Filière : le marché se maintient, mais la place du végétal se réduit chaque année
Pour sa quatrième édition, notre dossier de fin d'année consacré aux statistiques des métiers de la filière dresse un bilan dans la continuité des précédentes parutions : c'est le végétal qui est le plus en souffrance.
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Comme chaque année désormais, nous consacrons ce dernier dossier de l'année 2016 aux « repères » de la profession : les chiffres disponibles concernant les métiers du végétal. Combien d'entreprises, d'emplois, etc. Ceux-ci sont les classiques, mais à chaque édition, nous essayons d'en trouver de moins classiques, comme le chiffre d'affaires au mètre carré dans une jardinerie, que livre la Fédération nationale des métiers de la jardinerie (FNMJ), et qui est édifiant (page 14). Il explique pourquoi, il n'y a pas si longtemps, le PDG d'une grande enseigne de jardineries avait provoqué l'émotion de toute la filière en affirmant qu'il voulait réduire la surface de ses magasins consacrée à la pépinière : c'est de loin dans ce rayon que le chiffre d'affaires au mètre carré est le plus faible...
Au-delà des chiffres bruts, le plus intéressant reste leur dynamique. Et à ce titre, le fait de réitérer ce dossier d'année en année permet de lui donner de la profondeur, même si certaines statistiques sont plutôt des estimations que des mesures précises, même si l'on constate que ces estimations ont parfois fait l'objet d'ajustements qui les rendent plus ou moins cohérentes d'une année sur l'autre, comme c'est le cas en 2016 pour le montant du marché du jardin issu de Promojardin. La dynamique reste primordiale dans un secteur où la plupart des métiers ne font l'objet de livraisons de nouvelles statistiques que tous les deux ans. Pour le paysage, quelques chiffres proposés ici sont identiques à ceux de 2015, mais les baromètres intermédiaires publiés chaque semestre par l'Union nationale des entrepreneurs du paysage (Unep) permettent en partie d'imaginer ce que seront ceux de 2017.
Des études, du terrain, nos indicateurs et de multiples contacts
Outre les mesures effectuées par les organismes professionnels eux-mêmes, les tendances sont aussi enrichies par le travail de terrain du Lien horticole, en particulier les trois indicateurs que nous publions chaque année, en partenariat avec Medioflor, après les temps forts de la filière végétale, à savoir la saison de printemps et la Fête des mères (le Lien horticole n° 980 du 13 juillet 2016), la Toussaint (le Lien horticole n° 993 du 23 novembre 2016) et les fêtes de fin d'année (le Lien horticole n° 956 du 20 janvier 2016).
Le marché du jardin est observé plus précisément que celui du paysage : les jardineries sont suivies mois par mois, en particulier par Promojardin, alors que les marchés publics ne peuvent être analysés que sur des cycles plus longs, et ne font d'ailleurs pas l'objet d'un suivi précis et chiffré. Seule l'Unep précise comment la commande des collectivités évolue d'une période sur l'autre.
Des chiffres sans surprise, mais qui ne sont pas sans poser des questions
Quel que soit le point de vue d'où on se place, cette année, on peut dire que les chiffres ne sont pas franchement surprenants. Ils peuvent être inquiétants, comme ceux de la production, où le nombre d'entreprises disparues n'a pas faibli, au contraire. Si l'on a pu, pendant quelques mois, penser que le pire était derrière nous, les nouvelles en provenance du terrain montrent que, depuis la dernière enquête qui donne des chiffres pour 2015, les choses ne s'améliorent pas vraiment, en particulier en pépinière. Le secteur du paysage résiste mieux, malgré la faiblesse récurrente du marché des collectivités. Et le marché du jardin reste chaotique, lié aux conditions climatiques et à la conjoncture. Les chiffres qui sont présentés dans ce dossier sont arrêtés sur une année, donc portent au plus récent sur 2015. Mais nous avons vu depuis comment s'est passé le début de cette année : un bon départ, un printemps difficile, un bel été qui a permis de compenser en partie les pertes du printemps.
Voilà pour le constat général, détaillé dans les pages qui suivent, mais quid du végétal en particulier, qui au final nous intéresse avant tout ? Force est de reconnaître qu'il reste à la peine. Du côté des producteurs, cela dure depuis un moment. Malmenés par une concurrence étrangère exacerbée (la perte de certains marchés en Europe de l'Est a renforcé la présence de quelques acteurs internationaux sur notre marché qui reste pour eux important) et alors que les coûts de main-d'oeuvre demeurent élevés face, en particulier, aux pays du Sud, les horticulteurs et pépiniéristes de l'Hexagone voient leurs marges se réduire régulièrement. Sans perspectives, les entreprises sont devenues difficiles à vendre lorsque l'exploitant jette l'éponge. Sans compter celles de taille importante qui désormais peuvent aussi mettre la clé sous la porte du jour au lendemain, ou presque.
La question pour demain : comment rendre le végétal vraiment indispensable ?
La faute à un marché qui se rétrécit ? Pas seulement. Le marché du jardin ne se développe plus, comme il l'a fait par le passé, mais il ne s'effondre pas non plus. Par contre, le végétal y occupe une place qui se réduit un peu chaque année. De la même manière, dans le paysage, l'heure est certes aux contractions budgétaires, mais il suffit de comparer le marché des collectivités en France et celui des pays qui nous entourent pour voir que nos villes et certainsvillages restent actifs dans le secteur de l'aménagement et du fleurissement.
Globalement, tout se passe comme si le jardin restait plébiscité, mais que celui-ci ne rime plus forcément avec un végétal incontournable. C'est ce combat qui va devoir être mené dans les prochaines années. Il passe par des mesures d'adaptation des entreprises, en termes de dimension critique, et les regroupements d'établissements ne fleurissent pas dans toutes les régions par hasard, mais aussi en termes de gamme. Il passe également par des mesures de lobbying auprès des cibles de clients potentiels, en particulier les jeunes, que les études montrent peu enclins à consommer des végétaux. Il passe enfin par une analyse des ambiguïtés des discours de nos sociétés, se pensant tout entières tournées vers l'environnnement tout en se réjouissant, à l'heure où ces lignes sont écrites, de voir le marché de la voiture battre ses records de production, pour le plus grand bien de certaines économies européennes. Et pire, si l'on en croit les premiers débats marquant les élections qui approchent, le temps n'est peut-être plus à l'ambiguïté, mais à l'absence de perspectives environnementales. Du point de vue de notre filière, 2017 s'annonce intéressante et décisive !
Pascal Fayolle
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