La palette végétale en quête de diversité
Les universités du Conservatoire des collections végétales spécialisées (CCVS) ont permis de croiser les regards autour d’une question d’actualité, la diversification des plantes utilisées.
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Pour leur deuxième édition, les universités du Conservatoire des collections végétales spécialisées (CCVS) se sont déroulées à Nantes (44) les 2 et 3 septembre derniers. Quoi de plus logique que d’y réunir les collectionneurs et amateurs de botanique, au regard de l’histoire et du patrimoine de cette collectivité, mais aussi de la récente nomination de Jacques Soignon – ancien directeur du service des espaces verts et de l’environnement de la Ville – à la vice-présidence du CCVS ?
Nantes abrite deux collections nationales agréées CCVS, l’une de camélias (abritant 1 200 taxons, dont 24 botaniques), l’autre de magnolias (618 taxons, 29 espèces, 10 taxons intraspécifiques, 525 cultivars), sans oublier les nombreux parcs où les plantes rares sont mises en valeur ainsi que le jardin botanique.
Le thème proposé pour ces deux jours d’échanges et de visites, « La diversité végétale au cœur du projet de paysage », visait à faire réfléchir sur les outils et les stratégies à mettre en œuvre afin de renforcer cette diversification. Actuellement, elle est considérée comme la démarche la plus adaptée pour établir une résilience des jardins vis-à-vis du changement climatique et, plus largement, des territoires face aux enjeux de sécurité alimentaire, de santé, de cohésion sociale ou encore de biodiversité.
Pour la présidente de l’association, Françoise Lenoble-Prédine, les collections CCVS (387 au total) ont un formidable rôle à jouer, car elles constituent un vivier riche de milliers de taxons où il est possible de puiser pour s’adapter aux différents contextes. Deux tables rondes, l’une ayant pour thème « Végétal et adaptations », l’autre sur « Sauvage ou cultivé, le choix de l’exotisme ? », ainsi que les exposés de « grands noms » de la botanique et du paysage – Michel Péna, Cassian Schmidt, Véronique Mure, Gilles Clément –, ont permis d’aborder la question sous différents angles, celui du botaniste, du gestionnaire de collections, du producteur, du concepteur-paysagiste ou encore de la recherche appliquée.
Partager et diffuser
Il en ressort un consensus sur la nécessité de ne pas être dogmatique, en imposant systématiquement le recours à des végétaux sauvages locaux. Ceux-ci ne peuvent pas répondre à toutes les situations dans le contexte de changement rapide des milieux, en particulier pour les espèces ligneuses. Pour autant, leur utilisation est considérée comme un atout pour renforcer la plasticité de la réponse des plantes dans un environnement en mutation et pour la préservation des milieux naturels fragiles. Leur diversité génétique intraspécifique est un atout important. L’observation des plantes dans leurs milieux naturels est par ailleurs intéressante pour comprendre les associations qu’elles développent et les usages qu’on pourrait en faire dans les aménagements urbains. Dans ce cas, les champs d’investigation peuvent être élargis du fait d’une compétition moins forte que dans la nature.
Autre point de convergence, la nécessité d’améliorer le partage des connaissances, celles acquises au travers de programmes de recherche appliquée – l’une des missions phares de l’institut technique du végétal en ville Plante & Cité – mais aussi celles rassemblées au sein des jardins botaniques, arboretums et autres collections. L’un des outils clés de Plante & Cité est la base de données Floriscope qui, en plus des données autécologiques sur les végétaux et les lieux de production, développe actuellement une nouvelle fonctionnalité sur les habitats. Enfin, tous s’accordent sur le besoin de progresser dans le tissage des liens entre concepteurs, producteurs et collectionneurs. Un message que Marie Levaux, la présidente de la Fédération nationale des producteurs de l’horticulture et des pépinières (FNPHP), invitée par le CCVS, entend bien relayer auprès de la profession.
Un programme de recherche appliquée transposable
Parmi les programmes de recherche appliquée contribuant à progresser sur la diversification végétale, « Arbre de demain pour les villes méditerranéennes », lancé en 2019 par l’Inrae Villa Thuret d’Antibes, l’association PaysSages, Hortis et l’AITF – déjà évoqué dans un précédent numéro* – avance. Une première liste d’une cinquantaine d’espèces potentiellement intéressantes pour les aménagements urbains locaux a été établie. Elle distingue les essences selon leur utilisation actuelle et la disponibilité en pépinière : espèces déjà utilisées à encourager, celles peu utilisées à promouvoir, celles innovantes, disponibles dans les collections, à tester à plus grande échelle. Certains autres critères sont également précisés comme, par exemple, la résistance à la sécheresse, un critère de sélection devenu désormais incontournable .
La prochaine étape est de développer des partenariats afin de tester in situ cette palette, mais également de transposer la démarche à d’autres régions climatiques et ainsi créer un réseau sur le territoire national. Au-delà de la recherche d’une nouvelle gamme de plantes, il s’agit pour les pilotes du projet de travailler sur la notion de biotope d’avenir, à même de créer des milieux de vie favorables au développement du végétal en ville. Une approche qui fait écho au travail mené depuis deux décennies par le paysagiste allemand Cassian Schmidt**.
Yaël Haddad
*Le Lien horticole n° 1102 de janvier-février 2021, p. 26-27.
**À retrouver dans une prochaine édition.
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