Un jardin pour la « e-génération »
Les jeunes jardiniers – âgés de 20 à 30 ans – ont une approche des plantes et du jardinage qui diffère de celle de leurs aînés. Connectée, écolo et sans contraintes...
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À la génération des « baby boomers » a succédé la génération « du millénaire » ou « génération Y », née entre 1980 et 2000. Les études sociologiques ou marketing lui prêtent différentes caractéristiques : mobile, « connectée », écolo... La comprendre permet de proposer des produits qui répondent à ses attentes. Au cours de la deuxième « International Home Garden Conference » organisée par Fleuroselect à Leiden (Pays-Bas), en septembre dernier (1), les quelque soixante-dix-neuf participants – semenciers, imprimeurs, sélectionneurs – de quinze pays ont d'ailleurs débattu autour de la question : « Comment atteindre la jeune génération ? »
Une « e-génération » qui oblige à rester connecté
Cette génération Y ou « e-génération » a grandi avec l'informatique grand-public, la téléphonie mobile, la photo numérique, le GPS... Elle en a une maîtrise presque « intuitive ». Ces jeunes n'hésitent pas à faire usage de leur appareil mobile lorsqu'ils font du shopping : pour se « géolocaliser », prendre des renseignements en scannant un QR Code ou un flashcode, profiter d'offres promotionnelles... Ils sont très attachés aux médias sociaux. LinkedIn, Facebook ou encore Twitter peuvent faciliter la communication avec ces futurs consommateurs. Une publicité en ligne accrocheuse, une vidéo humoristique ou étonnante – placées sur YouTube par exemple – que les « Millénaires » se partagent avec leurs amis constituent certainement des outils de marketing plus aptes à les toucher que les spots télévisés traditionnels. Vilmorin vient ainsi de lancer sa chaîne TV sur Youtube.com, et propose des vidéos pédagogiques pour les jardiniers. Les jeux sociaux en ligne, prisés par les jeunes, constituent une autre porte d'entrée pour éveiller leur intérêt. Intervenir dans les forums ou sur les blogs spécialisés dans le jardinage en apportant un avis de professionnel peut permettre de faire connaître ou reconnaître son expertise auprès du grand public, et ainsi inciter les internautes à s'intéresser à sa gamme. Cette pratique parfois chronophage est toutefois à double tranchant, les commentaires négatifs se propageant aussi vite que les avis positifs sur la toile. À l'inverse, la « e-génération » peut aider l'entreprise à développer de nouveaux produits et idées via le crowdsourcing (2), comme le souligne Daphne Medik (DMM Communication, Pays-Bas), experte en médias sociaux.
Écolos à la recherche de sens
Les « Millénaires » ont grandi en même temps que s'accentuait la prise de conscience écologique. Ils seront nombreux à tenir compte de l'impact environnemental d'un produit, que ce soit en termes de biodégradabilité, de conditions de production, de répercussion sur la faune ou le paysage. Ils sont sensibles également à l'aspect social ou solidaire. Ces deux dimensions rejoignent une tendance de consommation générale, qui ne se limite pas à la seule « génération Y ». Selon l'enquête « Consommation » 2011 du Credoc (3), la crise pourrait remettre en cause le modèle d'hyperconsommation. Cela « se traduira par une recherche accrue de sens et de valeurs dans la consommation. Il s'agira sans doute d'acheter plus utile, parfois moins, mais surtout mieux, en privilégiant par exemple les produits locaux et écologiques, et en développant de nouveaux modes de consommation (...) davantage centrés sur les services rendus par le produit et moins sur la possession de l'objet lui-même. » Les vertus du végétal en termes de bien-être, les possibilités qu'il offre de personnaliser une décoration... sont des atouts à mettre en avant.
De nombreux amateurs se sentent intimidés devant les rayonnages des jardineries spécialisées et leur manque de connaissances en la matière leur apparaît comme un obstacle insurmontable à la pratique du jardinage. Certes, ces « anxieux » appartiennent à tous les groupes d'âge, mais les jeunes, plus que quiconque, n'ont souvent ni le temps, ni l'expérience, ni l'espace pour jardiner. « Rendre le jardinage plus facile » a été identifié par les participants de la conférence « International Home Garden » comme un point clé pour attirer les jeunes et les consommateurs les moins confiants. Ils se sont fixés comme objectif la promotion d'un jardinage amusant, facile et économique, travail mené par un « Home Gardening Group » qui sera constitué au sein de Fleuroselect. La campagne de communication Val'Hor pour le premier semestre 2012, « Design by nature », cherche également à toucher une clientèle plus jeune que les acheteurs habituels : « L'interprofession doit redonner confiance à cette cible et dédramatiser l'acte d'achat d'un végétal d'ornement, prenant notamment le contre-pied des notions de “contrainte”, voire de “culpabilisation” associées aux arbres, aux plantes et aux fleurs. »
Jardiner sans contraintes
Les produits et services mettant en valeur la simplicité d'utilisation parleront aux jeunes jardiniers inexpérimentés. L'obtenteur Ball met en pratique ce concept avec sa marque « Simply Beautiful ». Qu'ils soient expérimentés ou non, de plus en plus d'amateurs souhaitent profiter des joies du jardinage sans en supporter les contraintes : avoir de beaux légumes « à coup sûr », profiter d'un jardin fleuri et arboré sans passer son temps à traiter ou à tailler, s'allonger sur la pelouse sans avoir à ressemer à chaque printemps... Des concepts apparaissent pour lui assurer des résultats à la mesure de ses attentes : semis simplifié (bandes, disques ou tapis présemés) ; gamme de plants potagers Premium de Clause combinant rendement, résistance aux maladies et qualités gustatives... La nouvelle gamme de semences de minilégumes proposée par Le Paysan depuis décembre – des variétés naturellement naines « faciles à semer, récolter et cuisiner » – répond à cet égard aux « nouveaux modes de consommation alimentaire qui privilégient les repas à picorer et la praticité ».
Les plantes « sans entretien », rustiques et résistantes ont la côte, de même que les équipements au design fonctionnel, ou les concepts pour petits espaces : arbustes de petites dimensions, arbres fruitiers colonnaires, carrés potagers, conteneurs souples, minibassins... Les plants potagers, plus que les plantes ornementales, ont pris le virage de la tendance au « minijardin ». La gamme « Les légumes de mon balcon » lancée par Vilmorin propose des variétés de semences potagères et aromatiques adaptées à la culture en pot ou jardinière, un activateur de croissance « 100 % naturel pour une réussite assurée » et des contenants spécialement conçus pour les balcons, « souples, légers et faciles à ranger ».
Le terme de « jardinage » ne répond peut-être plus à l'évolution des pratiques. Le végétal quitte le jardin, en particulier le potager : les plantes s'immiscent dans les moindres recoins de l'habitat, du balcon jusque sur la table de la salle à manger ou le mur du salon ; les pièces à vivre – comme la cuisine – sortent de l'espace intérieur... La plante ornementale n'est plus seulement esthétique, elle devient multifonctionnelle : un fraisier peut offrir une jolie floraison, puis quantité de bons fruits, un rosier offrir ses pétales en salade, des aromates en pot décorer le centre de la table... Les amateurs jardinent les espaces publics, en se lançant dans des « guérillas jardinières » et en cultivant des parcelles négligées dans les zones urbaines. Bref, avec la nouvelle génération, le jardinage sort des sentiers battus.
Valérie Vidril
(1) La troisième édition se tiendra en septembre 2012 à Venlo, Pays-Bas. (2) Le crowdsourcing consiste à faire appel aux connaissances de la population, des internautes en général, pour résoudre un problème ou effectuer une tâche. Wikipédia ou le réseau Tela Botanica sont des exemples de sites faisant appel au crowdsourcing. (3) Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie.
Garantir le résultat. Ici, une promesse propre à attirer les jeunes citadins : « Fais-moi pousser et mange-moi ». PHOTO : FRANCIS GINESTET
Accompagner le quotidien. Pour toucher la « génération Ikéa », le végétal doit se transformer en élément de décoration intérieure. PHOTO : VALÉRIE VIDRIL
S'adapter aux mini-espaces. Vilmorin a sélectionné dix variétés de semences adaptées à la culture en pot ou jardinière. PHOTO : VILMORIN
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