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Analyse des risques phytosanitaires Elle s'adresse aussi aux producteurs

La protection biologique intégrée des cultures ornementales dépend de l'évaluation des risques phytosanitaires propres à chaque exploitation horticole, selon la fréquence et la gravité des bioagresseurs, ainsi que de la sensibilité des plantes hôtes aux différents stades des étapes de production.

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L'analyse des risques phytosanitaires (ARP) officielle, dirigée par les pouvoirs publics, permet de fixer des mesures de lutte à l'encontre des maladies, ravageurs et plantes adventices les plus nuisibles, principalement à cause de leur impact potentiel d'ordre économique et/ou environnemental. Cette méthodologie peut s'avérer très utile pour tout professionnel intéressé par la protection intégrée en horticulture florale ou en pépinière ligneuse ornementale. Elle s'appuie sur un diagnostic fiable des bioagresseurs et un examen de leur nuisibilité à tous les stades de la production. Cette information est disponible au niveau régional dans les bulletins de santé du végétal (BSV).

1 UNE MÉTHODOLOGIE AU SERVICE DE LA PBI.

Dans une exploitation horticole ou une pépinière ornementale, l'ARP est simplifiée. Elle vise à garantir la qualité sanitaire des végétaux, en privilégiant les actions préventives.

Un premier inventaire permet de répertorier les parasites récurrents, variables selon les sensibilités spécifiques ou variétales des plantes cultivées, l'origine du matériel végétal, les stades phénologiques et les milieux et systèmes de culture. À cette liste s'ajoutent les organismes nuisibles émergents et/ou réglementés, dont l'introduction et la dissémination sont proscrites. En cas de suspicion d'un tel organisme nuisible (nématode des bulbes et des tiges Ditylenchus dipsaci, Tomato Spotted Wilt Virus, rouille blanche du chrysanthème sur pieds mères, boutures et jeunes plants, phytopte du fuchsia, Phytophthora ramorum...), le signalement auprès du SRAL (Service régional de l'alimentation) est obligatoire pour analyse et gestion de foyer. L'ARP nécessite une bonne connaissance des couples « plante hôte/parasite » les plus préoccupants qui existent au sein de l'exploitation, ainsi qu'une capacité de diagnostic phytosanitaire. Elle est renforcée par des éléments de biologie, d'épidémiologie et de lutte raisonnée recueillis par une bibliographie, des résultats d'expérimentation et/ou l'appui de structures de conseils techniques. Cette approche liminaire est fondamentale dans la mise en oeuvre de la protection biologique intégrée (PBI).

2 DES RISQUES PHYTOSANITAIRES PARTICULIERS.

En productions horticoles, l'institut technique horticole Astredhor a recensé environ 210 maladies et 270 ravageurs principaux. De plus, l'intensification des échanges commerciaux expose sérieusement les cultures ornementales aux invasions biologiques. On peut d'ailleurs constater qu'une multitude de parasites inscrits sur les listes d'alerte de l'OEPP (Organisation européenne et méditerranéenne de protection des plantes) concernent potentiellement les plantes horticoles, parfois en lien avec des cultures légumières ou fruitières (cynips du châtaignier, mouche du brou de la noix, bactériose de l'Actinidia, Phytophthora ramorum sur myrtillier...). À cet égard, les situations où les végétaux d'ornement côtoient des plants fruitiers, légumiers ou aromatiques sensibles aux mêmes bioagresseurs constituent des milieux propices aux risques épidémiologiques.

3 ADAPTER LA SURVEILLANCE ET ÉVALUER LES RISQUES.

La filière horticole est complexe et recèle de nombreuses particularités au sein des entreprises : milieux de culture (plein air ou sous abri, pleine terre ou hors-sol), techniques culturales (subirrigation, goutte-à-goutte ou aspersion, recyclage de l'eau, pincements, tailles...), etc. En conséquence, même si un schéma général peut donner les grandes lignes de l'ARP, chaque producteur doit réaliser lui-même ce travail en l'adaptant aux caractéristiques et aux objectifs de son entreprise (voir l'encadré). Les priorités concernent les bioagresseurs générateurs de traitements, ainsi que les parasites réglementés de lutte obligatoire. Grâce à cette hiérarchisation, les professionnels identifient les points de vigilance et, le cas échéant, interviennent à bon escient. Une ARP bien réalisée permet de limiter la pression parasitaire en amont et de réduire les coûts de production.

4 LES SEUILS PHYTOSANITAIRES EN PRODUCTIONS HORTICOLES.

Pour être acceptables, les interventions phytosanitaires doivent être raisonnées, ponctuelles et localisées. Partant de ce principe, tout producteur a besoin de repères pour prendre sa décision. C'est là qu'intervient la notion de seuil, une limite théorique au-dessous de laquelle un professionnel est censé ne pas intervenir. Cela dit, cette appréciation générale se réfère à un modèle standard. Elle doit être considérée comme un indicateur et adaptée dans la pratique aux caractéristiques de chaque exploitation selon les nombreux critères considérés dans l'ARP (voir le tableau).

5 LIRE LES BULLETINS DE SANTÉ DU VÉGÉTAL.

Observer régulièrement les végétaux. Les horticulteurs et pépiniéristes ont intérêt à lire régulièrement les bulletins de santé du végétal (BSV). Édités par les chambres régionales d'agriculture et consultables sur les sites des DRAAF (direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt), ils présentent une tendance des risques phytosanitaires à l'échelle d'une zone de production. Les BSV s'appuient sur un réseau structuré d'observateurs répartis sur le territoire, effectuant des relevés fréquents sur le terrain d'après des protocoles harmonisés au niveau national (voir le Guide d'observation et de suivi des organismes nuisibles et auxiliaires de lutte biologique en horticulture florale et pépinière ligneuse ornementale, 2012). Ces données brutes sont synthétisées par un animateur-filière qui tient compte des stades phénologiques, des paramètres climatiques, des facteurs de régulation et des seuils de nuisibilité (quand ils existent). Mais l'appropriation des informations épidémiologiques publiées dans les BSV ne se fait vraiment que si chaque professionnel peut les relier aux caractéristiques de son exploitation. Cette analyse, fine, exige une surveillance en parallèle des principaux bioagresseurs et auxiliaires.

6 QUATRE AXES STRATÉGIQUES POUR UNE ARP EFFICACE.

Pour une ARP des cultures ornementales efficace, les producteurs devront travailler autour de quatre axes stratégiques.

– Diagnostic : répertorier les couples plante hôte/bioagresseur les plus préoccupants au sein de l'entreprise, c'est-à-dire ceux qui doivent être suivis en priorité.

– Épidémiologie : élaborer un système d'observation à l'aide d'outils et de méthodes appropriés à l'analyse des risques phytosanitaires et recenser les populations d'auxiliaires.

– Traçabilité : enregistrer les suivis épidémiologiques et les signalements de foyers pour effectuer un bilan phytosanitaire en fin de campagne.

– Documentation : consulter de façon régulière les bulletins de santé du végétal sur les sites des DRAAF.

L'ARP s'inscrit parfaitement dans la stratégie de protection biologique intégrée déjà mise en oeuvre par de nombreux horticulteurs et pépiniéristes. C'est une démarche d'assurance qualité qui vise à mieux gérer les risques phytosanitaires. Elle s'avère souvent pertinente sur les plans technicoéconomiques et réglementaires.

Jérôme Jullien

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