Login

Pas si antiques, les plantes aromatiques !

Pour développer les ventes, Arom'antique prévoit la création d'un jardin de présentation pour montrer aux clients les différents types d'aménagements possibles, les diverses utilisations des aromatiques, la variété des collections...

Marché de niche il y a encore quelques années, les aromatiques sont aujourd'hui dans l'air du temps. Une bonne nouvelle pour des pionniers collectionneurs comme l'entreprise Arom'antique, dans la Drôme, à condition de toujours faire évoluer la gamme et les modes de commercialisation.

Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.

Laurent Bourgeois a créé la pépinière Arom'antique il y a vingt ans, à Parnans (26). Il a choisi de se spécialiser dans les plantes aromatiques avec une spécificité vers celles d'origine médiévale. En vingt ans, il a beaucoup travaillé sur cette gamme, aidé au départ par une historienne qui a bénéficié pendant trois ans d'une bourse d'étude de la région Rhône-Alpes. Pour ses travaux de recherche, elle s'est inspirée de documents ou d'écrits du Moyen Âge, comme ceux laissés par Hildegarde de Bingen. Cet investissement a permis de répertorier bon nombre d'espèces connues à cette époque. Certaines sont encore largement utilisées de nos jours, la sarriette ou la marjolaine par exemple. D'autres ont par contre peu à peu été oubliées, comme la rue, l'aurone ou la tanaisie. L'enjeu, pour ce passionné, a été de les retrouver et de savoir où les dénicher. Si les jardins botaniques et les pépiniéristes ont été de précieux alliés, la flore sauvage lui a également offert la possibilité de redécouvrir plusieurs végétaux. Par exemple, le calament sylvestre, - venu récemment enrichir la gamme suite à la demande particulière d'un client -, est une espèce très présente dans la flore locale... Cette gamme de plantes médiévales reste, comme toute collection, marginale en termes de commercialisation, mais elle est primordiale au niveau de la communication. Grâce à ces végétaux, l'entreprise s'est fait un nom, notamment dans la presse spécialisée consacrée au jardin. Et aujourd'hui, elle peut se démarquer face à une offre grandissante, les aromatiques étant devenues un produit en vogue depuis environ une dizaine d'années.

La culture biologique, un atout supplémentaire

Autre spécificité d'Arom'antique : le choix d'une culture longue, sans forçage, en serre froide ou hors gel. « Cet aspect est très important pour les clients. Nous pouvons leur assurer une reprise quasi certaine dans leur jardin », explique Laurent Bourgeois. La majeure partie des plants est commercialisée en godet de 9. Pour les vivaces, les godets vendus au printemps totalisent entre neuf et douze mois de culture en partant de la bouture, et près de quinze à seize mois pour les ventes d'automne. « C'est cette qualité qui nous différencie des circuits de vente traditionnels. Même pour des espèces couramment disponibles, comme du basilic, nos clients préfèrent passer leurs commandes chez nous, parfois à un prix plus élevé et éventuellement avec des frais de port en plus en cas de vente par correspondance. » La culture biologique est un atout supplémentaire. Dès le départ, Laurent Bourgeois a fait le choix d'une production sans pesticides et sans engrais chimiques, mais son entreprise n'est certifiée bio que depuis cinq ans. « Cultiver en bio était pour moi un choix évident pour des plantes comestibles. Mais dans les années 1990, afficher clairement un label bio pouvait à mon avis freiner les clients éventuels, ce qu'une société encore fragile ne pouvait pas se permettre économiquement. Mis à part pour quelques inconditionnels, le bio n'était pas un argument de vente. Au contraire, certains clients fuyaient ces producteurs, se basant sur des préjugés. Aujourd'hui, les choses ont heureusement bien évolué ! »

Et pour lutter contre les maladies comme l'oïdium ou les rouilles, une grande rigueur est nécessaire en matière d'arrosage. « Nous consacrons beaucoup de temps à l'observation. Chaque matin, il faut se rendre dans toutes les serres pour repérer les plantes infectées. On dispose de quelques produits comme le soufre pour agir contre l'oïdium, mais le simple fait de tailler régulièrement les plantes, comme les menthes, suffit très souvent à éliminer tout début de maladie. »

Que les aromatiques soient cultivées ou non en bio, leur principal débouché reste celui des foires aux plantes qui représentent encore 45 % du chiffre d'affaires de ce secteur. Arom'antique participe à quarante-deux d'entre elles chaque année : vingt-huit au printemps entre mi-mars et mi-juin (souvent deux voire trois par week-end) et quatorze en automne entre septembre et octobre. Ce nombre n'a pas varié depuis dix ans. L'entreprise se déplace dans toute la France (Bretagne, Alsace, région parisienne, sud du pays...). Le chiffre d'affaires moyen réalisé au cours de ces manifestations (1 600 euros) cache de grandes disparités : de 200 euros pour des foires peu connues ou en cas de mauvaises conditions météo et jusqu'à 6 000 euros certains printemps pour celles de Courson-Monteloup (91) ou Saint-Jean-de-Beauregard (91). « Elles sont nettement moins intéressantes économiquement en automne, les jardiniers préférant généralement planter au printemps. Mais nous tenons à rester présents pour entretenir la relation avec nos clients. »

Insignifiante il y a cinq ou six ans, la vente par correspondance constitue aujourd'hui 30 % du chiffre d'affaires et son volume grandit de 5 % chaque année. « Nous vendons u n i q u e m e n t par internet. La difficulté a été de nous faire connaître sur ce type de support. Depuis la création du site Aspeco (Association pépiniéristes collectionneurs, NDLR) en 2008, et plus récemment en 2012, du site de vente Plante Web, nous sommes beaucoup mieux référencés au niveau des moteurs de recherche. La vente via internet a pris son envol à ce moment-là. Travailler en commun avec d'autres producteurs crée une synergie. Chacun apporte ses idées et ses connaissances pour améliorer cet espace, renseigner les fiches des plantes. Les personnes les plus compétentes en informatique proposent des formations aux autres membres. L'enjeu majeur d'un site de vente est d'être bien référencé, ce qui nous oblige à intervenir constamment sur cet outil », poursuit Laurent Bourgeois.

Développer les ventes sur place et les ventes aux professionnels

La création d'un jardin de présentation au sein de l'entreprise est l'un des objectifs d'Arom'antique. Les clients pourront y découvrir les différents types d'aménagements possibles, les diverses utilisations des aromatiques et la diversité des collections. Grâce à ce projet, assorti d'un espace de vente spécifique (en cours d'aménagement), Laurent Bourgeois espère développer la vente sur place, qui ne représente en 2013 que 2 ou 3 %.

Autre objectif à moyen terme, démarcher les jardineries de la région pour booster les ventes en gros qui, si on comptabilise les paysagistes, les collectivités, les jardineries et quelques revendeurs sur les marchés, se limitent actuellement à 15 à 20 % du chiffre d'affaires, essentiellement sur une gamme classique.

Faire évoluer ces deux derniers modes de distribution devrait permettre à la société drômoise de poursuivre sa croissance sans devoir y consacrer trop de temps. Si sur l'ensemble de l'année, 40 % du temps est dédié à la commercialisation, du mois de mars à celui de juin, c'est plus de 80 %. Les foires aux plantes sont très gourmandes en temps entre la vente proprement dite, la préparation et les déplacements. Et au retour, il y a la gestion des commandes internet (préparation, emballage, expéditions). L'organisation de la production, notamment la multiplication et les empotages, tient compte de ces impératifs (voir l'encadré ci-dessus). Les différentes constructions et les travaux d'aménagement ne peuvent guère se faire que durant l'hiver.

Aujourd'hui, la pépinière propose près de 400 espèces et variétés d'aromatiques (propriétés médicinales, culinaires, parfum original ou esthétiques). Laurent Bourgeois estime avoir fait le tour des plantes médiévales. Il s'efforce de proposer des gammes adaptées aux différentes régions de l'Hexagone, comme des espèces de thyms résistantes aux conditions humides de la région parisienne ou du nord de la France (Thymus nitens, Thymus roegneri, Thymus comosus). Et pour rester présent dans la presse spécialisée, le pépiniériste doit régulièrement mettre en avant des plantes originales, à l'instar de la verveine d'Argentine présentée en 2010, et il doit également anticiper les modes. « La menthe chocolat, inconnue il y a quelques années, se vend aujourd'hui comme des petits pains. L'an passé, nous en avons manqué. Par contre, cette année, avec près de mille exemplaires en culture, nous risquons d'avoir des invendus car, comme toute plante en vogue, on la retrouve sur beaucoup d'étalages », souligne Laurent Bourgeois. Être les premiers à présenter une nouvelle plante permet, outre le coup de projecteur publicitaire, d'avoir une longueur d'avance sur ses concurrents...

Claude Thiery

ProductionLe pépiniériste Laurent Bourgeois a axé sa production sur des cultures longues assurant « une reprise quasi certaine ».

GammeL'entreprise dispose de 400 espèces ou variétés d'aromatiques. L'objectif est de décliner des gammes régionales.

FoiresChaque année, la pépinière drômoise participe à 42 foires aux plantes qui lui assurent un revenu moyen de 1 600 euros.

CommandesLa vente par correspondance, par internet exclusivement, assure à Arom'antique 30 % de son chiffre d'affaires annuel .

A découvrir également

Voir la version complète
Gérer mon consentement