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Belgique : des producteurs aux difficultés économiques très similaires !

La rencontre en avril dernier de professionnels de l’horticulture de la région de Gand, en Flandre, a montré une inquiétude très semblable à celle de leurs homologues français.

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Fin avril, à l’occasion du lancement des Floralies gantoises, les producteurs belges de la région­ de Flandre vivaient au rythme des actualités internationales. S’ils restaient somme toute confiants, personne ne cachait les difficultés rencontrées.

Ainsi, chez Greentraders, à Zele, Bert De Martelaer, responsable commercial export, constatait « un certain ralentissement, dans un marché du végétal toujours porteur ». Cette société du groupe De Vlieger compte dix-sept salariés pour un chiffre d’affaires de 3,5 millions d’euros. Elle propose plus de 200 variétés d’arbres­ aux paysagistes, collectivités, groupes forestiers… surtout en Belgique, mais le tiers de la production est exportée en Europe. Celle en propre s’étend sur 55 hectares répartis en deux sites, avec en moyenne 2 500 arbres/ha plantés tous les cinq ans, la culture durant dix ans avant leur commercialisation. Afin de proposer un large choix (Carpinus, Quercus, Fagus, Salix, etc.), elle achète 80 % de son assortiment. Avec une centaine de salariés, le groupe, fondé en 2020 pour chapeauter les différentes activités, décline toute une offre de services en matière d’aménagement et d’entretien des espaces verts. Si cette diversification assure l’avenir, Bert De Martelaer anticipe une hausse d’au moins 10 % de ses prix de vente cette année et se dé­sole de la situation en Ukraine.

En effet, l’inquiétude croît avec la hausse des prix de l’énergie, qui ont doublé en cinq ans en Belgique, affectant les coûts de production. Depuis le 24 février, outre les pertes humaines sur place, la guerre pèse fortement sur tous les acteurs économiques dans cette région flamande qui employait de la main-d’œuvre agricole saisonnière tout en exportant ses productions horticoles vers le pays.

Inquiétudes quant aux boutures

C’est avec une émotion non contenue que Rudy Raes, producteur de jeunes plants et obtenteur-multiplicateur de plantes à massif à Destelbergen, confirme les difficultés rencontrées. Connu pour ses variétés de primevères et ses cultivars de surfinias pour les professionnels, primé à IPM Essen pour la Primula acaulis ‘Zebra Blue’ et encore ce 1er mars au Salon belge Florall avec la dernière-née, Primula acaulis ‘Rubens’ An­tique, il prévoyait des cuves de stockage de précaution supplémentaires afin de chauffer ses 43 000 m² de serres, pour faire face tant aux risques de ruptures d’approvisionnement que de surcoûts. Sans oublier des stocks suffisants de boutures, notamment de Streptocarpus, réalisées en interne, afin d’éviter les blocages d’approvisionnement.

Quant au chiffre d’affaires de 8 millions d’euros, l’entreprise table sur son maintien avec, en dépit des incertitudes, une progression du marché et une évolution des prix qui n’est pas encore déterminée pour le printemps 2023.

Autres produits, autres marchés... mais aussi des difficultés et de l’inquiétude : « La demande est en baisse pour tous les produits de pépinière sauf en arbres fruitiers, dont le marché croît toujours depuis trois ans », relevait Marc De Troy, dirigeant de la pépinière du même nom, à Wetteren. Avec 80 % de son chiffre d’af­faires réalisé à l’export vers la France pour les fruitiers, le producteur sait de quoi il parle et prévoit d’ores et déjà d’augmenter son offre dans ce domaine. L’entreprise familiale de six salariés en saison fournit les jardineries depuis 1992 avec un catalogue de plantes cultivées sur 16 ha de pleine terre et 3,5 de conteneurs.

Des fournitures bloquées

Les jeunes plants de pommiers, cerisiers ou encore de poiriers, achetés aux Pays-Bas, sont plantés en pleine terre, greffés sur place puis conduits pendant trois ans avant leur mise en pot afin d’offrir des sujets robustes et bien racinés. Cinquante variétés sont ainsi disponibles toute l’année en 6 l ou plus, avec une production annuelle de 250 000 conteneurs. Une quarantaine de taxons de conifères et d’autres arbustes d’ornement sont toujours cultivés, mais devraient diminuer à l’avenir.

Un constat partagé par Koen Van Poecke : « La demande ralentit et nous avons des difficultés pour obtenir de nouveaux produits en jeunes plants, tandis que les graines­ de Taxus baccata manquent en raison de la sécheresse en Allemagne », remarque le cogérant de la pépinière du même nom, située aussi à Wetteren.

L’entreprise familiale y cultive sur 54 ha une gamme de plantes de haies, de conifères nains et différentes espèces d’ar­bustes ornementaux en conteneurs, ainsi qu’une grande variété de Taxus baccata en pleine terre, rempotés au bout de deux ans puis vendus en pot plastique de couleur. Plus chers de 20 %, certes, mais davantage adaptés selon lui aux ventes en jardineries. Prudent, le producteur avait commandé ses fournitures pour couvrir les deux ans à venir et pallier le manque de pots plastique et la hausse des prix engendrés par la crise de Covid-19, qui continue de désorganiser les filières d’approvisionnement.

En effet, le nouveau confinement décrété par la Chine fin avril à Shanghaï (toujours en vigueur début juin) lui donne raison. Avec le blocage du port d’exportation, de nombreuses matières premières et fournitures n’arrivent plus, au nombre desquels les matériels végétaux.

Ce que confirme Baptiste Wilbaux, responsable commercial de Deroose Plants, à Laarne. Le groupe de 800 collaborateurs à l’échelle mondiale, dont 450 à Shanghaï pour la multiplication, est spécialisé dans la recherche, le développement et la production de variétés in vitro destinées aux professionnels, tant en plantes ornementales – Ficus, tillandsias, calathéas, Syngonium, Alocasia, cordylines ou cannas – que pour les filières agricoles. Pas moins de 50 millions de plants sont vendus par an pour un chiffre d’affaires de 35 millions d’euros (+ 10 % en 2021). Même si le marché des plantes d’intérieur décroît, estime ce professionnel, l’entreprise se lance dans un nouveau créneau­ grand public avec une boutique en ligne, Unique Tropique, surtout destinée à écouler la gamme de tillandsias.

Isabelle Cordier

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