Agriculture urbaine : quelles opportu nités pour les producteurs ?
Guillaume Morel-Chevillet, en charge des questions d'agriculture urbaine au sein d'Astredhor, appor te son éclairage sur la situation,le profil des agriculteurs urbains professionnels, les freins au développement de cette activité.
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Si l'agriculture urbaine collective et non lucrative existe depuis plus d'un siècle, le développement d'une agriculture urbaine professionnelle est plus récente, à partir des années 1970-1980 avec une accélération marquée depuis une dizaine d'années. Au cours des journées techniques d'Astredhor organisées à Paris en janvier 2016 sur le thème « horticulteurs, pépiniéristes, paysagistes : des spécialistes au coeur de l'agriculture urbaine », diverses opportunités à saisir pour cette filière du végétal ont été évoquées, en particulier dans le domaine du transfert de technologies et du développement de nouvelles gammes végétales ou pour assurer un complément d'activité. Les professionnels s'en sont-ils saisis ? Pour Guillaume Morel-Chevillet, responsable végétal urbain au sein d'Astredhor et auteur d'un récent ouvrage sur l'agriculture urbaine, l'appropriation reste encore timide. « Peu de professionnels de l'horticulture ou de la pépinière se sont lancés dans une activité complémentaire d'agriculture urbaine, alors qu'elle peut constituer un moyen de développer une production à haute valeur ajoutée et de mieux faire connaître ses activités auprès des citadins, comme le montre l'exemple des pépinières Chatelain (voir encadré). » Le constat est similaire pour la production de jeunes plants de légumes qui reste en deçà des besoins pour les agriculteurs urbains professionnels. Quant à la valorisation des savoirs techniques, elle est principalement portée à ce jour par les centres techniques tels que l'Astre-dhor ou le Critt Horticole de Rochefort-sur-Mer (17), avec des projets axés sur la culture verticale, l'économie circulaire ou le développement de serres en toitures.
Qui sont alors les agriculteurs urbains professionnels et quels sont leurs besoins pour développer leur activité ?
Des besoins variéspour des profils multiples
Si les personnes qui développent une activité d'agriculture urbaine le font dans le cadre d'une reconversion professionnelle, de nombreux jeunes diplômés (paysagistes, agronomes, économistes) se lancent aussi dans ce secteur. Elles peuvent disposer d'une formation de niveau supérieur, parfois dans un domaine d'activité éloigné et, dans ce cas, elles acquièrent assez facilement les connaissances techniques fondamentales et des compétences pour occuper des postes à responsabilités. Mais comme pour ceux qui n'ont pas ou peu de qualification, l'apprentissage du métier passe impérativement par une phase complémentaire de pratique. Par ailleurs, on trouve de plus en plus de jeunes ingénieurs et techniciens issus du secteur du paysage ou de l'agronomie qui ont choisi une spécialisation en agriculture urbaine à l'issue de leur formation initiale, à l'image de celles dispensées par AgroParitech, UniLaSalle Rouen (76), l'école du Breuil (75) ou encore le CFPPA d'Écully (69). Côté fournitures, les attentes restent fortes car même si le marché a évolué ces dernières années, avec une augmentation de l'offre en matière de substrats spécifiques ou de semences et plants adaptés à ce secteur, les besoins sont loin d'être comblés et répondent plus aux besoins des jardiniers amateurs qu'à celui des professionnels qui souhaitent des quantitatifs bien plus importants. L'approvisionnement en semences et jeunes plants de légumes bio et/ou en variétés anciennes reste particulièrement complexe, même si des initiatives se développent comme Pépins Production à Paris ou La pousse qui pousse à Bruxelles (Belgique) créées pour répondre à ce besoin de fournitures de jeunes plants maraîchers et horticoles, avec une vocation complémentaire de sensibilisation des citadins à l'horticulture. « Pour des espèces rares comme des variétés asiatiques de choux, je suis obligé de m'approvisionner en Amérique du Nord », explique Simon Ronceray, salarié de l'association Veni Verdi, qui souligne également la difficulté à se faire livrer ses commandes en plein Paris. Même constat concernant les jeunes plants du côté de Laurent Chatelain qui s'est résolu à partir de semis pour l'instant.
S'unir et partagerpour progresser
Pour favoriser une agriculture urbaine viable sur le plan économique, Guillaume Morel-Chevillet insiste sur la nécessité de laisser s'exprimer toutes les formes de production, de partager les expériences, de créer des liens, d'associer différents types de production, sans oublier de s'appuyer sur les acteurs du monde agricole « historique ». Car le croisement des approches est source d'innovation pour proposer des solutions adaptées aux enjeux et contraintes de la ville. Il faut aussi trouver les moyens de mieux valoriser les services écosystémiques rendus par les agriculteurs urbains dans les domaines de la biodiversité ou de l'insertion sociale. C'est dans cet objectif de partage qu'a été créée, en 2016, l'Association française d'agriculture urbaine professionnelle (AFAUP), regroupant près de 70 structures, dont 45 % en Île-de-France, représentant 1 600 emplois, 44 ha de production, dont 50 % en pleine terre, 20 % en hors-sol, le reste en substrat organique. Les profils des adhérents sont très variés : consultants, fournisseurs, exploitants, animateurs, acteurs de l'insertion par le travail, porteurs de projets créateurs de lien social, à vocation pédagogique, concepteurs de paysages comestibles
Yaël Haddad
Une offre regroupéeParcelles de potager pour les étudiants de la formation agriculture urbaine et périurbaine (option initiative locale) de l'école du Breuil. . PHOTO : ÉCOLE DU BREUIL
Un terrain de formationLes produits des adhérents à La Ruche qui dit Oui sont proposés sur le pointde vente des pépinières Chatelain. PHOTO : PÉPINIÈRES CHATELAIN
Des produits valorisésLes légumes de Chatelain Maraîchage mis en valeur à l'Auberge des Saints Pères, restaurant 1 étoile d'Aulnay-sous-Bois (93). PHOTO : PÉPINIÈRES CHATELAIN
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