Login

Apprentissage : entre inquiétudes et réformes

Dans leur programme de visites, les apprentis en CAPA « travaux paysagers » du CFAAH de Marseille (13) rencontrent Marc Charlet, vice-président de la Société d'horticulture des Bouches-du-Rhône, et créateur du verger conservatoire d'oliviers du CFA.PHOTO : CFAAH 13

Entre la réforme de la collecte des moyens de financement et la redéfinition de la place des acteurs, les apprentis tentent un parcours professionnel motivant teinté de rêves, d'espoirs, de projets, de missions, mais aussi d'incertitudes sur l'avenir. Présentation de l'état des lieux, des enjeux, et témoignages d'apprentis en CAP et en formation d'ingénieur.

Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.

À l'heure des relances et des campagnes pour la collecte de la taxe d'apprentissage, d'ici fin février, reviennent les questions sur l'organisation de cet impôt, son efficacité, et sa pertinence. « Depuis des millénaires, apprendre en pratiquant est resté la plus fiable des méthodes pour assurer la pérennité de bien des métiers, rappelle Brand Wagenaar, analyste expert des filières horticoles. L'apprentissage en alternance, dévalorisé pendant un temps, est de nouveau mieux considéré. Il figure parmi les meilleures manières de développer conjointement chez nos jeunes (et moins jeunes en formation) le savoir-penser, le savoir-faire et le savoir-être, qui leur permettront de faire face aux défis à venir. » Or, le contexte est-il vraiment favorable, dans la législation et les esprits ?

Révision de la formation : dernier acte mi-février

Depuis l'été 2013, le gouvernement a manifesté sa volonté de redynamiser l'apprentissage dans l'objectif de passer de 435 000 apprentis en 2013 à 500 000 en 2017. Mais cette voie de formation subit des soubresauts multiples. Une réforme a débuté à l'automne 2013. Trente organisations (des partenaires sociaux, les régions, des chambres consulaires, des branches professionnelles, des réseaux de l'enseignement...) ont donné leur point de vue sur le sujet lors d'une concertation donnant lieu à diverses propositions. Les partenaires sociaux se sont ensuite mis d'accord, à la fin de l'année 2013, sur la réforme de la formation professionnelle, dont un volet concerne l'apprentissage et inclut certaines dispositions législatives de la concertation préalable. Les propositions de cette négociation devraient être définitivement actées mi-février prochain par le gouvernement dans un projet de loi. D'autres dispositions, - fiscales -, relèvent de projets de loi de finances sur 2013 et 2014. Le volet concernant le financement devrait prendre effet au 1er janvier 2015 et la réorganisation des organismes collecteurs (OCTA) à la date du 1er janvier 2016. La simplification et la rationalisation de ce réseau de collecte (il existe 147 organismes actuellement ; à terme, il devrait y en avoir une quarantaine seulement, nationaux et régionaux), trop morcelé et peu lisible, sont en cours. Pour l'heure, les avancées concrètes de la réforme portent sur les modalités de prise en charge et de redistribution, avec une place à redéfinir ou rééquilibrer entre les OCTA et les régions.

Donner davantage de sens aux études

À tous les niveaux de qualification, au sein des filières professionnelles, rares sont les avis négatifs quant à l'utilité de la formule mixte du contrat d'apprentissage : formation en centre et emploi en entreprise. L'âge d'entrée en apprentissage à 14 ans a fait un temps débat, mais comme le précise Éric Guillou, directeur du CFAAH 13 de Marseille : « Nous acceptons les candidats ayant 15 ans avant le 31 décembre de l'année de la rentrée et sortant de classe de troisième. Les nouvelles réglementations concernant les dérogations à l'utilisation des machines et des outils par des mineurs et contre les travaux dangereux ne vont pas dans le sens de l'abaissement de l'âge d'entrée en apprentissage. Au contraire, cela risque même de faire chuter le nombre d'entreprises pouvant signer un contrat avec des jeunes âgés de 16 à 18 ans. Notamment parce que peu sont en règle avec leur document unique de prévention des risques professionnels (DU) ».

Du côté des maîtres d'apprentissage, le nombre d'exigences ne cesse de s'accroître : niveau de formation, conformité aux normes de sécurité... Par ailleurs, le débat reste ouvert sur les référentiels des diplômes, l'importance des déséquilibres entre les critères d'évaluation des connaissances (savoirs figés) pour la certification et les diplômes, et les entreprises qui privilégient l'acquisition de compétences et la capacité à analyser et à réagir à une situation ou à une activité de travail (savoir-faire). C'est-à-dire être capable d'exprimer vite son potentiel, notamment dans un environnement économique obligeant à plus de mobilité professionnelle.

Dans ce contexte, comment se déroule l'apprentissage sur le terrain ? Nous avons rencontré des jeunes en premier niveau de diplôme (CAP). Ils sont plus souvent issus du milieu urbain. Une question accrue sur leur adaptation aux exigences en connaissances théoriques et aux règles de vie au travail se pose, malgré toutes leurs envies de travailler (lire en p. 14). À l'opposé, au niveau supérieur, la rencontre d'apprentis-ingénieurs permet de (re)découvrir qu'on peut leur confier des missions opérationnelles longues, et des responsabilités progressives, permettant de répondre aux sempiternelles attentes d'embauches « de débutants diplômés avec deux ou trois ans d'expérience ». Les formations par apprentissage dans le supérieur, moins académiques et plus coconstruites avec les entreprises, utilisent les démarches de projet pour favoriser le travail en équipe et le partage des intelligences, pour donner plus de sens aux études supérieures. C'est le cas pour les apprentis-ingénieurs d'AgrocampusOuest à Angers (lire en p. 18). La formule a aussi ouvert à un public scolaire très diversifié (plus de mixité sociale) un accès à des formations supérieures et donné l'opportunité d'« oser la grande école » (plus de promotion sociale). Aux niveaux régional, national et international, des initiatives s'organisent pour aller au-delà de la réforme et travailler sur la valorisation de l'apprentissage (lire en p. 19).

DOSSIER RÉALISÉ PAR ODILE MAILLARD

Un projet de recyclage des effluents, proposé et suivi par un apprenti en formation d'ingénieur au sein d'une pépinière : c'est l'exemple de mission longue qui peut être confiée à des apprentis du supérieur.

PHOTO : ANNIE SALAT, AGROCA MPUSOUEST

Les apprentis de première année de CAPA « travaux paysagers » du CFAAH de Marseille (13) ont tourné une vidéo mettant en scène une situation d'accident du travail... Une sensibilisation concrète sur les mesures de prévention des accidents professionnels.

PHOTO : CFAAH 13

A découvrir également

Voir la version complète
Gérer mon consentement