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Éco-pâturage : un choix de gestion très tendance à adapter au contexte

Deux races d'ovins ont été choisies par la société Duc et Preneuf (Brignais, 69) pour conduire ses prestations d'éco-pâturage : d'une part, le mouton d'Ouessant pour sa rusticité et, d'autre part, le mouton Castillonnais pour son appétence pour la renouée du Japon.PHOTO : DUC ET PRENEUF

Une journée technique, organisée le 13 avril dernier au lycée horticole de Dardilly (69), a réuni plusieurs intervenants autour de l'entretien des espaces verts et espaces naturels par pâturage extensif. Collectivités et prestataires ont échangé leurs expériences, montré les atouts et les limites de cette méthode complémentaire et alternative permettant de limiter les coûts de gestion.

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L'éco-pâturage est une méthode complémentaire et alternative en milieu urbain ou périurbain à l'entretien mécanique des espaces verts naturels et des espaces paysagers enherbés. Il permet d'entretenir en limitant les coûts de gestion, des endroits en friche comme des réserves foncières et des lieux difficiles d'accès ou en forte pente. Sur les zones facilement mécanisables où la rentabilité économique n'est pas la priorité, l'éco-pâturage trouve tout d'abord sa place dans la politique environnementale de la collectivité et offre une nouvelle image des espaces verts.

1. TROIS CAS DE FIGURE SELON LES BESOINS DE CHACUN. Suivant les surfaces à entretenir, la disponibilité des agents et l'engagement des élus, les responsables des espaces publics peuvent opter entre différents types de gestion. Soit la collectivité est propriétaire des troupeaux, comme c'est le cas à Dardilly ; elle investit alors dans l'achat du cheptel, la mise en place de clôtures et la construction d'un abri. Soit la collectivité fait appel à un prestataire privé spécialisé (de plus en plus d'entreprises du paysage offrent ce service) qui propose la mise à disposition des animaux, la mise en place des clôtures, la gestion des apports d'eau et de la nourriture complémentaire éventuelle, ainsi que la surveillance et les soins aux troupeaux. Une troisième solution consiste plus simplement à confier les terrains à entretenir à un éleveur local, producteur de viande ovine, mais avec un cahier des charges précis. C'est le cas de ville d'Eybens (38) qui gère ainsi les neuf hectares d'herbe d'un bassin de rétention.

Dans tous les cas, le propriétaire des animaux doit souscrire une assurance responsabilité civile pour prévenir les éventuels dégâts liés à la propagation des bêtes (dégâts dans les propriétés riveraines, accidents de circulation). Ce document va au-delà des assurances des exploitations agricoles. Quel que soit le site à entretenir et le mode de gestion retenu, une personne (agent référent issu du service des espaces verts, prestataire) doit assurer une visite du troupeau au minimum hebdomadaire pour la surveillance, et les différents soins nécessaires. De plus, il est primordial que les gardiens ou les riverains des sites concernés adhèrent à la démarche et assurent une surveillance plus quotidienne. La plupart des problèmes se passent la nuit, l'agent référent ou le prestataire doit être joignable 24 heures sur 24. Par ailleurs, des panneaux de communication à destination du public sont également les bienvenus pour informer sur l'intérêt de la démarche, présenter les animaux et inciter à ne pas pénétrer dans les enclos.

2. LA SOLIDITÉ DES CLÔTURES EST UN POINT CLÉ . Il s'agit d'éviter la propagation des animaux mais aussi d'empêcher l'intrusion des chiens dont les attaques peuvent causer des blessures ou des mortalités sur les troupeaux. Il est également conseillé de prévoir un couloir de rassemblement pour capturer les bêtes. Pour les ovins, le choix se porte souvent sur des clôtures fixes de type Ursus, d'une hauteur de 1,50 m avec des piquets de châtaigner. L'investissement hors main-d'oeuvre est d'environ 25 euros le mètre linéaire. Pour les chèvres, plus difficiles à maintenir en parcs, les filets de clôtures électrifiées (clôtures mobiles) sont souvent plus adaptés (150 euros les 50 mètres). Le pâturage libre peut-être une solution pour les zones difficiles ; le jour, les troupeaux sont sous la surveillance d'un berger puis elles passent la nuit dans un enclos. Sur tous les sites il faut prévoir un point d'eau : un abreuvoir sur réseau ou une cuve de 1 000 litres qui sera remplie une à deux fois par an. En choisissant une race rustique, les moutons peuvent rester toute l'année à l'extérieur, avec simplement un abri. Par contre, les chèvres, plus sensibles à l'humidité, passent généralement l'hiver en bergerie.

3. CHOISIR LES ANIMAUX EN FONCTION DES ESPACES À GÉRER. Le débroussaillage est plutôt l'affaire des caprins et la tonte celle des ovins. Les lamas peuvent prendre le relais des chèvres l'hiver et les ânes broutent d'autres végétaux comme les chardons et les orties. L'éco-pâturage ne vise pas la même finalité que l'élevage classique. La production de viande n'est pas l'objectif, aussi la technique peut permettre de sauvegarder des races locales en voie de disparition comme la chèvre Massif central, très rustique dont l'effectif réduit à quelques dizaines d'individus dans les années 80, est remonté à plus d'un millier. En outre, le choix d'une race dont le bassin de production est plutôt local peut faciliter la recherche de nouveaux reproducteurs et éviter tout problème de consanguinité.

4. LE PÂTURAGE PEUT CONTRIBUER À LA GESTION DES INVASIVES. S'ilsn'ont rien d'autre à leur disposition, les moutons broutent volontiers berce du Caucase, ambroisie et renouée du Japon. Cette dernière est également appréciée des chèvres. Un surpâturage des renouées durant trois ans peut réduire la croissance des tiges de près de 80 % (se méfier toutefois des risques de propagation de fragments de tiges). Sur robiniers, en écorçant régulièrement les jeunes sujets, les animaux provoquent l'épuisement progressif des repousses. Par contre, il est nécessaire de protéger par un grillage solide les arbres et arbustes que l'on désire conserver.

5. DES PRIX SELON LES PRESTATIONS ET LES OBJECTIFS. Les prestataires présents à cette journée technique ne travaillent pas tous dans un cadre identique et ne poursuivent pas tout à fait les mêmes objectifs. Jérémy Parrot, de la société Cascade paysage, à Ars-sur-Formans (01), se consacre depuis deux ans à cette activité et vise une rentabilité financière. À la tête d'un troupeau de cent cinquante chèvres Massif central, il propose l'entretien de sièges d'entreprises, autoroutes, barrages, bassins de rétention, et terrains en pente dont le fauchage est dangereux. Ses prestations peuvent être ponctuelles (deux à trois semaines), ou se prolonger plusieurs mois. Le nombre de chèvres mis à disposition est en adéquation avec la surface à traiter et la durée de l'intervention. Les tarifs sont fonction des contraintes : surfaces et types de végétation, nombre d'animaux, éloignement géographique (jusqu'à trois heures de route), pose de filets de clôtures, mise en place d'un abreuvoir, d'un abri... Rythme des visites de surveillance : généralement trois fois par semaine avec une visite quotidienne la première semaine pour détecter les éventuelles carences, en sélénium notamment. Le contrat prévoit aussi l'aspect sanitaire : parasitisme, compléments alimentaires et remplacement des animaux morts, de ceux jugés trop dangereux, ou peureux, fauche des refus (comme les chardons). Jérémy Parrot étudie la possibilité de coupler chèvre et lamas pour pouvoir pâturer 365 jours par an. Il assure enfin la gestion administrative : carnet de sortie, bouclage, transport.

Bérengère Ronzon, exploitante près de Vienne (38), a mis en place un service d'écopâturage en complément de son activité agricole. Elle loue un troupeau de chèvres Massif central ou Rove (adaptées aux zones rocheuses accidentées) auprès de particuliers, communes, écoles, centres de loisirs, associations de pêche, sièges d'entreprises.

Et pour Lionel Trainard, de l'entreprise Duc et Preneuf, en région lyonnaise, l'éco-pâturage est un service complémentaire à l'entretien classique des espaces verts et apporte une plus-value environnementale aux sites dont il a en charge l'entretien. Il a, entre autres, misé sur le mouton d'Ouessant pour sa rusticité et le mouton Castillonnais pour son appétence pour la renouée du Japon.

Claude Thiery

Comme ici à Dardilly (69), des panneaux d'informations expliquant les démarches d'éco-pâturage permettent de mieux valoriser cette technique de gestion auprès des habitants.

PHOTO : CLAUDE THIERY

Pour délimiter les espaces des ovins, le choix se porte souvent sur des clôtures fixes de type Ursus, de 1,50 m de haut, installées sur des piquets de châtaignier.

PHOTO : DUC ET PRENEUF

En choisissant des races rustiques, les animaux peuvent rester toute l'année à l'extérieur, en disposant d'un abri et d'un point d'eau.

PHOTO : DUC ET PRÉNEUF

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