,90 € par mois. « Soit un prix de revient à 1 800 € sur cinq ans, lorsqu'un logiciel de gestion agricole classique coûte 22 000 € avec les mêmes fonctionnalités. »
> Les données sont stockées chez Ekylibre : elles sont accessibles de partout, même du tracteur. Le logiciel fonctionne pour n'importe quelle culture. « Mais pour la mise en place, il est nécessaire de bien poser les choses, bien paramétrer les plans comptables du logiciel et ceux du cabinet comptable. » Par conséquent, la première année d'utilisation, la mise en place est plutôt chronophage. « Mais la deuxième année, Ekylibre m'a permis de diviser le temps papier par deux, puis par quatre. » Selon les fondateurs d'Ekylibre (voir encadré), l'indice de masse administrative (IMA) d'un agriculteur représente à l'heure actuelle 500 heures/an.
Petit plus, depuis le Sival 2018, Naïo et Ekylibre travaillent ensemble dans le cadre de la « Ferme digitale », pour que les données GPS de Naïo puissent être exploitées par Ekylibre. « L'idée de la Ferme digitale est que toutes les start-up soient interopérables. »
« À terme, j'aimerais être en mesure d'enregistrer les travaux prévisionnels dans le logiciel afin que l'ensemble des opérations soient anticipées et budgétées : besoin en trésorerie, achat de phytosanitaires, achat d'engrais... avec l'établissement d'une liste de fournitures qui serait envoyée en deux clics sur la plateforme Agriconomie (*) pour pouvoir effectuer la commande depuis l'ordinateur. »
> « Le logiciel a le défaut de ses qualités : comme il peut tout faire, il faut prendre le temps de comprendre comment il fonctionne. De plus, en ligne, l'ouverture d'un document met trois secondes. » Le logiciel est en constante évolution : calcul du prix de revient à la culture (et non pas seulement à la parcelle, car il peut y avoir plusieurs cultures par parcelle), intégration de la déclaration PAC et des plans de fumure...
Une application mobile (pour téléphone portable) est actuellement en développement : « Elle est bien pensée mais il manque encore de nombreuses fonctionnalités. Par exemple, la planification marche bien : les salariés reçoivent sur leur téléphone les tâches qu'ils doivent réaliser. Mais l'application n'indique pas le matériel disponible quand une intervention est programmée (binage...). »
Valérie Vidril
(*) Site e-commerce spécialisé dans la vente d'engrais, de semences et de matériel agricole.
Oz est guidé selon trois procédés : à l'aide d'un laser, d'une caméra qui détecte les plantes, ou d'un GPS. La planteuse possède un système GPS qui établit une cartographie dont les données sont transmises à Oz. PHOTO VALERIE VIDRIL
Différents outils peuvent être adaptés à l'arrière du robot : herse étrille, bineuse, brosse, siège, remorque... PHOTO VALERIE VIDRIL
Cédric Lambert a choisi de travailler avec Ekylibre, un logiciel de gestion d'exploitation gérant à la fois l'administratif, la production, la comptabilité... en ligne via ordinateur, mobile et tablette. Le logiciel a permis au pépiniériste de gagner quatre fois plus de temps en trois ans. PHOTO PEP'SEED
Les porte-greffes sont issus de pieds-mères ou de semis. La plantation s'effectue en février, les semis en septembre et la récolte entre novembre et janvier. PHOTO VALERIE VIDRIL
Le désherbage s'effectue à l'aide d'une bineuse (pendant 2 mois), de traitements chimiques (Cent 7) et d'un petit robot. PHOTO VALERIE VIDRIL
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