Le potager Une passion à développement durable
La gamme des plants potagers est devenue en quelques années l'un des secteurs majeurs qui soutient l'activité de printemps. Simple mode ou tendance lourde ? L'avis d'un sociologue et les résultats d'une enquête BVA indiquent que le phénomène s'installe durablement.
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Interrogé dans le cadre d'une réflexion menée par Gamm vert, le sociologue chercheur au CNRS Jean-Claude Kaufmann (*) est formel : « Le jardinage est avec la cuisine une des deux plus grandes passions qui se développent en France. C'est une nouvelle nécessité psychologique de notre époque. Pour oublier le stress, les soucis ordinaires. Et si possible atteindre un degré supérieur en créant quelque chose de nos propres mains. C'est pourquoi le plaisir de faire soi-même est si souvent invoqué. Car il s'agit ni plus ni moins de réaliser une oeuvre. Le terme loisir me paraît d'ailleurs bien fade pour rendre compte de toute cette intensité existentielle. Je préfère personnellement parler de passion. »
Cette passion devrait se prolonger car, loin d'un plaisir solitaire, le jardinage serait relié à des aspirations très profondes décryptées par le sociologue. « Si la création est individuelle, le but ultime est en fait l'amour du groupe : que la famille ait du plaisir et soit en bonne santé. En réalisant ses petits exploits horticoles, le jardinier ne pense pas qu'à lui. Il est soutenu par cette perspective morale qui lui donne encore plus l'envie d'agir. La même réflexion pourrait Cette passion devrait se prolonger car, loin d'un plaisir solitaire, le jardinage serait relié à des aspirations très profondes décryptées par le sociologue. « Si la création est individuelle, le but ultime est en fait l'amour du groupe : que la famille ait du plaisir et soit en bonne santé. En réalisant ses petits exploits horticoles, le jardinier ne pense pas qu'à lui. Il est soutenu par cette perspective morale qui lui donne encore plus l'envie d'agir. La même réflexion pourrait être faite à propos des économies. Excepté pour les milieux les plus modestes, c'est rarement la raison première qui pousse à avoir un jardin potager. Mais elle est très souvent en arrière-plan, renforçant le désir d'action. On ne jardine pas pour une seule raison, mais pour un ensemble qui vont toutes dans le même sens. »
Une passion qui touche les femmes et les jeunes
Au-delà de la dimension de loisir passion, renforcée par la famille, la santé, les économies, Jean-Claude Kaufmann élargit la perspective en intégrant les préoccupations écologiques qui dominent actuellement la réflexion sociétale. « Avoir son jardin pour soi, aller y récolter des fruits ou des légumes pour les manger le jour même, est un peu comme la réalisation très concrète d'une utopie. Un petit paradis vert, à la portée de main. »
À l'occasion du lancement de sa « Fête du potager » du 13 au 23 avril 2011, Gamm vert a demandé à BVA de sonder les Français sur l'activité du potager. Un tiers entretiennent un potager et la majorité de ceux qui n'en détiennent pas rêvent d'en posséder un. Une activité portée par les jeunes générations et les femmes. 31 % des Français possèdent un potager dans leur jardin, 17 % sur leur terrasse ou sur leur balcon. Et cette activité fait de nouveaux adeptes chaque jour car plus d'un potager sur quatre a aujourd'hui moins de cinq ans. Cette envie d'avoir un petit coin pour cultiver ses fruits et légumes est très présente chez les femmes (52 %) mais également chez les jeunes générations : 66 % des 15-34 ans. Pour 91 % des Français, la volonté d'entretenir un potager est avant tout une histoire de plaisir, seul 8 % des détenteurs d'un potager perçoivent l'entretien de celui-ci comme une contrainte.
Moment de détente personnel et solitaire (66 %), envie de se retrouver soi-même, les raisons de cultiver son jardin sont nombreuses. Néanmoins, 40 % voient cette culture comme un moment de partage avec leur famille et leur proche, une très bonne façon de transmettre !
Un Français sur six cultive des légumes ou des plantes aromatiques sur son balcon ou sur sa terrasse. 67 % des heureux propriétaires d'un potager y consacrent au moins une demi-journée par semaine et 30 % au minimum deux heures hebdomadaires. Le potager devient un nouvel espace de vie pour retrouver le plaisir du « faire soimême » et du « manger frais et sain ». Maîtriser la qualité et l'origine de ses aliments est la première motivation invoquée à près de 66 %.
Le sondage révèle aussi les autres préoccupations des détenteurs de potager qui sont celles de manger sain à 55 % et de retrouver le vrai goût des fruits et des légumes (53 %). Cette envie de manger sainement motive d'ailleurs davantage les jeunes générations car ils sont 67 % des 15-34 ans à déclarer vouloir manger sain. Les jardinières sont les plus attachées à la qualité de leurs produits à près de 60 %. 90 % des fruits et légumes récoltés sont ensuite consommés dans les jours suivants la récolte et 60 % des détenteurs d'un potager ont recours à la surgélation. Mais cultiver son jardin c'est aussi l'occasion pour 60 % d'entre eux d'offrir à leurs proches des fruits et légumes frais, preuve du retour à l'authenticité. 39 % déclarent détenir un potager pour faire des économies tout en mangeant sainement. Cette raison est notamment très forte chez les jeunes.
Francis Ginestet
(*) Spécialiste de la vie quotidienne et de la thématique de l'identité, Jean-Claude Kaufmann, qui a publié une vingtaine d'essais, travaille notamment dans le cadre de ses recherches au CNRS sur la socialisation.
Pour le sociologue Jean-Claude Kaufmann, la réalisation d'un potager peut très facilement passer du domaine du loisir au registre de la passion. PHOTO : HANOTEAU
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