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Tableau de bord de la filière : des métiers condamnés à s'entendre

La filière compte de nombreux points forts. Les particuliers continuent d'investir dans leurs jardins via les entreprises du paysage, par exemple...PHOTO : PASCAL FAYOLLE

Le portrait des métiers du végétal, dessiné par le Lien horticole pour la deuxième année consécutive à partir des principales statistiques de la filière, montre une situation qui reste préoccupante. Mais la profession a des atouts pour rebondir, à condition de refonder le « travailler ensemble »...

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Le constat qui s'impose, à l'analyse des principales statistiques proposées par les différentes instances participant à l'observation de notre filière, n'est pas franchement enthousiasmant. Sans vouloir plomber l'ambiance de la fin de l'année, voir que le marché du jardin ne s'est pas vraiment relevé après un millésime 2013 catastrophique, que le secteur perd des entreprises ou que le tissu de production français continue de se déliter n'incite pas à la fête. D'autant que les difficultés de ces deux dernières années ont particulièrement tendu les relations entre certaines familles, en particulier entre la production et la distribution, comme en témoigne le succès de notre édito « À qui la faute » (le Lien horticole n° 900 du 1er octobre 2014 et les courriers des lecteurs qui ont suivi).

La volonté de profiter d'un jardin bien aménagé, pièce supplémentaire de la maison

Et pourtant, sans spécialement chausser des lunettes roses, de nombreux éléments poussent à l'optimisme. Tout d'abord, oui, le marché du jardin s'est un peu érodé, mais cette érosion n'a pas grand-chose en commun avec celle ayant touché certains secteurs comme l'automobile. De plus, internet n'a pas, chez nous, déstabilisé le marché comme c'est le cas dans l'habillement. Les jardineries, dont le développement avait été impressionnant, sont plus en recomposition qu'en crise. Et si le paysage, dont la croissance a été exponentielle pendant vingt ans, ne vit pas bien de voir l'horizon soudain moins dégagé, il n'en reste pas moins une branche porteuse, bénéficiant au quotidien de la volonté des citoyens de profiter d'un jardin bien aménagé, jouant pleinement son rôle de pièce supplémentaire de la maison... Et la production, qui traverse une phase de turbulences sans précédents, doit plus ses difficultés à la concurrence des productions étrangères qu'à la contraction des marchés.

Tout faire pour que le professionnalisme et la qualité règnent sur le végétal

Les difficultés des métiers du végétal d'ornement viennent en fait plus de la manière dont évolue le marché que de son volume. Et malgré la morosité ambiante, un circuit de distribution tire actuellement son épingle du jeu : la grande distribution. Avec le risque évident que le prix l'emporte sur la qualité et qu'à terme, le client, déçu, se détourne définitivement des végétaux. D'autant que ces derniers font de plus en plus peur à des jardiniers dont les connaissances de base de la biologie des plantes vont en s'amenuisant. C'est peut-être là que réside le véritable enjeu pour demain. Un enjeu qui, au final, passe peut-être davantage par un dialogue plus sain et plus direct entre les mondes de la production et de la distribution, que par le poker menteur que les dernières années ont amené chacun à jouer (je te critique, mais à mi-voix, pour ne pas perdre ce que tu m'apportes...).

La FNPHP (Fédération nationale des producteurs de l'horticulture et des pépinières) a engagé un travail pour reconquérir le marché des collectivités sur la base d'un constat : seulement une plante sur trois, installée dans nos villes et villages, est produite en France. Une démarche qui, bien menée, peut conduire à des résultats intéressants : de plus en plus de citoyens sont sensibles au discours sur le made in France. Or, le marché de la jardinerie est, aujourd'hui, infiniment plus important (trois fois plus si l'on en croit les chiffres de FranceAgriMer, voir page 16) pour les entreprises de production que celui des collectivités. Les horticulteurs ont donc tout à perdre à ce que les liens continuent à se distendre avec les principales enseignes du jardin.

Le combat sur le marché du paysage doit être conduit, tout comme il serait intéressant de se plonger sur le dossier des fleuristes, qui représentent le plus gros marché en valeur pour le végétal, en France, mais qui travaillent aux trois quarts au moins avec l'étranger. Et la vente directe, qui offre au producteur la possibilité de capter l'essentiel de la valeur ajoutée du produit et de profiter de l'effet « pro » et de la proximité, doit encore avoir de beaux jours devant elle. Mais au regard de l'ensemble des chiffres, le vrai risque vient de la grande distribution, dont la politique sera de rechercher de gros volumes à faible coût qui ne sont, on le sait, guère présents dans l'Hexagone. Il faut que les acteurs de la filière travaillent ensemble pour ne pas laisser le métier à de simples marchands. Pas facile ? Non, mais indispensable. Les enseignes sont en train de se refonder et les cartes pourraient être rebattues. Peut-être une chance à saisir pour un nouveau départ ?

Pascal Fayolle

Si les producteurs veulent éviter la montée en puissance de la grande distribution, ils doivent renouer le dialogue avec la distribution spécialisée, distendu par deux années difficiles.

PHOTO : VALÉRIE VIDRIL

Vendre sur le lieu de production pour conserver l'essentiel de la marge des produits reste une option intéressante pour les producteurs.

PHOTO : VALÉRIE VIDRIL

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