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Parkings engazonnés : Les Panettes, un exemple duplicable ?

Situé sur une zone agricole qu'il était hors de question d'imperméabiliser, le parking des Panettes, à proximité du nouveau stade de Lyon, a été engazonné sur 66 000 m2.PHOTO : AXE SAÔNE

L'aménagement, l'an dernier, du nouveau stade de Lyon (69), a nécessité la mise en place de stationnements dont certains ne sont que rarement utilisés, mais néanmoins indispensables lors des périodes d'affluence. Pour éviter d'imperméabiliser de trop grandes surfaces, le choix a été fait d'installer du gazon sur un mélange terre-pierres. Après ajustement, l'expérience peut être transposée.

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Lors du projet du Grand Stade lyonnais implanté sur la commune de Décine (69), la question des parkings s'est posée. Pour compléter les 6 700 places de stationnement aménagées à proximité du stade, la priorité a été donnée la mutualisation des infrastructures existantes, comme le parking de 5 000 places d'Eurexpo situé à seulement cinq kilomètres, en organisant les soirs de match une rotation de navettes toutes les six à sept minutes. Une nouvelle voie végétalisée entre les sites d'Eurexpo et le nouveau stade a été créée spécialement pour cet usage. Cet aménagement de quatre kilomètres et demi s'inscrit dans le schéma stratégique trame verte urbaine : création d'une promenade paysagée entre Chassieu (69) et Décine et protection durable de cet espace naturel (35 hectares au total). D'autres parkings ont dû être réalisés pour tenir compte des besoins en stationnement plus ponctuels. Situé sur la commune de Meyzieu (69) à moins de cinq kilomètres du Grand Stade, le parking des Panettes est destiné à une utilisation plus restreinte uniquement lors des grands événements sportifs (matchs de forte affluence) ou culturels (concerts), soit une occupation comprise entre 35 et 40 jours par an.

Implanté sur une zone agricole, le site a été choisi, d'une part, pour sa proximité avec le parc relais tramway des Panettes, mis en service en décembre 2006 et, d'autre part, en raison des nombreuses contraintes qu'il présente et qui le rendent difficilement urbanisable pour d'autres usages : présence de plusieurs lignes à haute tension, proximité d'une zone industrielle. Le terrain compte néanmoins vingt-deux hectares d'espace agricole et il n'était pas envisageable d'imperméabiliser toute cette surface pour une utilisation aussi restreinte. Le projet prévoyait la création de 600 places de stationnement à usage quotidien pour les voyageurs du tram T3, et 3 200 places dédiées à l'utilisation événementielle du Grand Stade. Sur cette dernière zone, le choix d'un parking enherbé s'est imposé dès le départ au sein des services du Grand Lyon. Les surfaces enrobées ont été réduites aux seuls accès principaux, les peignes de stationnements, accès secondaires et places de parking proprement dites, sont entièrement enherbés et représentent une surface de 66 000 m².

1. CRÉER UNE STRUCTURE ACCESSIBLE QUELLE QUE SOIT LA MÉTÉO « Le cahier des charges spécifiait la création d'une structure à la fois portante, drainante, accessible quelles que soient les conditions météo, et qui permette de maintenir une surface verte toute l'année, exceptée durant la période estivale, explique Ghislain Gobba, concepteur paysagiste à l'agence Axe Saône, qui assure, au côté de l'agence Artelia, la maîtrise d'oeuvre paysagère. La structure du mélange terre-pierres du parking a été élaborée spécialement et mise au point avec le "laboratoire voirie" du Grand Lyon, assisté du bureau d'études Sol Paysage. Six mois ont été nécessaires pour finaliser la structure portante (voir encadré), compromis entre les différents paramètres à prendre en compte. Contrairement aux zones de plantation, de structure identique sur toute la profondeur, pour permettre le développement d'un gazon, le mélange terre-pierres doit être "fermé" en surface par une couche de granulométrie plus fine et par une couche finale avec un mélange de sable et de compost. L'épaisseur des différentes couches est déterminante par rapport à la portance. »

Deux séries d'essais in situ avec un protocole rigoureux ont permis de tester, sur des carrés de 100 m2, plusieurs types de structure avec des variantes par rapport à la granulométrie, l'épaisseur des différentes couches et le pourcentage de terre. La première série de tests, avec des véhicules conduits par des élèves ingénieurs, avait pour but d'expérimenter et de valider les portances (au-delà de 50 mégapascal pour les véhicules légers), et le risque d'orniérage. La seconde série, réalisée un an plus tard, avait un caractère plus pédologique, notamment étudier la migration des particules fines à travers les diverses couches.

2. UTILISER AU MAXIMUM DES MATÉRIAUX RÉCUPÉRÉS SUR PLACE. Sur ce chantier de vingt-deux hectares, le terrain d'origine morainique présentait d'importantes épaisseurs de galets. L'objectif était de travailler avec le moins d'entrées et de sorties de camions possibles et de récupérer un maximum de matériaux sur place. Cela a nécessité des moyens d'extraction, de concassage et de criblage colossaux, identiques à ceux employés dans une carrière. Après décapage sur 30 à 40 cm, la terre végétale a été criblée (crible 0/20) pour récupérer un maximum de galets (utilisés pour l'aménagement des noues) et faciliter l'élaboration ultérieure des mélanges terre-pierres. Près de 44 000 m3 de terre ont été récupérés ; 25 000 m3 ont été stockés sur place durant deux ans et réutilisés pour les mélanges terre-pierres, les plantations et les zones de prairies qui entourent le parking. Le volume restant a été dirigé vers d'autres chantiers du Grand Lyon.

Deux grandes zones d'emprunt, d'une surface comprise entre 3 000 et 5 000 m², ont été délimitées en vue d'extraire les divers matériaux. Ces zones ont été creusées sur une profondeur de plus de 10 m. Cela a permis de récupérer le volume de galets nécessaire à la création des voiries, après concassage et criblage. Ces zones d'emprunt, comblées par la suite avec les terres de moins bonne qualité décaissées sur l'ensemble du chantier, correspondent aujourd'hui à des zones de plantation. « Pour les déterminer, nous avons travaillé en collaboration avec l'entreprise Razel Bec, chargé des terrassements, qui a l'habitude de ce type de pratiques, oeuvrant fréquemment sur des chantiers de type autoroute », précise Ghislain Gobba. Seuls les matériaux utilisés dans le mélange terre-pierres ne sont pas originaires du site ; des pierres très angulaires d'origine granitique et de granulométrie importante (63/100) étant plus adaptées. « Le mélange terre-pierres a été réalisé sur place au chargeur par les entreprises d'espaces verts, le volume total représente 28 000 m3. Le criblage et le stockage en conditions sèches de la terre végétale (andains bâchés pendant les deux années de stockage) ont facilité la mise en oeuvre et l'homogénéité des mélanges. » La mise en place a été exécutée avec des moyens comparables à la création de voiries classiques : niveleuses, compactages par couches. Mis à part le décapage et le criblage, réalisés par l'entreprise Razel Bec, le travail des terres végétales, stockage en andains, préparation et installation des mélanges terre-pierres, ont été réalisés par les établissements d'espaces verts Parc et Sport et Laquet.

3. DES CONTRAINTES SPÉCIFIQUES À PRENDRE EN COMPTE. Pour être praticable quel que soit le temps, malgré la perméabilité de la structure, le parking a nécessité un réseau de drainage d'un dimensionnement quasi identique à celui d'un parking imperméabilisé. Sa surface est en légère pente pour diriger, en cas de forte pluie, les eaux de ruissellement vers un réseau de sept kilomètres de noues végétalisées, lesquelles se déversent ensuite dans quatre bassins de rétention.

La présence de six lignes à haute tension et leur faible hauteur a nécessité un protocole spécifique. Le respect des règles de sécurité électrique a contraint à limiter les hauteurs de déploiement des engins de chantier et à travailler plus en profondeur en dessous des lignes.

4. UN MÉLANGE DE GAZON QU'IL A FALLU ADAPTER. Le semis du mélange de gazon a été réalisé en automne 2014 sur une couche de sable et de compost de 1 à 2 cm maximum. Les espèces composant le mélange ont été sélectionnées pour leur résistance à la sécheresse : fétuques, bromes, ou autres graminées moins courantes comme la mélique. Si le gazon s'est relativement bien développé le premier hiver et au début du printemps, mis à part quelques difficultés de germination sur certaines espèces, l'été 2015 exceptionnellement sec dès la mi-mai lui a été fatal en l'espace de deux semaines. Les arrosages sur ce sol très drainant se sont avérés largement insuffisants pour maintenir le jeune gazon en vie. Un sursemis a été nécessaire à l'automne 2015 pour regarnir les zones non végétalisées. « Après expertise, pour éviter d'autres déboires, et obtenir une implantation rapide avant les premières utilisations du parking au printemps 2016, nous avons fait le choix d'un mélange plus classique : 50 % de ray-grass et 50 % de fétuques. Après une année 2016 nettement plus pluvieuse, l'engazonnement est aujourd'hui satisfaisant », explique le concepteur. Au niveau de l'entretien, les tontes entre avril et octobre, avec un net ralentissement durant l'été, sont les seules interventions.

5. DES PARKINGS ENHERBÉS À GÉNÉRALISER ? Ce type de parking peut s'envisager en beaucoup d'endroits, que l'on soit en zone rurale ou urbaine, à la fois pour l'atout paysager indéniable et pour éviter d'imperméabiliser de vastes zones. La structure du sol mis au point ici, soit 30 à 35 cm de mélange terre-pierres, peut être transposable sur d'autres projets avec toutefois quelques réserves. Le parking des Panettes n'est utilisé que quelques jours par an et des moyens humains importants sont mis à disposition les jours de match. Des placiers dirigent les véhicules vers leur emplacement (qui est inscrit sur le billet d'entrée du stade), ce qui limite au maximum la circulation de véhicules sur les voies secondaires. Après la première année d'utilisation, malgré cette faible fréquentation, certaines zones sont marquées par le passage des véhicules : cela dépend essentiellement de l'épaisseur de la couche de surface sable et compost. Si celle-ci est trop importante (supérieure à 1 cm) cela conduit à des orniérages. Pour cette raison, un peigne de stationnement de 200 m de longueur réalisé manuellement en fin de chantier (zone qui servait de stockage provisoire) a été entièrement repris à l'automne 2016.

Pour Ghislain Gobba, « ce type de parking peut plus difficilement s'envisager pour des stationnements fréquents, la qualité de l'engazonnement risque de se détériorer rapidement. Il faudrait dans ce cas limiter la longueur des peignes de stationnement ou ne végétaliser que les places de parking. De plus, on remarque que, sur des parkings d'entreprise, où les véhicules restent garés toute la journée, le gazon a aussi du mal à se pérenniser, faute de lumière ».

Claude Thiery

Le chantier à la fin d'août 2014 avant le semis. Les espèces composant le mélange ont été sélectionnées pour leur résistance à la sécheresse : fétuques, bromes, ou autres graminées moins courantes comme la mélique. Mais l'été sec de 2015 a contraint à modifier ces choix, pour une implantation plus rapide.

PHOTO : AXE SAÔNE

Les terres ont été stockées bâchées pour protéger leurs qualités biologique et physique.

PHOTO : AXE SAÔNE

Réalisation des planches d'essais qui ont permis de tester, sur 100 m2, plusieurs types de structure avec des variantes par rapport à la granulométrie, l'épaisseur des différentes couches et le pourcentage de terre.

PHOTO : AXE SAÔNE

La surface du parking est en légère pente pour diriger, en cas de forte pluie,les eaux de ruissellement vers un réseau de sept kilomètres de noues végétalisées.

PHOTO : AXE SAÔNE

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