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Gérer autrement les pelouses et prairies

À l’image de Lyon ou de Besançon, de nombreuses villes se détournent des pelouses nécessitant un entretien régulier et misent sur d’autres types de gestion des couverts enherbés.

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Si les pelouses dites « prestige », tondues, arrosées et fertilisées régulièrement, trouvent encore leur place en ville, leur surface tend à diminuer au fil des années. D’abord pour des raisons économiques, afin de réduire les coûts d’entretien, ensuite parce que ces espaces sont de moins en moins en phase avec les attentes des citadins, qui aspirent à davan­tage de naturel. Lors d’une journée technique EchoPaysage à l’EPL de Dardilly (69), le 13 juin dernier, Jean-Marie Rogel – pour la Ville de Lyon (69) – et Guy Longeard – pour la ville de Besançon (25) – ont présenté comment, dans chaque collectivité, s’est opérée cette transition vers des couverts enherbés gérés de façon plus extensive et écologique.

Penser à l’entretien dès la conception

Préalablement à tout plan de gestion, un inventaire complet du pa­tri­­moine (espaces paysagés et naturels) doit être dressé : cartographie SIG, classement par typologie : site histo­rique, squares, parcs, zones boisées. En fonction des caractéristiques et particularités, des objectifs recherchés, de la fréquentation par le public... vient ensuite la répartition en classes d’entretien (gestion différenciée) soit d’un site dans son ensemble, soit par zonage.

À partir de ces données, l’élaboration de fiches d’intervention permet de préciser le type de gestion (tonte, fauche, broyage...), la fréquence ou les dates d’intervention préconisées, la hauteur de coupe, le matériel utilisé, etc.

Les prairies apportent une nouvelle image au paysage urbain. Cette évolution répond à différents objectifs, notamment celui de la préservation de la biodiversité. Toutefois, mis à part dans des sites naturels proté­gés (lire l’encadré page ci-contre), cet objectif envi­ronnemental doit concilier les contraintes­ liées à la fréquentation par le public. La gestion des couverts enherbés, « c’est d’abord gérer des paradoxes entre la préservation de la biodiversité, notamment via des fauches tardives, les attentes de nature de la part des habitants et la pression d’usage liée à la fréquentation », souligne Jean-Marie Rogel, chef du service gestion du paysage à la Ville de Lyon. Des contraintes sanitaires comme la maladie de Lyme, les allergies, les nuisibles, l’organisation de concerts dans les parcs, les contraintes de nettoyage, etc. entrent en ligne de compte : « Choisir les sites pour la fauche et le moment où on doit la faire, c’est prendre en compte ces paradoxes. »

Dans les grands espaces comme les parcs, la gestion en prairie est évidente. Dans des zones plus res­treintes, cette gestion se fait au cas par cas, à des emplacements précis : pentes, pieds d’arbres, terre-pleins, lisières, qui constituent autant de refuges pour les espèces animales et végétales. L’enherbement des allées et sols sablés constitue des surfaces végétalisées intéressantes.

Si la conscience écologique pro­gresse et que la fauche tardive est mieux acceptée, le regard porté par les usagers sur ces espaces non tondus et l’impression d’abandon ou de manque d’entretien qu’ils peuvent ressentir ne doit pas être oublié.

« À Besançon, les fauches tardives sont souvent associées à une bande de propreté tondue pour montrer que le site est entretenu régulièrement », explique Guy Longeard, technicien à la direction des espaces verts de la Ville. Cette pratique laisse aussi aux agents une certaine souplesse, voire une part de créativité dans leur travail.

Des jardiniers engagés

Cet engagement en faveur de la biodiversité redéfinit le métier de jar­dinier. Les techniciens, agents de maîtrise et de terrain participent activement aux inventaires floris­tique et faunistique des prairies, en suivant notamment les protocoles Florilèges-prairies urbaines et Propage*, ou « Smart Faune », application interne au territoire bisontin. Pour les agents, ces nouvelles missions sont une source de motivation dans le travail, et cela établit une communication avec les habitants, qui sont de plus en plus sensibles à tous ces aspects. Ces suivis qualitatifs des pelouses et prairies donnent une idée de la richesse – ou de la pauvreté – écolo­gique et aident à orienter les priorités. Avec une gestion adaptée, la réponse en termes de biodiversité est assez rapide. En tonte classique, la hauteur et la fréquence de coupe peuvent difficilement être modifiées s’il y a présence de fleurs et d’insectes (sauterelles, papillons, etc.), alors que la fauche peut être décalée d’une ou plusieurs semaines. De plus, les insectes ne ressortent pas indemnes d’une tondeuse, en mulching encore moins.

Claude Thiery

*Le programme de sciences participatives Florilèges-prairies urbaines, développé par Plante&Cité, Natureparif et le Muséum national d’Histoire naturelle, est destiné aux gestionnaires d’espaces verts pour évaluer l’état écologique de leurs prairies et l’in­fluence des pratiques de gestion sur l’évolution de la diversité végétale.

Propage (protocole papillons gestionnaires) vise, à travers le suivi des papillons de jour, très sensibles aux perturbations de leur environnement, d’évaluer la qualité du milieu.

© Claude THIERY - Entre 2008 et 2016, l’orchis pyramidal est passé de vingt à plus de cinq cents individus dans la zone de captage de Jonage (Auvergne-Rhône-Alpes).

© VILLE DE BESANÇON - Les agents de maîtrise et de terrain participent activement aux inventaires floristique et faunistique des prairies.VILLE DE BESANÇON

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