Quel est votre diagnostic ? C'est la galéruque de l'orme
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DÉTECTION
L'observation des feuilles desséchées sur les arbres au milieu de la saison estivale ne permet pas de mettre en évidence les larves défoliatrices de la galéruque de l'orme, car à cette période de l'année, l'insecte, Xanthogaleruca luteola (Müller), est en train d'achever son développement larvaire et se trouve au stade nymphal. Ce sont donc les symptômes sur le feuillage qui signalent en réalité le passage de ce ravageur. Les larves de la galéruque de l'orme se développent systématiquement au revers des feuilles des végétaux et elles décapent méthodiquement les tissus foliaires en laissant intacts l'épiderme supérieur et l'ensemble des nervures... d'où l'aspect d'une fine dentelle réticulée. Ce type de dommage est caractéristique de certaines larves de coléoptères phyllophages appartenant à la famille des Chrysomelidae (la galéruque de l'aulne ou la petite chrysomèle des saules...). Chez les hyménoptères, certaines tenthrèdes appelées « tenthrèdes limaces » génèrent des symptômes similaires. Au regard des dégâts qu'elles génèrent, ces larves sont, à juste de titre, appelées dans la littérature spécialisée québécoise « larves squeletteuses ».
CONFUSIONS POSSIBLES
Sur les ormes, plusieurs espèces de lépidoptères défoliateurs peuvent oeuvrer : le bombyx à livrée (Malacosoma neustria), la phalène défeuillante (Erannis defoliara) ou encore l'inconstante (Orthosia incerta). De grande taille (plusieurs centimètres de long), ces larves trouent et dévorent largement le feuillage des arbres. Compte tenu de la spécificité de ces symptômes, il est impossible de confondre une attaque d'une de ces chenilles défoliatrices avec celle de la galéruque de l'orme. À noter : les adultes de cette dernière sont également phyllophages et se nourrissent aux dépens des feuilles d'ormes en provoquant des trous plus ou moins réguliers dans les limbes.
ÉLÉMENTS DE BIOLOGIE
Encore appelée galérucelle jaunâtre, la galéruque de l'orme est un insecte d'origine européenne très commun appartenant à l'ordre des coléoptères et à la famille des Chrysomelidae. Introduit en Amérique du Nord ainsi qu'en Australie, il s'attaque à tous les Ulmus ainsi qu'aux ormes de Sibérie (Zelkova carpinifolia). L'adulte, de couleur brun-jaunâtre avec des marques noires sur la tête, le thorax et les élytres, mesure 5 à 7 cm de long. Les oeufs, de teinte jaune orangé clair à blanc sale et de forme allongée, sont pondus groupés (10 à 30) au revers des feuilles. La larve, jaune sale à légèrement verdâtre avec une tête noire, possède 3 paires de pattes et atteint 7 à 12 mm de long. Son corps marqué de plaques et de verrues noires porte de nombreuses soies. Trois stades larvaires se succèdent avant la nymphose. La nymphe orangé-jaune mesure de 5 à 7 mm de long.
CYCLE DE DÉVELOPPEMENT
L'insecte hiverne sous sa forme adulte. Il se réfugie dans les premiers centimètres du sol ou dans la couche humifère en surface. Il peut également s'installer dans un pierrier ou un tas de bois. En secteur urbanisé, il se cache dans des abris de jardins, voire à l'intérieur des maisons, dans les greniers. Les adultes émergent de façon échelonnée au cours des mois d'avril et mai et ils s'envolent vers les ormes sur lesquels ils s'alimentent. Les femelles pondent leurs oeufs de façon groupée au revers des feuilles au cours de la deuxième quinzaine du mois de mai et les déposent en 2 ou 3 rangées, souvent au niveau d'une nervure. La fécondité de chaque femelle est en moyenne de 500 oeufs (jusqu'à 1 000 oeufs). L'éclosion a lieu une dizaine de jours après. Dans un premier temps, les jeunes larves restent groupées au revers des feuilles qu'elles décapent en respectant les nervures et l'épiderme supérieur. Plus âgées, elles s'éparpillent et vivent solitaires.
Au bout de trois semaines (vers la mi-juin), les larves de galéruque enclenchent une migration descendante et cheminent sur les troncs pour atteindre le sol. Elles recherchent une ambiance humifère et confinée pour se nymphoser et apprécient tout particulièrement la litière de feuilles mortes accumulée au pied des ormes. Sur le site étudié, une forte population de larves se concentre sous les canisses pour se nymphoser, là où les conditions sont favorables à leur transformation.
En été, de nouveaux adultes émergent ; ils engendrent une deuxième génération - généralement plus populeuse que la première - de larves qui seront actives au cours des mois d'août et septembre. Elles colonisent les feuilles juvéniles encore épargnées et achèvent leur développement en fin d'été. La nymphose survient au pied des arbres attaqués et donne naissance à de nouveaux adultes. Après une courte période d'alimentation, les imagos partent à la recherche d'un site d'hivernation. Ayant d'assez bonnes capacités de vol, ils se dispersent facilement.
Les fortes attaques cumulées enregistrées sur les jeunes ormes du site pourraient s'expliquer ici par la présence du système de protection des troncs favorable à la nymphose et à la conservation de l'insecte. D'une part, la proximité du feuillage avec ces abris diminue les distances à parcourir par les larves. D'autre part, la prédation et le parasitisme des nymphes se trouvent certainement réduits (inaccessibilité pour les oiseaux insectivores, bonne ventilation limitant l'action des champignons entomopathogènes...).
CONSÉQUENCES POUR LES ARBRES
Sur des ormes vigoureux, une défoliation ponctuelle, même généralisée à tout le houppier, n'aura pas de fâcheuses conséquences sur le devenir des arbres. Ils se refeuilleront sans difficultés l'année suivante. Par contre, des attaques répétées sur plusieurs années ou sur des vieux sujets en difficulté, pourraient entraîner leur dépérissement.
Par Pierre Aversenq, expert arboricole
Bibliographie : David V. Alford, 2012. Ravageurs, des végétaux d'ornement. Arbres, arbustes et fleurs. Éditions Quae.
Les symptômes observés Des feuilles « roussies » accrochées aux rameaux des arbres... Tous les arbres de l'alignement sont affectés. La quasi-totalité des houppiers est touchée et seuls persistent quelques toupets de feuilles encore vertes dans la partie sommitale des rameaux. Les feuilles desséchées se racornissent et s'enroulent à la manière d'une cuillère ; elles restent un temps accrochées aux axes puis chutent. PIERRE AVERSENQ
Les symptômes observés ...Desséchées et entièrement décapées sur leur face inférieure L'ensemble des tissus foliaires - à l'exception de l'épiderme supérieur et des nervures - a été méticuleusement décapé. Les feuilles sont semi-transparentes et seule la nervure principale reste verte. Vues du dessus, elles sont de teinte beige à brune avec des reflets légèrement argentés. Cassantes au toucher, elles s'effritent facilement. PIERRE AVERSENQ
Les symptômes observés De nombreuses nymphes de couleur jaunâtre au pied des arbres... Sous le tapis dense de lierre, à la base des troncs, s'observent de très nombreuses formes nymphales jaunâtres au corps trapu mesurant 0,5 cm de long. Elles se trouvent à la surface du sol ou très légèrement enfouies dans les tout premiers centimètres. PIERRE AVERSENQ
Les symptômes observés ...Et sous les canisses Les nymphes peuvent également s'accumuler sous les canisses qui protègent les troncs de ces ormes, sous des feuilles desséchées retenues au niveau des bourrelets en caoutchouc servant de support pour l'habillage des bambous fendus. PIERRE AVERSENQ
Galéruque de l'orme De gauche à droite : Xanthogaleruca luteola aux stades adulte, oeufs et larve. PIERRE AVERSENQ
Pierre Aversenq, expert arboricole PIERRE AVERSENQ
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