Optimiser l’empreinte écologique de l’horticulture
Parmi les enjeux environnementaux auxquels nous faisons face figure l’impact négatif des déchets plastiques sur les ressources naturelles et la biodiversité. Mais il est également nécessaire de revoir notre empreinte écologique dans sa globalité.
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Les filières horticoles doivent s’engager pour participer à la recherche de solutions durables et promouvoir la contribution positive des fleurs et plantes au développement durable. C’est ce qu’a indiqué le secrétaire général de l’AIPH (Association internationale des producteurs de l’horticulture), Tim Briercliffe, lors d’une journée de conférences sur les déchets plastiques en avril 2019. L’association y contribue d’ailleurs par des actions de sensibilisation, partage de connaissances, encouragement des entreprises vertueuses (Gold Sustainability Award) et participation à la plateforme d’évaluation des outils FSI (Floriculture Sustainablility Initiative, initiative de durabilité de floriculture). Entre pots de culture, films et bâches, plateaux, étiquettes, housses, seaux, l’horticulture utilise de nombreux produits plastiques.
Des professionnels s’engagent
Plusieurs pays encouragent les entreprises à s’engager. Aux Pays-Bas, le ministère des infrastructures et de la gestion de l’eau a lancé le Plastic Pact, signé par 75 entreprises. Ce pacte fixe aux signataires quatre objectifs à atteindre d’ici 2020 : 70 % de plastiques recyclés, 20 % de réduction des usages, nouveaux produits contenant au moins 35 % de matériaux recyclés et 100 % recyclables.
FloraHolland, signataire du Plastic Pact, a conçu un nouveau seau permettant d’augmenter la densité de chargement des fleurs coupées et utilise des plateaux de transport des plantes à usage unique recyclables. Pour atteindre les objectifs du pacte, le marché dit devoir encore travailler sur le pourcentage de produits recyclés (aujourd’hui 50 %) et la réduction des usages du plastique.
De nombreux distributeurs et industriels en Europe s’emparent du problème, en travaillant sur la réduction des emballages et le développement d’emballages recyclables ou compostables. Deux exportateurs néerlandais, Royal Lemkes et Van Dijck Flora, ont témoigné de leurs travaux conjoints, dans le cadre d’un appel à projet pilote :
– réduire l’usage des plastiques en supprimant les housses des plantes ou en testant des productions sans pots ;
– réutiliser les plateaux de transport, avec un projet pilote de collecte ;
– rechercher des matériaux alternatifs (pots biodégradables, plateaux en cartons…).
Ils ont insisté sur l’importance d’une concertation pour tenir compte des contraintes de chaque échelon de la filière, jusqu’au consommateur, et de trouver un modèle économique viable, car les solutions alternatives coûtent plus cher. Il est plus facile d’organiser une collecte au niveau des distributeurs que des consommateurs, mais cela suppose que les magasins disposent d’une surface de stockage, plus fréquente en supermarchés qu’en jardinerie.
Innovations produits
L’association Horticulture Trade Association (Royaume-Uni) a présenté l’initiative d’un groupe de dix producteurs vers une solution plus vertueuse : constatant que la non-recyclabilité des pots noirs était liée à la présence de pigments de carbone qui empêche leur détection dans la plupart des chaînes de tri (procédé par infrarouges), les producteurs ont invité cinq fabricants à présenter leurs solutions alternatives. Ils se sont accordés sur un pot en polypropylène de couleur « taupe », issu à 98 % de plastique recyclé, recyclable par les filières de collecte ménagère existantes et pouvant être fabriqué par tous les fournisseurs consultés. Ce choix s’est accompagné d’une campagne de communication grand public, avec un bon accueil consommateur. HTA souhaite étendre cette démarche aux plaques, étiquettes et sacs plastiques de substrats.
En matière d’affichage environnemental, Sven Hoping a souligné l’importance pour les fabricants d’être transparent avec des certifications garantissant une réelle recyclabilité de l’ensemble des composants d’un produit, y compris additifs et colorants. Il juge nécessaire une clarification et plus de contrôles dans ce domaine.
Étonnamment, la seule contribution sur les pots biosourcés est venue d’une étude consommateurs américaine, qui a prouvé la bonne acceptabilité de ces pots, avec une proposition de prix supérieure à celui de pots plastiques de même taille de 30 à 50 centimes de plus par rapport à la même plante en pot plastique.
Évaluation globale de l’empreinte écologique
Il est clair que la problématique plastique est aujourd’hui sur la table et pourrait dans le futur devenir aussi importante pour nos filières que d’autres enjeux comme les pesticides. En raison de la diversité des produits et des situations, il n’y a pas une seule solution, mais un panel de solutions à trouver, qui requiert la collaboration de l’ensemble des acteurs de la filière, des fabricants de plastique aux consommateurs. Parallèlement, des actions pour harmoniser et promouvoir les solutions de recyclage au niveau européen sont nécessaires. L’usage de plastiques ou d’autres matières ne constitue que la partie visible de l’empreinte environnementale. Si le secteur veut être reconnu comme producteur de nature, il doit aussi pouvoir prouver et faire valoir ses contributions positives en termes d’empreinte écologique. Le bilan carbone doit tenir compte des équipements, matières, procédés, transport, traitement des produits, mais aussi des actions de réparation ou compensation des impacts négatifs. Il est très différent selon les modalités de production et de transport et la durée de vie des végétaux. Boudewijn Mos, directeur d’Ecochain, a ainsi comparé l’impact des schémas de production et de transport de roses sur leurs émissions de CO2 : si le transport aérien est le premier facteur d’émissions pour une production kenyane, le chauffage et l’éclairage sont déterminants pour une production européenne sous serre.
Le professeur Charlie Hall, de l’université du Texas, travaille sur le cycle de vie complet des végétaux d’extérieur, en tenant compte de leur modalités de production et durée de vie. Les premiers résultats montrent que la plupart des arbres et arbustes ont une empreinte carbone nette positive , avec une contribution nette plus importante pour les arbres de pleine terre que pour les arbustes en conteneur, en raison de l’impact du terreau et des pots plastiques. Les résultats sont moins probants pour les plantes à massif, en raison de leur courte durée de vie. Ces travaux ont besoin d’être poursuivis et affinés. Comme une réalisation paysagère n’est jamais constituée avec un seul type de plantes, Charlie Hall plaide pour une approche système, avec calcul de la contribution nette par typologie d’ensembles paysagers. Il encourage aussi à associer bilan environnemental et économique, pour démontrer que les pratiques environnementales vertueuses vont souvent de pair avec une plus grande efficacité économique.
La même démarche peut être entreprise pour l’empreinte eau, même si sur ce point sensible en période de sécheresse, la consommation nette d’eau est à mettre en miroir des bienfaits attendus pour la qualité du cadre de vie, la santé, la lutte contre les îlots de chaleur.
Marie-Françoise PetitjeanVoir aussi notre dossier « Quel avenir pour le pot horticole ? » paru dans Le Lien horticole n° 1088.
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