Poinsettias : un complément alimentaire pour auxiliaires
Selon un essai de la station d'expérimentation Astredhor Sud-Ouest GIE Fleurs et plantes, les producteurs de poinsettias peuvent optimiser la lutte contre Bemisia tabaci en offrant un complément alimentaire aux acariens prédateurs.
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Bemisia tabaci, principal ravageur en production de poinsettias, provoque des dégâts directs par ses piqûres d'alimentation, et des dégâts indirects par la transmission de virus et le développement de fumagine conduisant à la dépréciation commerciale de la plante. Quelques substances chimiques sont encore autorisées en lutte conventionnelle (pyriproxyfène, acétamipride, thiamethoxam...). Toutefois, « les populations de Bemisia tabaci dans le sud-ouest de la France sont de plus en plus résistantes », explique Rosy Pauwels, product manager chez Biobest. D'où le développement de la protection biologique intégrée (PBI).
1. PROPHYLAXIE, PIÉGEAGE ET AUXILIAIRES.
La prophylaxie consiste à contrôler la qualité sanitaire des plants dans un abri insect-proof, et détecter les premiers ravageurs grâce à des panneaux jaunes englués. Le biocontrôle fait appel à des auxiliaires (Amblyseius swirskii, Encarsia formosa, Eretmocerus eremicus, Macrolophus pygmaeus, Nesidiocoris tenuis...) ou des biopesticides (Lecanicillium muscarium). L'utilisation de plantes pièges (*), en particulier des plants d'aubergine, permet d'optimiser la lutte biologique. Une autre stratégie consiste à maximiser le développement des populations d'auxiliaires. En 2013, Biobest a lancé Nutrimite, un complément alimentaire à base de pollen de massette Typha angustifolia destiné aux acariens prédateurs (Amblyseius swirskii, Euseius gallicus). Dans le cadre d'Ecophyto, la station Astredhor Sud-Ouest GIE Fleurs et plantes a testé le produit en 2014 sur culture de poinsettias. En effet, si des libérations régulières d'Amblyseius swirskii doivent permettre de maintenir les populations d'aleurode du tabac en dessous du seuil de nuisibilité de 30 larves ou adultes par plante, les lâchers ne suffisent pas toujours.
2. DEPHY ECOPHYTO : AMÉLIORER LA LUTTE BIOLOGIQUE
L'essai d'Ecophyto a comparé deux stratégies sur cinq variétés de poinsettias cultivés sous serre verre : 'Bella Italia Red', 'Bravo Bright Red', 'Premium Polar', 'Premium Lipstick Pink' et 'Premium Ice Crystal' (Dümmen Orange) rempotés en pots de 14 en semaine 30. Dans chacune des modalités, A. swirskii a été introduit à raison de 100/m² (quatre lâchers en parcelle 1 ; neuf en parcelle 2), en plus d'Eretmocerus eremicus et d'Encarsia formosa à raison de 30/m² (un lâcher en parcelle 1, deux en parcelle 2). Dans la première parcelle (1), les lâchers d'acariens prédateurs étaient combinés avec le pollen Nutrimite à raison de 500 g/ha toutes les deux semaines (huit applications) et du piégeage sur aubergine ; dans la deuxième parcelle (2), avec l'insecticide biologique Mycotal (Lecanicillium muscarium) à la dose de 1 kg/ha (quatre applications). Au niveau de la qualité commerciale, la comparaison entre les itinéraires indique des résultats proches, les cinq variétés confondues : la parcelle 1 a présenté 55 % de poinsettias de classe 1 (plantes avec plus de trois bractées visibles) et 42 % de classe 2 (plantes avec trois bractées visibles), contre 51 % et 39 % pour la parcelle 2. En revanche, cette modalité présente un pourcentage non négligeable de plantes avec de la fumagine, soit environ 9 % de perte sur les ventes par rapport à la parcelle 1.
3. UN COÛT RÉDUIT DE PLUS DE LA MOITIÉ
Le coût global de la protection des plantes (y compris le traitement contre le thrips - Conserve - et le régulateur de croissance - Bonzi) a été de 1,08 € HT/m² pour la parcelle 1 et 2,32 € HT/m² pour la parcelle 2. Les applications de pollen peuvent être réalisées trois fois plus rapidement que les applications d'A. swirskii et elles coûtent huit fois moins cher. En prenant en compte le prix maximal de vente fixé à 3,50 € HT et un prix dégressif pour les lots de moins bonne qualité (3 € HT en classe 2 et 2 € HT en classe 3), le complément alimentaire a aidé à augmenter la marge opérationnelle de 33 %.
Les essais de 2015 ont confirmé l'effet du pollen sur le développement d'A. swirskii. Cependant, en dépit de la population élevée d'acariens prédateurs dans la culture, la population de Bemisia tabaci a, à certains moments, dépassé le seuil de dégâts. Une surveillance attentive pendant toute la saison reste cruciale. « Lorsque les niveaux de populations de ravageurs sont plus élevés, les acariens prédateurs ont assez de ravageurs pour se nourrir et Nutrimite n'est plus nécessaire comme source alimentaire de remplacement », précise Rosy Pauwels.
Valérie Vidril
(*) Sur les plantes-pièges et la culture du poinsettia, voir le Lien horticole n° 749 Ces plantes qui piègent les ravageurs, p. 12, et le Lien horticole n° 833 Poinsettia : des économies d'énergie possibles, pp. 12-13.
Le pollen s'applique au moyen d'un souffleur Makita équipé de l'embout Nutri-App ou d'une poudreuse manuelle. Le complément alimentaire favorise le développement des acariens prédateurs en l'absence de pression des ravageurs.
Bemisia tabaci, un des principaux soucis phytosanitaires en culture de poinsettia, provoque des dégâts directs (piqûres d'alimentation) et indirects (transmission de virus, fumagine). PHOTO : PFLANZENSCHUTZAMT SAARBRÜCKEN, HUSKEN-THIMM, BUGWOOD.ORG
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