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Les viornes

Phytophthora cinnamomi sur laurier-tin. Attention à ne pas confondre les symptômes avec une saturation en humidité ou un excès de salinité.PHOTOS : JÉRÔME JULLIEN

Les bioagresseurs les plus préjudiciables des viornes sont les phytophthoras, les pucerons et la galéruque. Une surveillance attentive en situations exposées permet d'agir avec efficacité sur les premiers foyers.

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PORTRAIT DE LA PLANTE

Le genre Viburnum, autrefois rattaché aux Caprifoliacées, appartient désormais à la famille des Adoxacées. Les viornes comprennent plusieurs espèces indigènes d'Europe, ainsi que des taxons originaires d'Asie occidentale et de nombreuses variétés horticoles. Ce sont des plantes rustiques, souvent ornementales, voire fruitières comme Viburnum lentago et V. trilobum qui produisent des petites baies comestibles. La gamme des viornes proposée en pépinières et jardineries est étendue. Plusieurs espèces telles que le laurier-tin (V. tinus) sont adaptées à la culture hors-sol, notamment en milieu urbain. En revanche, la viorne lantane (V. lantana) et la viorne obier (V. opulus), toutes deux spontanées en France, sauf en Bretagne et dans les Landes pour V. lantana, et rarement en région méditerranéenne pour les deux espèces, préfèrent les zones rurales pour s'épanouir. Les viornes sont multipliées par semis ou bouturage selon les espèces et variétés. Les graines des espèces pures (V. dentatum, V. lantana, V. lentago, V. opulus, V. rufidulum, V. trilobum...) nécessitent un nettoyage immédiat après la maturité, suivi d'une stratification. Cependant, le semis n'est recommandé que deux ans après la récolte, le temps pour la semence d'effectuer sa dormance. Quand cela est possible, la multiplication sexuée s'avère souvent meilleure que la reproduction végétative par bouturage (herbacé, yeux dormants, bois sec), marcottage ou greffage.

SENSIBILITÉS ENVIRONNEMENTALES

Il est important de tenir compte des exigences culturales des viornes, notamment du type de sol ou de substrat et de l'exposition par rapport au soleil. Le pH de sol varie d'une espèce de viorne à l'autre. Certaines prospèrent en terrain neutre ou basique, voire légèrement acide, comme V. lantana et V. opulus, tandis que d'autres réclament un sol acide, par exemple V. davidii et V. plicatum var. tomentosum. De nombreuses espèces, telles que V. carlcephalum, V. rhytidophyllum, V. tinus, V. x bodnantense, V. x carlesii, V. x hillieri, V. x burkwoodii, poussent bien dans un sol proche de la neutralité (pH 7). Lorsque le pH de sol optimal n'est pas respecté, il en résulte souvent une carence nutritive en oligoéléments se traduisant par une altération de la croissance, une décoloration des feuilles et une piètre floraison. La plupart des viornes sont héliophiles ou adaptées à diverses expositions, à l'exception de l'ombre persistante. En revanche, certaines espèces préfèrent la mi-ombre, comme V. davidii, V. plicatum et V. rhytidophyllum, ou la supporte très bien comme V. lantana et V. opulus. En cas de mauvaise exposition, les tiges s'étiolent, risquent des gélivures ou des brûlures, les feuilles pâlissent et la floraison est moins abondante. La sécheresse cause des taches foliaires, puis une défoliation progressive sur les viornes qui craignent l'aridité, comme V. opulus 'Roseum'. Plus grave, la canicule estivale est très néfaste aux viornes de mi-ombre, notamment en production hors-sol. De même, le gel peut nécroser les tissus des jeunes pousses sur des sujets mal aoûtés ou forcés sous abri, surtout en fin d'hiver à partir de - 10 °C. En pépinière ou en plantation, l'excès de salinité résulte d'apports d'engrais trop importants par rapport aux besoins spécifiques des viornes. Les feuilles brunissent et chutent. De plus, la sensibilité aux attaques de Phytophthora sp. s'accroît.

GRANDES AFFECTIONS PARASITAIRES

Les risques parasitaires des viornes sont relativement limités par rapport à d'autres arbustes ou arbrisseaux. Cependant, les bioagresseurs les plus nuisibles nécessitent une vigilance dès la production, assortie si nécessaire de méthodes de lutte raisonnée pour préserver l'intégrité du feuillage et le potentiel de floraison.

Affections des parties inférieures : collet, tubercule, racines

Le principal pathogène tellurique, Phytophthora cinnamomi, est responsable d'une pourriture brune du collet et des racines, assortie d'un dépérissement partiel ou total des parties aériennes. V. tinus y est sensible lorsqu'il est cultivé en conteneur. Plus rarement, la maladie du plomb parasitaire (Chondrostereum purpureum) sévit en sol hydromorphe, surtout lors des hivers doux. Les feuilles se teintent de gris argenté. Les ramifications meurent progressivement, et sur l'écorce, de petits carpophores blanc-grisâtre puis violacés apparaissent. La verticilliose (Verticillium dahliae) contamine les racines et nécrose les tissus vasculaires, surtout en pleine terre. Elle altère la vigueur de la viorne qui jaunit, puis dépérit en été. Les feuilles mortes restent attachées aux rameaux. En pépinière hors-sol et dans certains massifs, l'otiorhynque de la vigne et du cyclamen (Otiorhynchus sulcatus) et l'otiorhynque des arbustes (O. clavipes) rongent les racines au stade larvaire. Les plants infestés sont chétifs, puis dépérissent. À partir de l'été, on trouve dans le chevelu racinaire des larves blanchâtres à tête brune. Dès le mois d'avril suivant, les femelles parthénogénétiques adultes dévorent les feuilles en formant des encoches régulières autour du limbe. Les attaques de nématodes à galles (Meloidogyne hapla) sont rares sur les viornes. Des foyers peuvent cependant apparaître dans des terrains horticoles, surtout après des cultures maraîchères. Ces vers microscopiques sensibilisent les plants à la sécheresse et entraînent une réduction de croissance souvent marquée.

Affections des parties supérieures : fleurs, feuilles, pousses, tiges

En automne-hiver, mais aussi durant la période végétative par temps frais et humide, la mort brutale du chêne (Phytophthora ramorum) déclenche le dépérissement des parties aériennes : avortement des bourgeons, brunissement des feuilles débutant soit à l'apex du limbe suite à une rupture d'alimentation, soit au niveau de la nervure principale à partir du pétiole. Les viornes à floraison d'automne-hiver (V. tinus, V. x bodnantense) sont sensibles à cette maladie réglementée de lutte obligatoire dans l'Union européenne. La pourriture grise (Botrytis cinerea) peut surinfecter les nécroses dues à P. ramorum, mais à elle seule, cette maladie altère les pièces florales et les jeunes pousses à la faveur d'une forte hygrométrie, en particulier lors de l'hivernage des viornes en conteneurs sous tunnel plastique simple paroi. Les tissus brunis se recouvrent d'une poussière grisâtre caractéristique. En période de végétation, les oïdiums (Microsphaera viburni, M. hedwigii, Phyllactinia guttata) provoquent des taches poudreuses blanchâtres sur les feuilles et les pousses qui flétrissent. Les situations confinées et semi-ombragées leur sont favorables. La septoriose de la viorne (Septoria viburni) préfère les périodes pluvieuses estivales ou l'irrigation par aspersion pour se développer. Elle forme des taches circulaires ou angulaires brun clair entourées d'un liseré brun foncé, puis une défoliation en cas de forte attaque. V. opulus 'Roseum' et 'Xanthocarpum' y sont sensibles. D'autres maladies cryptogamiques plus spécifiques affectent le feuillage de certaines viornes, d'ordinaire sans gravité, mais inesthétiques : la cercosporiose du laurier-tin (Cercospora tinea) et la maladie des taches foliaires de la viorne boule de neige (Phyllosticta opuli). Quelques virus ubiquistes causent le jaunissement des nervures, des macules jaunes ou blanches, des nécroses et/ou des rabougrissements foliaires, notamment sur V. opulus 'Roseum'. Il s'agit de la mosaïque de la luzerne (AMV) et de la mosaïque du concombre (CMV), transmissibles par les pucerons dès le printemps, par le bouturage et parfois par les semences chez certaines viornes. Parmi les insectes ravageurs, les pucerons figurent au premier rang des nuisibles, en particulier le puceron noir de la fève (Aphis fabae), dont les oeufs d'hiver se conservent entre-autres sur V. opulus. Les attaques sont donc très précoces au printemps, entraînant un enroulement rapide des feuilles. Les pousses infestées se couvrent de miellat et de fumagine constituée de diverses moisissures. Une autre espèce, le puceron des viornes (Aphis viburni) colonise également des viornes au printemps, notamment V. carlesii et V. opulus 'Roseum'. Les cochenilles sont de plus en plus présentes en cultures sous abri ou dans les jardins en situation protégée. C'est le cas de la cochenille farineuse des viornes (Pseudococcus viburni) et de la cochenille à carapace des viornes (Lichtensia viburni). Ces insectes prolifèrent sous forme d'amas cireux blanchâtres. Le miellat abondant favorise l'apparition de fumagine noirâtre. Quelquefois, des foyers de cochenille pulvinaire de l'hortensia (Eupulvinaria hydrangea) sont détectés.

Cet insecte se repère sur les écorces grâce à sa petite carapace de couleur marron recouvrant un amas blanc cotonneux. En cas de pullulation, il affecte la croissance de la plante hôte. En recrudescence en France depuis une dizaine d'années, la galéruque des viornes (Pyrrhalta viburni) dévore les feuilles en mai et excrète des déjections noirâtres. Seules les nervures restent apparentes, donnant au feuillage l'aspect d'une dentelle. Rechercher à la face supérieure du limbe, une larve de 9 mm de long, au corps renflé, jaunâtre, avec de nombreuses plages noires et verrues ornées d'une courte soie. En juillet, apparaissent les adultes marron clair, mesurant 4,5 à 6,5 mm de long. V. dentatum, V. opulus, V. sargentii et V. tinus sont les plus exposés aux attaques de ce coléoptère. Les infestations sont parfois graves sur jeunes plants. Moins nuisibles, le thrips des arbustes d'ornement (Dendrothrips ornatus) et le thrips des serres (Heliothrips haemorrhoidalis) provoquent l'apparition de minuscules points blancs ou bruns, ainsi qu'une déformation des tissus, voire un dessèchement du limbe. V. tinus y est sensible. À partir de mai, les feuilles peuvent être piquées par la capside verte des pousses (Lygocoris pabulinus), mais sans gravité. Lors de la floraison, la cétoine dorée (Cetonia aurata) adulte peut se nourrir des pétales et des étamines. Enfin, certaines chenilles peuvent ronger les feuilles, en général sans nuisibilité majeure : bombyx cul-doré (Euproctis similis), larentie verdâtre (Acasis viretata), phalène de la viorne mancienne (Crocallis elinguaria), sphinx du troène (Sphinx ligustri).

Jérôme Jullien

Phytophthora cinnamomi sur laurier-tin. Attention à ne pas confondre les symptômes avec une saturation en humidité ou un excès de salinité.

PHOTOS : JÉRÔME JULLIEN

Morsures d'otiorhynques adultes sur laurier-tin.

Effets de la canicule sur Viburnum davidii.

Phytophthora ramorum sur laurier-tin. Signaler toute suspicion de détection au service régional chargé de la protection des végétaux.

Nodules racinaires disposés en chapelet générés par les nématodes à galles (Meloidogyne hapla).

Pucerons noirs et fourmis sur viorne boule de neige.

Cochenilles farineuses Pseudococcus viburni.

Larves de galéruque des viornes sur laurier-tin.

Oïdium sur Viburnum tinus.

Septoriose sur Viburnum opulus 'Xanthocarpum'.

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