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Quel est votre diagnostic ? C'est la maladie des racines noires

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DÉTECTION

Le dépotage d'une pensée symptomatique, suivi d'un lavage à l'eau, révèle une altération brune du collet et une pourriture des racines superficielles. Dans les cas évolués, le pivot accuse des lésions brunes allongées, puis se désagrège. Cette observation visuelle, suivie d'une analyse mycologique en laboratoire, permet de déterminer la pathologie. Le champignon tellurique Thielaviopsis basicola (= Chalara elegans), agent de la pourriture noire des racines, est rattaché à la classe des ascomycètes. Autres synonymes : Chalaropsis basicola, Cylindrocephalum basicola, Hughesiella basicola, Torula basicola, Trichocladium basicola. C'est un organisme très commun dans les sols humifères. En conditions humides et fraîches, il devient pathogène sur divers végétaux stressés, en mauvais état physiologique ou blessés. C'est un parasite dit « de faiblesse » qui s'attaque à une centaine de genres et environ deux cents espèces végétales répartis dans trente-trois familles botaniques, dont les plantes horticoles suivantes : Abutilon, muflier, Aralia, bégonia, jeunes plants de Catalpa speciosa, chrysanthème, Daphne mezereum, Senecio elegans, cyclamen, gerbera, Euphorbia (dont poinsettia), Heuchera, impatience hybride, lupin, pervenche, Phlox subulata, pivoine, Pelargonium, primevère, Saintpaulia, scabieuse, Solanum, tabac, Tiarella, Viola (pensée, violette). Sur les cultures florales, Thielaviopsis basicola est parfois associé à la fusariose (Fusarium sp.) qui surinfecte les parties altérées. Par la suite, les tissus morts se couvrent souvent de moisissure grise (Botrytis cinerea). Ce complexe pathologique rend parfois difficile le diagnostic ou l'analyse pour déterminer l'agent primaire de dépérissement. La maladie des racines noires peut contaminer la plante-hôte durant toute la période végétative. À un stade précoce de la culture, elle provoque une fonte de semis. Par la suite, des plantules peuvent jaunir avant de disparaître. Sur des végétaux développés, elle détruit d'autant plus vite le système radiculaire que la plantehôte est affaiblie. Si l'infection se manifeste en pleine terre, par exemple dans un massif, les sujets infectés sont chétifs, fleurissent précocement et de façon hétérogène. Lorsque le sol est acide (pH 5-6), Thielaviopsis basicola est moins actif qu'en présence de carbonate de calcium

CONFUSIONS POSSIBLES

La pensée hybride redoute l'hydromorphie au niveau de la motte. Une confusion est donc possible avec une asphyxie racinaire due à un excès d'eau. Dans ce cas, seule la cause abiotique est retenue. Mais il existe très souvent une relation de cause à effet entre l'humidité élevée du substrat et le développement de Thielaviopsis basicola. D'autres champignons du sol comme Fusarium sp., Phytophthora sp., Pythium sp. ou Rhizoctonia solani peuvent être à l'origine du dépérissement racinaire de la pensée. Mais Thielaviopsis basicola est certainement le seul à provoquer, de façon aussi nette, une zone de rupture au niveau du collet. Lorsque l'on tire sur le plant, il se sépare facilement de la partie souterraine. Cependant, une analyse en laboratoire est recommandée pour identifier l'agent causal avec certitude.

TRANSMISSION ETDÉVELOPPEMENT

Dans les exploitations horticoles, l'inoculum primaire est constitué par les poussières de sol et certains substrats à base de tourbe. Lors des périodes fraîches et humides, le développement racinaire des plantes est réduit. Avec un optimum thermique de 13 à 23 °C, Thielaviopsis basicola colonise la matière organique et infecte le système radiculaire des végétaux sensibles, soit directement à travers l'épiderme, soit par l'intermédiaire de blessures. Le mycélium pénètre entre les cellules du cortex racinaire et atteint les vaisseaux conducteurs de sève. Les organes malades noircissent, se couvrent de mycélium et de spores. La plante flétrit, surtout durant les journées chaudes, et il ne reste finalement que les gaines des tissus de soutien et le cylindre central, tandis que les tissus mous désorganisés s'exfolient. Dès les premiers stades évolutifs de la maladie, un revêtement blanchâtre, fragile, est visible sous loupe binoculaire à la surface de parties contaminées. Ces fructifications résultent de la multiplication asexuée de petites conidies (phialospores ou endoconidies), cylindriques, hyalines, formées en court chapelet à l'intérieur d'un tube ouvert, d'où elles sont successivement expulsées. Lorsque le pathogène vient à manquer de nutriments dans les tissus infectés et/ou que les conditions du milieu lui deviennent défavorables (sécheresse, températures extrêmes pour son existence), il adopte une forme de résistance. Une portion de filament mycélien donne alors naissance à de nombreuses chlamydospores (arthroconidies) brun foncé ou noirâtres, lisses, pluricellulaires, en forme de tonnelets empilés les uns sur les autres, couvrant la base de la pensée d'une parure brunâtre. À maturité, ces spores asexuées se séparent les unes des autres. Elles constituent la principale forme de conservation pérenne de Thielaviopsis basicola sur des résidus organiques, dans le sol et les poussières. Le champignon se propage plus facilement dans un milieu humide et frais que dans un milieu sec et aéré. Les spores sont disséminées par l'eau d'irrigation, la pluie, les éclaboussures, les poussières, le substrat, les outils et lors de la manipulation des plaques alvéolées ou des godets. La forme parfaite ou sexuée du champignon est rare, voire inexistante. Le cas échéant, les périthèces forment des petits points noirs au milieu des chlamydospores. Les asques qui en résultent sont ovoïdes et contiennent huit ascospores brunes en forme de citron.

Par Jérôme Jullien, expert horticole

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