Achats : les collectivités doivent ado pter la « made in France attitude »
FranceAgriMer a publié, en fin d'année dernière, une synthèse sur les approvisionnements des collectivités territoriales en végétaux d'ornement (*). Huit pistes destinées à faciliter l'achat de végétaux français plutôt qu'étrangers sont proposées.
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Avec cette étude, FranceAgriMer a voulu « recueillir les premiers éléments de compréhension concernant la manière dont les végétaux importés parviennent aux collectivités ». Des éléments qualitatifs, critères de choix, par exemple, et quantitatifs, pour avoir un ordre de grandeur des flux de végétaux importés. Mais, plus qu'une quantification fine des importations par les collectivités, qui n'existe pas à ce jour, l'étude a surtout pour but d'identifier les moyens permettant de favoriser l'usage de végétaux français. Elle a été réalisée à partir d'une trentaine d'entretiens avec des acteurs de la filière française, une dizaine de producteurs, autant de grands acteurs des aménagements paysagers, six collectivités et trois grossistes. Ces derniers ont « une place réduite dans l'approvisionnement des collectivités », du moins les Français, les grossistes étrangers ayant « un rôle plus important dans l'approvisionnement des autres acteurs interrogés, producteurs et entreprises du paysage. Ceci est d'autant plus marqué de nos jours car les collectivités ont tendance à demander un panel d'espèces de plus en plus vaste », note l'enquête. Panel que les producteurs français « ne peuvent pas avoir en catalogue » dans son ensemble, les obligeant à se tourner vers le négoce. Et pour conclure sur la méthode, vu que les collectivités n'ont que peu de visibilité sur l'origine des végétaux plantés, les échanges se sont focalisés sur la compréhension des critères de choix, les manières de gérer les appels d'offre ou bons de commande.
Producteurs : le liense complexifie en raison des prix
Les producteurs travaillent davantage avec les entreprises du paysage (59 % du chiffre d'affaires) qu'avec les collectivités (14 %). Ce qui s'explique « par le fait que le travail en direct avec les collectivités a souvent lieu dans le cadre de l'entretien des espaces verts, pour le renouvellement des végétaux, tandis que l'activité effectuée avec les entreprises du paysage correspond à des créations, et les volumes y sont beaucoup plus importants ». La part de l'activité réalisée avec ces entreprises aurait tendance à augmenter, les collectivités, moins dotées, ne disposant plus toujours d'équipes disponibles pour les plantations.
Vu du côté des producteurs, les critères d'achat ont évolué. « Alors qu'une seule espèce pouvait être commandée en grande quantité il y a quelques années, la commande publique préfère désormais jouer la diversité, obligeant les producteurs à effectuer du négoce avec leurs pairs ou des grossistes à l'étranger pour élargir leurs gammes produites. Le second critère reste celui du prix », poursuit l'étude, qui précise que les acteurs qui ont peu de connaissances des végétaux se basent sur le critère du prix. Enfin, la maîtrise de la logistique est également un critère incontournable, les producteurs étant souvent historiquement défavorisés, puisqu'éloignés les uns des autres, ce qui rend la constitution de gammes larges et de quantités suffisantes malaisée. Les labels arrivent en quatrième position des critères de choix.
Entreprises du paysage :le prix, la qualité, puis le service
Les entreprises du paysage qui ont été interrogées réalisent 71 % de leur chiffre d'affaires avec les collectivités pour la création d'espaces verts (en 2016, l'ensemble de ces sociétés a réalisé en moyenne 27,5 % de leur chiffre d'affaires avec les collectivités. Donnée Unep, voir le Lien horticole n° 1039-40 du 13 décembre 2017). En général, elles n'allotissent pas le marché pour distinguer les végétaux des travaux de création. Elles s'en expliquent par le fait que « l'allotissement peut poser des problèmes au niveau de la garantie de reprise ». Leur choix de végétaux « va dépendre fortement du niveau de précision et du descriptif des attendus des cahiers des charges. S'il est détaillé par un paysagiste concepteur, la recherche de qualité sera importante ». Dans le cas contraire, la mention « d'arbres » sans espèce ni précision amène l'entreprise à s'orienter vers des prix bas.Pour les entreprises, le critère de prix « est déterminant dans le choix des végétaux, il est souvent différenciant, la proposition technique étant très similaire d'un acteur à l'autre. À cela s'ajoute une nécessité de qualité, et de services », délais et optimisation de la livraison, entre autres. Mais les entreprises expliquent aussi que « le volume de la commande va ensuite beaucoup jouer sur la part d'import. En effet, pour obtenir des végétaux standardisés et en quantité, il est nécessaire d'aller à l'étranger, les producteurs français n'étant a priori pas en mesure de répondre à ce type de demande ». Enfin, les labels sont peu connus des acheteurs des entreprises du paysage. Rarement requis dans les appels d'offre, ils sont peu recherchés.
Les collectivités sensiblesà la qualité, des modèles ?
De leur côté, les collectivités travaillent surtout avec des producteurs français dans le cadre de l'entretien, et des entreprises du paysage pour la création. Elles ne sollicitent pas de grossistes français. « Les plus sensibilisées à l'importance de la qualité des végétaux peuvent proposer des cahiers des charges dans lesquels le critère de prix ne rentre qu'à hauteur de 30 % dans la note finale d'appréciation, contre 40 % pour les critères environnementaux et 30 % techniques », note le rapport, qui précise qu'il s'agit souvent de collectivités importantes et dynamiques, pouvant servir de moteur et d'exemple. Elles peuvent travailler en local avec pour critère la nécessité de disposer de plantes cultivées dans des territoires « proches, similaires » à ceux du lieu de plantation. Certaines apprécient les labels, d'autres préfèrent se référer aux pratiques des pépinières, via un marquage sur place des végétaux, même si le temps manque parfois. Enfin, certaines proposent de faire des choix de végétaux à la place des sociétés d'économie mixtes (SEM), qui manquent de compétences.
Acheter des plantes françaises
Au final, les importations sont dues « aux producteurs, qui complètent leurs gammes et surtout aux entreprises du paysage, notamment quand elles recherchent des végétaux standardisés en volume ». Et l'étude de conclure que 40 à 50 % des achats de végétaux des collectivités pourraient être d'origine étrangère. Au-delà de ces constats, l'étude publiée par France-AgriMer propose plusieurs pistes de travail pour que les achats des plantes françaises soient facilités. La première est de proposer un guide aux sociétés d'économie mixte (SEM) et collectivités pour les aider à rédiger des appels d'offres axés davantage sur la qualité et la proximité (une première édition a été lancée lors du dernier Salon des maires, voir le Lien horticole n° 1038 du 6 décembre 2017 ou le télécharger sur www.valhor.fr ou www.citeverte.com. Une fiche a aussi été créée. Elle est téléchargeable sur http://agriculture.gouv.fr/locavert). La deuxième est d'orienter les collectivités vers davantage d'allotissement dans les appels d'offres, car des lots plus spécifiques permettraient de mieux maîtriser la qualité. Mais certains acteurs n'y sont pas favorables, du fait du manque de clarté dans le partage des responsabilités dans la garantie de reprise. Troisième piste, favoriser le marquage en pépinière à la suite de l'attribution des appels d'offres. Si le temps disponible peut être un frein, l'usage du numérique permettrait d'améliorer les choses, estime le rapport.
Des outils permettant de favoriser la traçabilité des végétaux sont évoqués. Un critère qui n'est pas pris en compte actuellement dans les appels d'offres, mais auquel s'intéressent plusieurs collectivités.
L'augmentation des contrôles de qualité et du respect du cahier des charges a posteriori, qui obligerait les entreprises à joindre les factures d'achat des végétaux, estune autre piste de réflexion.
Mieux faire découvrir les labels, Fleurs de France n'étant pas connu de tous, est également indispensable. Le rapport de FranceAgriMer évoque le besoin de chaîner les labels de production et de créer des liaisons entre ceux qui concernent la production et l'éco-gestion des espaces verts.
Il faut ensuite sensibiliser les acteurs qui ne possèdent pas de services spécialisés, comme les SEM, et qui se basent sur le prix, à se former et à avoir recours aux concepteurs paysagistes.
Enfin, la dernière piste de réflexion est de favoriser et mieux organiser le regroupement, les alliances de producteurs français pour qu'ils soient plus compétitifs vis-à-vis de l'import : une offre en gamme et en volume adaptée, des prix optimisés (grâce à des économies d'échelle au niveau de la logistique, notamment), une meilleure vi-sibilité, en s'inspirant de la solution Agrilocal (voir encadré)...
Pascal Fayolle
(*) Étude réalisée par le cabinet Abso Conseil financée par FranceAgriMer.
Une plus grande diversitéAlors qu'une seule espèce pouvait être commandée en grande quantité il y a quelques années, la commande publique préfère désormais jouer la diversité. PHOTO :PASCAL FAYOLLE
Des achats via les entreprises du paysageLes achats de végétaux effectués par les collectivités se font le plus souvent via les entreprises du paysage. Cette part aurait tendance à augmenter. PHOTO :PASCAL FAYOLLE
La logistique, un critère décisifAprès la gamme et le prix, la logistique est le troisième critère d'achat de végétaux, ce qui défavorise les Français, éloignés géographiquement les uns des autres. PHOTO : VALÉRIE VIDRIL
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